Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 4 août 2003, présentée pour Mme Martine X, demeurant ..., représentée par Me Lefebvre, avocat ; Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 002323 en date du 26 mai 2003 du vice-président délégué du tribunal administratif d'Amiens qui a, d'une part, prononcé un non lieu à statuer sur la demande tendant à l'annulation de la décision en date du 10 juillet 2000 du directeur adjoint de la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais portant obligation de reverser une somme de 33 345 francs et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant au remboursement des frais irrépétibles ;
2°) d'annuler ladite décision du 10 juillet 2000 ;
3°) de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Code C Classement CNIJ : 62-02-01
Elle soutient que, contrairement à ce qu'indique l'ordonnance attaquée, la sanction a été exécutée ; qu'ainsi sa demande n'était pas devenue sans objet ; que la décision du 10 juillet 2000, prise par un organisme incompétent, doit être annulée ; que la convention lui est inopposable puisqu'elle est contraire au principe fondamental de la liberté du travail, aux principes du droit à la santé et de libre choix du praticien par l'assuré social ;
Vu l'ordonnance et la décision attaquées ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 décembre 2003, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie, représentée par son directeur en exercice, par Me Bourhis, avocat, concluant au rejet de la requête, à la condamnation de Mme X à lui payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'aux entiers dépens ; la caisse fait valoir qu'elle entend s'en rapporter sur le non lieu à statuer ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais était compétente pour notifier le reversement du 10 juillet 2000 à Mme X ; que ni elle ni Mme X ne peuvent se soustraire aux obligations législatives et réglementaires ;
Vu la lettre en date du 3 juin 2004, par laquelle la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 2002-1062 en date du 6 août 2002 portant amnistie ;
Vu l'arrêté du 31 juillet 1997 portant approbation de la convention nationale des infirmiers du 11 juillet 1997 ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2004 où siégeaient M. Merloz, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :
- le rapport de Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article L. 162-12-2 du code de la sécurité sociale dispose que : Les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les infirmiers sont définis, dans le respect des règles déontologiques fixées par le code de la santé publique, par une convention nationale conclue pour une durée au plus égale à cinq ans entre une ou plusieurs organisations syndicales les plus représentatives des infirmiers et la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et au moins une autre caisse nationale d'assurance maladie. Cette convention détermine notamment : ...5° Les mesures que les partenaires conventionnels jugent appropriées pour garantir la qualité des soins infirmiers dispensés aux assurés sociaux et notamment la sélection des thèmes des références professionnelles, l'opposabilité de ces références et ses conditions d'application... ; qu'aux termes de l'article L. 162-12-6, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : La convention nationale prévoit la possibilité de mettre à la charge de l'infirmier qui ne respecte pas les mesures prévues au 5° de l'article L. 162-12-2 tout ou partie des cotisations mentionnées aux articles L. 722-4 et L. 645-2 ou une partie de la dépense des régimes d'assurance maladie correspondant aux honoraires perçus au titre des soins dispensés dans des conditions ne respectant pas ces mesures. Elle fixe également les modalités d'application de l'alinéa précédent, et notamment les conditions dans lesquelles le professionnel concerné présente ses observations ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
Considérant qu'en vertu de l'article 11 de la loi du 6 août 2002 portant amnistie, les faits commis avant le 17 mai 2002 sont amnistiés en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles , à l'exception de ceux qui constituent des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par décision en date du 10 juillet 2000, le directeur de la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais a demandé à Mme X de reverser la somme de 33 345 francs (5 083,41 euros) en application de l'article 11 de la convention nationale des infirmiers conclue le 11 juillet 1997 ; que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif d'Amiens a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande de Mme X, dirigée contre ladite décision du 10 juillet 2000, les faits reprochés à l'intéressée étant amnistiés ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme X a reversé à la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais la totalité de la somme due ; que, dès lors, la demande présentée en première instance par Mme X n'était pas devenue sans objet ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le vice-président du tribunal administratif d'Amiens a prononcé un non-lieu à statuer sur la demande de Mme X ; que, par suite, ladite ordonnance doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme X devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Considérant, en premier lieu, notamment qu'aux termes de l'article 11 paragraphe 5
-notification du reversement de la convention susvisée- : Le reversement est effectué à la caisse primaire pour le compte des autres régimes (...). La professionnelle est informée par la caisse primaire de son lieu d'exercice principal du montant de reversement dû par lettre recommandée avec accusé de réception, dans les quinze jours suivant l'avis rendu par la commission paritaire départementale (...) ; qu'il résulte de ces stipulations que la décision de reversement relève de la seule compétence de la caisse primaire d'assurance maladie qu'elle exerce pour le compte des autres régimes ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la caisse primaire d'assurance maladie pour prendre la décision litigieuse ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient Mme X, le seuil annuel d'activité individuelle ou seuil d'efficience au-delà duquel les infirmiers et infirmières doivent reverser aux caisses d'assurance maladie une partie du dépassement constaté défini par l'article 11 de la convention, ne porte une atteinte illégale ni au principe fondamental de la liberté du travail des infirmiers et infirmières, ni au droit à la santé, ni au principe du libre choix du praticien par le patient rappelé dans les objectifs poursuivis par la convention ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme X doit être rejetée ainsi que, par voie de conséquence et en tout état de cause, les conclusions tendant à ce que soit ordonnée l'exécution provisoire de la décision à intervenir ;
Sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais tendant à ce que Mme X soit condamnée à lui verser une somme d'un montant égal au reversement qui lui a été imposé :
Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais n'est pas recevable à présenter, en défense aux conclusions d'excès de pouvoir de Mme X, des conclusions reconventionnelles contre cette dernière ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées en première instance et en appel par Mme X et en appel par la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à verser à Mme X les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner Mme X à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais la somme qu'elle demande au titre des mêmes frais ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance en date du 26 mai 2003 du vice-président du tribunal administratif d'Amiens est annulée.
Article 2 : La demande présentée par Mme Martine X devant le tribunal administratif d'Amiens est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme Martine X ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Martine X, à la caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais ainsi qu'au ministre de la santé et de la protection sociale.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 24 juin 2004 dans la même composition que celle visée ci-dessus.
Prononcé en audience publique le 8 juillet 2004.
Le rapporteur
Signé : M. Merlin-Desmartis
Le président de chambre
Signé : G. Merloz
Le greffier
Signé : B. Robert
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la protection sociale, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
B. Robert
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N°03DA00869