Vu 1°) la requête, enregistrée sous le n°01DA00258 le 9 mars 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société Uranie X..., dont le siège est situé zone industrielle de Compiègne/Le Meux à Le Meux (60881), par Me Z..., avocat ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9802456-9802457 en date du 21 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté préfectoral du 14 mai 1998 la mettant en demeure de compléter son dossier de demande d'autorisation et de suspendre toute activité générant des nuisances sonores sous le hall de réception des matières premières de l'établissement situé rue de l'Industrie à Ferrière-la-Grande dans l'attente de la réalisation et de la vérification des travaux d'isolation phonique ;
2°) de lui donner acte de ce qu'elle renonce à l'augmentation de ses capacités de production ;
3°) de dire en conséquence sans objet l'article 1er de l'arrêté du 14 mai 1998 ;
4°) d'annuler l'article 2 du même arrêté ;
5°) subsidiairement, de porter de trois à douze mois le délai qui lui est imparti pour répondre aux observations formulées par la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement.
Code C+ Classement CNIJ : 44-02-02-01-03
44-02-04-01
Elle soutient que les nuisances sonores constatées proviennent éventuellement de l'activité de la société Sark International qui constitue une société distincte ; qu'elle a réalisé d'importants travaux pour réduire le bruit en limite de propriété ; qu'elle a renoncé à son projet d'augmentation de ses capacités de production ;
Vu 2°) la requête, enregistrée sous le n°01DA00259 le 9 mars 2001 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société Sark International dont le siège est ..., par Me Z..., avocat ; la société demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 21 décembre 2000 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté préfectoral du 14 mai 1998 la mettant en demeure de compléter son dossier de demande d'autorisation et de suspendre toute activité générant des nuisances sonores sous le hall de réception des matières premières de l'établissement situé rue de l'Industrie à Ferrière-la-Grande dans l'attente de la réalisation et de la vérification des travaux d'isolation phonique ;
2°) de dire sans objet l'article 1er de l'arrêté du 14 mai 1998 ;
3°) d'annuler l'article 2 du même arrêté ;
4°) subsidiairement, de porter de trois à douze mois le délai qui lui est imparti et de dire qu'elle pourra, dans un délai de quinze mois, réinstaller les machines dans le hall de réception des matières premières ;
5°) de dire que son activité n'est plus soumise à autorisation mais à simple déclaration ;
Elle soutient que le projet d'extension de ses activités n'est plus d'actualité ; qu'elle relève désormais, compte tenu de l'arrêt de certaines machines, du régime de simple déclaration ; que le délai de trois mois qui lui est imparti est insuffisant et injuste au regard des délais dont a disposé l'administration ; que les travaux effectués ont permis de réduire notablement le niveau sonore ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, dans les affaires susvisées, les mémoires en intervention, enregistrés le 15 juin 2001, présentés pour l'association Vivre à Ferrière-la-Grande , par la S.C.P. Debacker Durieux et associés, avocats, concluant au rejet des requêtes, à la condamnation des sociétés requérantes au paiement d'une amende pour recours abusif de 20 000 francs et d'une somme de 25 000 francs au titre des frais irrépétibles ; elle soutient que son intervention devant le tribunal administratif de Lille était recevable ; qu'en tout état de cause chacun des membres de l'association, y compris son président, riverains de l'installation litigieuse, avait qualité à agir ; qu'il convient de joindre les deux requêtes ; que l'intention prétendue des sociétés requérantes de renoncer à l'extension de leurs capacités de production est sans influence sur la légalité des arrêtés attaqués ; que les sociétés ont fait fi des mises en demeure de l'administration et continué l'exploitation et avec elle les nuisances sonores ; qu'elle justifie le doublement de l'amende prononcée en première instance ; que le président-directeur général de la société a été condamné pénalement à raison de ces faits ;
Vu, dans l'affaire 01DA00259, le mémoire enregistré le 16 avril 2002, présenté pour la société Sark International, concluant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que l'administration a commis une confusion entre les deux sociétés qui se trouve à l'origine du litige ; qu'ayant renoncé à l'extension de ses capacités de production, la société exerce aujourd'hui régulièrement son activité d'écroûtage sur la base de l'arrêté d'autorisation dont a bénéficié en 1988 la société Métra Méca dont elle a repris l'activité ;
