Vu la requête, reçue par fax et enregistrée le 23 septembre 2002 et son orignal en date du 26 septembre 2002, présentée pour Mme Martine X demeurant ..., par Me Chabert ; Mme X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 24 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande de condamnation du département de la Seine-Maritime à lui verser une somme de 63 200 francs à titre de dommages et intérêts à la suite de la décision de retrait de son agrément d'assistante maternelle en date du 16 septembre 1999 ;
2°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser une somme de 6 585,80 euros en compensation de la rémunération qu'elle n'a pu percevoir du fait de la suspension de son agrément du 12 juillet 1999 au 14 mars 2000 ;
3°) de condamner le département de la Seine-Maritime à lui verser la somme de 2 286,74 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que c'est à tort que Tribunal administratif lui a opposé un précédent désistement alors que la condition à laquelle il était subordonné n'avait pas été satisfaite ; que les motifs de sa suspension ne lui ont jamais été communiqués ; que les suspicions concernant son mari n'étaient pas fondées ; que son préjudice équivaut au montant des sommes qu'elle n'a pu percevoir du fait de la suspension de son agrément, soit la somme de 6 585,80 euros ; qu'elle s'analyse comme des dommages et intérêts ; que son préjudice moral peut être évalué à la somme de 3 048,98 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2003, présenté par le département de la Seine-Maritime qui demande à la cour : 1°) de rejeter la requête de Mme X et de confirmer le jugement attaqué ; 2°) de condamner Mme X à lui verser la somme de 150 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; le département de la Seine-Maritime soutient que la requête d'appel de Mme X est tardive et, par suite, irrecevable ; que le désistement de sa précédente demande indemnitaire dont il a lui a été donné acte par une ordonnance devenue définitive rendait irrecevable une demande analogue ; que, par suite le caractère conditionnel de son précédent désistement ne peut être utilement invoqué ; que, subsidiairement, ses demandes de dommages et intérêts ne sont pas fondées ; que le département n'étant pas l'employeur de Mme X, assistante maternelle à titre non permanent, il n'avait pas à lui verser de salaires ; qu'elle n'apporte pas la preuve de la faute du département ; que les décisions de suspension puis de retrait étaient justifiées par les circonstances particulières provoquées par une plainte de nature pénale et l'absence de garanties suffisantes offertes par la famille d'accueil ; que le département ne pouvait communiquer un document d'ordre judiciaire précisant les motifs de la plainte ou du signalement ; que le département a tenu compte de l'intérêt supérieur de la protection de l'enfant tant que l'enquête n'avait pas abouti et a fait une stricte application des dispositions applicables à la suspension et au retrait, lesquelles ne prévoient aucune procédure d'indemnisation ; que Mme X ne justifie pas avoir subi un préjudice moral ;
Vu le mémoire en réponse, reçu par fax et enregistré le 28 mai 2003 et son original du 2 juin suivant, présenté pour Mme X qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et, en outre, par les moyens que sa requête n'était pas tardive ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 juillet 2003, présenté par le département de la Seine-Maritime qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'action sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2004, à laquelle siégeaient M. Merloz, président, M. Dupouy et M. Yeznikian, président-assesseurs :
- le rapport de M. Yeznikian, rapporteur ;
- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête d'appel :
Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice financier :
Considérant que, par une ordonnance en date du 6 novembre 2000, le Tribunal administratif de Rouen a donné acte du désistement des conclusions présentées le 21 décembre 1999 par Mme X tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 16 septembre 1999 par laquelle le président du conseil général de la Seine-Maritime a prononcé le retrait de son agrément d'assistante maternelle et tendant, d'autre part, à la condamnation du département de la Seine-Maritime à l'indemniser de la perte de revenus subie depuis la suspension de son agrément, le 12 juillet 1999 du fait de l'illégalité des mesures de suspension et de retrait ; que cette ordonnance est devenue définitive ; que si Mme X avait renouvelé devant le Tribunal administratif de Rouen ses conclusions dirigées contre le département de la Seine-Maritime tendant à la réparation du préjudice financier qu'elle prétend avoir subi du fait d'une prétendue illégalité des mesures de suspension et de retrait de son agrément, ces conclusions identiques à celles dont elle s'était désistée, sont devenues sans objet après que l'ordonnance de désistement est devenue définitive ; qu'ainsi, Mme X, faute d'avoir contesté en appel l'ordonnance précitée, ne peut utilement, dans la présente instance, se prévaloir de ce que la condition à laquelle elle aurait subordonné son désistement n'avait pas été préalablement vérifiée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté comme dépourvues d'objet ses conclusions tendant à la réparation de son préjudice financier allégué ;
Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice moral :
Considérant que, pour obtenir la réparation du préjudice moral qu'elle prétend avoir subi du fait de l'illégalité des mesures de suspension puis de retrait de son agrément comme assistante maternelle, Mme X se prévaut de l'ignorance dans laquelle elle aurait été tenue des motifs de ces mesures ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment d'un courrier du conseil de Mme X, en date du 21 juillet 1999, qu'elle était informée de manière suffisamment précise et exacte des motifs sérieux et graves qui avaient justifié, sur le fondement des l'article 123-1 et 123-1-1 du code de la famille et de l'aide sociale alors applicable, tout d'abord une mesure de suspension de trois mois de l'agrément intervenue le 12 juillet 1999 puis la décision de retrait de cet agrément prise le 16 septembre 1999 ; que cette dernière mesure a été prononcée par le président du conseil général de la Seine-Maritime après avis de la commission consultative paritaire départementale devant laquelle Mme X a été convoquée et a pu se défendre lors de la séance du 7 septembre 1999 ; qu'au demeurant, il a été mis fin à ce retrait, pris dans l'attente des résultats de l'enquête judiciaire, dès le 14 mars 2000 après que le procureur de la République a décidé, le 20 février 2000, de classer sans suite la plainte pour mineur en danger à l'origine des mesures administratives critiquées ; que, dès lors, la circonstance que le département de la Seine-Maritime n'ait jamais communiqué à Mme X les faits précis qui étaient à l'origine du signalement administratif et de la plainte adressés au procureur de la République concernant son mari, n'est pas de nature à entacher les deux décisions précitées d'illégalité ;
Considérant que si Mme X entend, enfin, se prévaloir des stipulations de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, cet article n'est pas, en tout état de cause, applicable à la procédure administrative ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions tendant à la réparation de son préjudice moral allégué ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, en tout cas de cause et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme X la somme que le département de la Seine-Maritime réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Maritime, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que Mme X demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du département de la Seine-Maritime présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Martine X, au département de la Seine-Maritime, et au ministre de la famille et de l'enfance.
Copie sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience du 21 octobre 2004, à laquelle siégeaient :
- M. Merloz, président de chambre,
- M. Dupouy, président-assesseur,
- M. Yeznikian, président-assesseur,
Lu en audience publique, le 4 novembre 2004.
Le rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le président de chambre,
Signé : G. MERLOZ
Le greffier,
Signé : B. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de la famille et de l'enfance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
B. ROBERT
2
N°02DA00855