Vu la requête, enregistrée le 27 octobre 2003 par fax et son original du 28 octobre 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée par la COMMUNE DE SANGATTE, par la SCP A... ; la COMMUNE DE SANGATTE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 18 septembre 2003 du Tribunal administratif de Lille en tant que, par ce jugement, le Tribunal a, à la demande de la SARL Investim, annulé l'arrêté du
11 juillet 2001 du maire portant exercice du droit de préemption sur un terrain situé n° ... à Blériot-Plage ;
2°) de condamner la SARL Investim à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'à la date de la décision attaquée la commune avait, sur le terrain préempté, un projet de réalisation d'habitat locatif à destination notamment des personnes âgées ; que la délibération du conseil municipal du 30 octobre 2001 rappelle l'existence de ce projet qui remonte à la fin de l'année 2000 ; que la décision attaquée, qui mentionne ce projet, est suffisamment motivée ; que, par ailleurs, c'est à bon droit que le Tribunal a rejeté les conclusions de la demande dirigée contre la délibération du 30 novembre 2001 décidant la vente du terrain en cause à la SA HLM Le cottage social des Flandres , laquelle respecte l'article L. 213-11 du code de l'urbanisme et n'est pas entachée de détournement de pouvoir ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 août par fax et son original en date du 9 août 2004, présenté pour la SARL Investim, dont le siège est ..., par Me X... qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit sursis à statuer sur la requête portant sur l'arrêté de rétrocession à la société HLM du terrain préempté ainsi qu'à la condamnation de la COMMUNE DE SANGATTE à lui verser la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient, en ce qui concerne l'arrêté de préemption que la commune a une lecture partielle du jugement attaqué qui ne comporte pas de contradiction dans le raisonnement ; qu'il n'est pas démontré qu'un véritable projet social d'urbanisme existait préalablement à l'arrêté de préemption ; que l'arrêté n'était pas davantage suffisamment motivé ; qu'en ce qui concerne la décision de rétrocession de la parcelle préemptée, qui avait été attaquée par requête distincte devant le Tribunal administratif, ce dernier s'est saisi immédiatement de cette seconde requête sans même permettre le dépôt d'un mémoire de sursis à statuer ; qu'il sera demandé à la Cour de réformer le jugement uniquement sous cet angle ; qu'en ce qui concerne les frais de procédure, le Tribunal ne lui a pas octroyé de sommes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il serait inéquitable de ne pas mettre à la charge de la commune une partie des frais exposés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2004 à laquelle siégeaient M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy et M. Yeznikian, présidents-assesseurs :
- le rapport de M. Yeznikian, rapporteur ;
- les observations de Me A..., pour la COMMUNE DE SANGATTE, et de Me Y..., pour la SARL Investim ;
- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions d'appel principal de la COMMUNE DE SANGATTE :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 applicable en l'espèce : Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l'intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l'article L. 300-1, à l'exception de ceux visant à sauvegarder ou à mettre en oeuvre les espaces naturels, ou pour constituer des réserves foncières en vue de permettre la réalisation desdites actions ou opérations d'aménagement. / Toute décision de préemption doit mentionner l'objet pour lequel ce droit est exercé (...). Lorsque la commune a délibéré pour définir le cadre des actions qu'elle entend mettre en oeuvre pour mener à
bien un programme local de l'habitat, la décision de préemption peut, sauf lorsqu'il s'agit d'un bien mentionné à l'article L. 211-4, se référer aux dispositions de cette délibération (...) ; qu'il résulte de ces dispositions, d'une part, que les communes ne peuvent décider d'exercer leur droit de préemption urbain que si elles justifient de l'existence, à la date à laquelle elles exercent ce droit, d'un projet d'action ou d'opération d'aménagement suffisamment précis et certain et, d'autre part, qu'elles doivent définir ce projet de manière précise dans la décision de préemption ;
Considérant que si l'arrêté en date du 11 juillet 2001 par lequel le maire de Sangatte a décidé d'exercer le droit de préemption sur un terrain situé au ... à Blériot-Plage et dont la SARL Investim s'était portée acquéreur, mentionne que la commune a un projet de réalisation d'habitat locatif à destination notamment des personnes âgées , il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune justifiait, à la date de la décision attaquée, de l'existence d'un projet suffisamment précis et certain de réalisation d'un programme d'habitat social ; que cette insuffisance n'a pu être couverte rétroactivement par l'adoption le 30 octobre 2001 d'une délibération par laquelle le conseil municipal de la commune de Sangatte a entendu préciser la consistance du programme de construction de logements sociaux qu'elle entendait réaliser sur le terrain préempté pour satisfaire aux exigences de la loi précitée du 13 décembre 2000 ; que, si cette délibération postérieure à la décision attaquée fait état d'un projet de réalisation de quarante-deux logements sociaux sur le terrain en cause, ce projet nouveau apparaît en tout état de cause distinct de celui d'une vingtaine de logements qui avait fait l'objet d'une simple réflexion à la fin de l'année 2000 ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué qui ne peut être regardé comme se référant à un programme d'habitat local suffisamment précis et certain à la date du 11 juillet 2001, ne répondait pas aux exigences de l'article L. 210-1 précité du code de l'urbanisme ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE SANGATTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté du maire en date du 11 juillet 2001 ;
Sur les conclusions d'appel incident de la SARL Investim :
Considérant que la circonstance que le Tribunal administratif de Lille a statué par un seul jugement sur les conclusions de la SARL Investim dirigées tant contre l'arrêté de préemption du
11 juillet 2001 que contre une délibération du 30 novembre 2001 par laquelle la COMMUNE DE SANGATTE a décidé de vendre le terrain préempté à la SA D'HLM le cottage social de Flandres , n'est pas de nature à rendre ledit jugement irrégulier et ce alors même que la jonction rapide des affaires n'aurait pas permis à la SARL Investim de présenter une demande de suspension de l'exécution de la délibération litigieuse ; que, par suite, la SARL Investim n'est, en tout état de cause, pas fondée à demander, par la voie de l'appel incident, l'annulation de la partie du jugement en date du 18 septembre 2003 qui a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la délibération de la COMMUNE DE SANGATTE en date du 30 novembre 2001 ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
En ce qui concerne l'appel principal :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Investim qui n'est pas, dans l'instance d'appel principal, partie perdante, la somme que la COMMUNE DE SANGATTE demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il sera mis à la charge de la COMMUNE DE SANGATTE la somme de 2 000 euros sur les 4 000 euros que la SARL Investim réclame au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
En ce qui concerne l'appel incident :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE SANGATTE qui n'est pas, dans l'instance d'appel incident, partie perdante, la somme que la SARL Investim demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SARL Investim la somme que la COMMUNE DE SANGATTE demande au titre des frais engagés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par la COMMUNE DE SANGATTE et les conclusions d'appel incident de la SARL Investim sont rejetées.
Article 2 : La COMMUNE DE SANGATTE versera à la SARL Investim la somme de
2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SANGATTE, à la SARL Investim et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.
Délibéré à l'issue de l'audience publique du 23 septembre 2004 à laquelle siégeaient :
- M. Merloz, président de chambre,
- M. Dupouy, président-assesseur,
- M. Yeznikian, président-assesseur,
Lu en audience publique, le 7 octobre 2004.
Le rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le président
Signé : G. MERLOZ
Le greffier,
Signé : B. Z...
La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
B. Z...
N°03DA01148 2