Vu, dans l'affaire 01DA00258, le mémoire enregistré le 13 juin 2002, présenté pour l'association Vivre à Ferrière-la-Grande concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire et au paiement par la société Uranie X... d'une somme de 3 048,98 euros au titre des frais irrépétibles ; elle fait valoir que, contrairement à ce qu'affirme la société Uranie X..., l'activité de chromage est génératrice de nuisances sonores ; que les émanations de chrome sont traitées par quatre extracteurs fonctionnant bruyamment nuit et jour ; que les nuisances sonores proviennent bien des deux sociétés qui utilisent les mêmes locaux, le même personnel, la même direction et qui fonctionnent sous le même toit ; que le hall dont s'agit est utilisé indistinctement par les deux sociétés ; qu'aucune insonorisation n'a été réalisée ;
Vu, dans l'affaire 01DA00259, le mémoire enregistré le 8 août 2002, présenté par l'association Vivre à Ferrière-la-Grande , concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire et au paiement par la société Sark International d'une somme de 3 048,98 euros au titre des frais irrépétibles ; elle fait valoir que l'activité des deux sociétés est à l'origine des nuisances sonores ; qu'en particulier le hall de réception des matières premières est indistinctement utilisé par l'une et par l'autre ;
Vu, dans l'affaire 01DA00258 le mémoire enregistré le 13 août 2003, présenté par la société Uranie X... concluant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle fait valoir, en outre, que le principal plaignant industriel fixait une installation faisant tout autant de bruit que l'installation critiquée ; que les habitations exposées au bruit ont été acquises à un prix tenant compte de leur emplacement à proximité d'une zone industrielle et que les propriétaires cherchent à réaliser une plus value en obtenant la suppression de cette zone ;
Vu, dans l'affaire 01DA00259, le mémoire enregistré le 13 août 2002, présenté pour la société Sark International, concluant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu, dans les affaires susvisées, le mémoire enregistré le 27 février 2004, présenté par le ministre de l'écologie et du développement durable concluant au rejet des requêtes ; il soutient que le préfet était tenu de mettre en demeure la société Uranie X... de respecter les prescriptions qui lui avaient été imposées par arrêté préfectoral et la société Sark International, qui fonctionnait sans autorisation, de régulariser sa situation ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2004 où siégeaient M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et Mme Brenne, premier conseiller :
- le rapport de Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur,
- les observations de Me A..., avocat membre de la S.C.P. Debacker-Durieuc et associés, pour l'association Vivre à Ferrière-la-Grande ,
- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur l'intervention de l' association Vivre à Ferrière-la-Grande dans la présente instance :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par délibération du bureau de l'association Vivre à Ferrière-la-Grande en date du 27 avril 2002, le président de cette association a, conformément à l'article 8 de ses statuts, été mandaté pour la représenter dans la présente instance ; que, par ailleurs l'association à intérêt au maintien des décisions attaquées ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité des arrêtés du 14 mai 1998 :
Considérant que les sociétés Uranie X... et Sark International, qui exploitent sur le même site à Ferrière-la-Grande, respectivement un atelier de traitement électrolytique des métaux (chromage de barres d'acier) et un atelier de travail mécanique des métaux, ont déposé auprès des services de la direction régionale de l'industrie et de la recherche, la première une demande visant à augmenter sa capacité de production et la seconde une demande visant à régulariser sa situation administrative au regard de la législation sur les installations classées et à augmenter ses capacités de production ; que, par deux arrêtés distincts en date du 14 mai 1998, le préfet du Nord a, en leur article 1er, mis en demeure ces deux sociétés de compléter leurs dossiers de demande et, en leur article 2, suspendu toute activité générant des nuisances sonores dans le hall de réception des matières premières dans l'attente de la réalisation et de la vérification de l'efficacité des travaux d'isolation acoustique des bâtiments ;
En ce qui concerne l'arrêté pris à l'encontre de la société Uranie X... :
Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu, ainsi qu'elle le demande, de donner acte à la société Uranie X... de ce qu'elle a renoncé à l'augmentation de capacité de production de son atelier, objet de sa demande d'autorisation, et d'abroger en conséquence l'article 1er de l'arrêté préfectoral la concernant ;
Considérant, en deuxième lieu, qu' alors même que la société Uranie X... a repris l'activité de chromage pour laquelle la société Meta Meca avait obtenu une autorisation d'exploitation le 17 mars 1988, le préfet a pu légalement, sur le fondement de l'article 23 de la loi susvisée du 19 juillet 1976, devenu l'article L. 514-1 du code de l'environnement, suspendre son fonctionnement jusqu'à exécution des travaux d'isolation phonique prescrits par son arrêté du 18 juin 1997 ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les sociétés Uranie X... et Sark International, qui ont toutes deux repris les activités antérieurement exercées sur le même site par une société unique, la société Meta Meca, exercent leurs activités dans les mêmes bâtiments, avec le même personnel et sous une direction unique ; que toutefois, contrairement à ce qu'affirme la société Uranie X..., les installations techniques et les manipulations liées à l'activité de chromage de la société Uranie X... participent aux nuisances sonores dont pâtissent les habitants des maisons situées à proximité immédiate ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ces nuisances proviendraient de la seule activité de la société Sark International manque en fait ;
Considérant, en quatrième lieu, que si la société Uranie X... soutient qu'elle aurait réalisé d'importants travaux pour réduire le bruit en limite de propriété, ces allégations ne sont assorties d'aucun commencement de preuve ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée la circonstance, à la supposer établie, que les riverains de l'exploitation auraient acheté leur maison d'habitation à un prix prenant en compte la proximité d'une activité industrielle bruyante ;
Considérant enfin qu'il n'appartient pas à la Cour d' accorder à la société un délai plus important pour répondre aux observations formulées par les services de la direction régionale de l'industrie et de la recherche ;
En ce qui concerne l'arrêté pris à l'encontre de la société Sark International :
Considérant, en premier lieu, qu'il convient, ainsi qu'elle le demande, de donner acte à la société Sark International de ce qu'elle renonce à augmenter la capacité de production de son atelier et d'abroger en conséquence l'article 1er de l'arrêté préfectoral la concernant ; qu' elle n'établit pas, en revanche, avoir, comme elle le soutient, procédé à une réduction de la puissance installée des machines de son atelier qui ferait désormais relever son activité du régime de la simple déclaration ;
Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant d'une demande de régularisation d'une installation fonctionnant jusqu'alors sans autorisation, le préfet a pu légalement, sur le fondement de l'article 24 de la loi susvisée du 19 juillet 1976, devenu l'article L. 514-2 du code de l'environnement, suspendre son fonctionnement jusqu'à exécution des travaux d'isolation acoustique des bâtiments ;
Considérant, en dernier lieu, que si la société Sark International soutient qu'elle aurait effectué des travaux d'isolation phonique permettant de réduire de façon significative le niveau des nuisances sonores, elle ne l'établit pas ; que, contrairement à ce qu'elle soutient, et compte tenu en particulier des mises en demeure qui lui avaient été antérieurement adressées, le délai qui lui est imparti par l'arrêté attaqué pour se conformer aux exigences de l'administration apparaît suffisant ;
Sur les conclusions de l' association Vivre à Ferrière-la-Grande tendant à ce qu'une amende soit infligée aux sociétés requérantes :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ; que la faculté prévue par cette disposition constituant un pouvoir propre du juge, les conclusions de l' association Vivre à Ferrière-la-Grande tendant à ce qu'une amende soit infligée aux sociétés requérantes ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que l' association Vivre à Ferrière-la-Grande , intervenante en défense, n'étant pas partie à la présente instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation des sociétés requérantes à lui payer la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L' intervention de l' association Vivre à Ferrière-la-Grande est admise.
Article 2 : Les articles 1er des arrêtés en date du 14 mai 1998 du préfet du Nord pris à l'encontre des sociétés Uranie X... et Sark International sont abrogés.
Article 3 : Le surplus des requêtes des sociétés Uranie X... et Sark International est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de l' association Vivre à Ferrière-la-Grande présentées sur le fondement des articles L. 761-1 et R. 741-12 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Uranie X..., à la société Sark International, à l'association Vivre à Ferrière-la-Grande et au ministre de l'écologie et du développement durable.
Copie sera transmise au préfet du Nord.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 4 mars 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 18 mars 2004.
Le rapporteur
Signé : M. Merlin-Desmartis
Le président de chambre
Signé : G. Y...
Le greffier
Signé : B. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'écologie et du développement durable en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
Bénédicte B...
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N°01DA00258
N°01DA00259