Vu, I°, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 9 août 2004 sous le n° 04DA00691, présenté par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER ; le ministre demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0102995 du 1er juillet 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lille, à la demande de l'association Les riverains de l'A27 , a annulé la décision implicite par laquelle il a rejeté la demande de ladite association tendant à la mise en oeuvre pour l'autoroute A27 des mesures prescrites par l'article 1er du décret n° 95-22 du 9 janvier 1995 et lui a enjoint de prendre ces mesures dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par l'association Les riverains de l'A27 devant le Tribunal administratif de Lille ;
3°) de mettre les frais d'expertise à la charge de l'association Les riverains de l'A27 ;
4°) de condamner l'association Les riverains de l'A27 à lui verser une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que l'implantation sur l'autoroute A27 d'une signalisation à caractère purement incitatif afin de détourner le trafic de la traversée de l'agglomération lilloise ne saurait être regardée comme des travaux apportant une modification ou une transformation significative de l'infrastructure existante au sens de l'article 2 du décret du 9 janvier 1995 ; qu'ainsi, les mesures prévues par ce décret ne trouvent pas à s'appliquer en l'espèce ; que le rapport d'expertise déposé par M. X, ne respectant pas les dispositions de l'article R. 621-7 du code de justice administrative, est irrégulier ; que le rapport est entaché de graves erreurs et contradictions qui invalident les conclusions auxquelles aboutit l'expert ; que le tribunal administratif ne pouvait se fonder sur ce rapport pour faire droit aux demandes de l'association Les riverains de l'A27 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense et le mémoire en défense complémentaire, enregistrés les 25 octobre et 12 novembre 2004, présentés pour l'association Les riverains de l'A27 par la SCP Huglo Lepage et associés ; l'association Les riverains de l'A27 conclut au rejet du recours et demande en outre à la Cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les travaux de signalisation réalisés ont bien porté sur l'infrastructure existante et ont entraîné une modification significative de cette infrastructure ; qu'en outre, ils ne sont pas au nombre des travaux exclus mentionnés à l'article 3 du décret du 9 janvier 1995 ; que la contribution sonore de l'aménagement réalisé est supérieure de 2,3 dB (A) en période de jour et de 2,6 dB (A) en période nuit à la contribution sonore à terme de l'infrastructure avant cette modification ; qu'ainsi, les conditions d'application du décret du 9 janvier 1995 sont remplies en l'espèce ; que, contrairement à ce que soutient le ministre appelant, l'expertise est parfaitement régulière ; que l'erreur matérielle commise par l'expert n'a eu aucune conséquence sur le sens de ses conclusions ; qu'aucune erreur de méthode n'entache le rapport d'expertise ;
Vu le mémoire en réplique, reçu par fax le 21 avril 2005 et son original enregistré le 25 avril 2005, présenté par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER ; le ministre conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, reçu par le 26 avril 2005 et son original enregistré le 27 avril 2005, présenté pour l'association Les riverains de l'A27 qui persiste dans ses précédentes conclusions ;
Vu, II°, le recours, enregistré le 9 août 2004 sous le n° 04DA00692, présenté par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER ; le ministre demande à la Cour de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement susvisé du 1er juillet 2004 ; il soutient que les moyens qu'il invoque sont sérieux et de nature à justifier l'annulation de ce jugement ; que, compte tenu de l'importance des sommes qu'implique la mise en oeuvre les mesures prescrites par le décret du 9 janvier 1995, l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;
Vu le jugement du 1er juillet 2004 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 octobre 2004, présenté pour l'association Les riverains de l'A27 par la SCP Huglo Lepage et associés ; l'association Les riverains de l'A27 conclut au rejet de la demande de sursis à exécution et demande en outre à la cour de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que les dispositions du décret du 9 janvier 1995 trouvant à s'appliquer en l'espèce et des solutions de protection phonique efficaces pouvant être mises en oeuvre à des coûts peu élevés et avec l'aide éventuelle de la communauté urbaine de Lille et des autorités européennes, une décision de sursis à exécution du jugement du 1er juillet 2004 serait incomprise des riverains et leur paraîtrait injuste ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le décret n° 95-22 du 9 janvier 1995 relatif à la limitation du bruit des aménagements et infrastructures de transports terrestres ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 2005 à laquelle siégeaient M. Merloz, président de chambre, M. Dupouy, président-assesseur et M. Stéphan, premier conseiller :
- le rapport de M. Dupouy, président-assesseur ;
- les observations de Mme Y, présidente de l'association Les riverains de l'A27 ;
- et les conclusions de M. Lepers, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le recours et la demande de sursis à exécution présentés par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur le recours n° 04DA00691 :
En ce qui concerne les conclusions principales :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret du 9 janvier 1995, pris pour l'application de la loi du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit : La conception, l'étude et la réalisation d'une infrastructure de transports terrestres nouvelle et la modification ou la transformation significative d'une infrastructure de transports terrestres existante sont accompagnées de mesures destinées à éviter que le fonctionnement de l'infrastructure ne crée des nuisances sonores excessives ; qu'en vertu de l'article 2 du même décret, est considérée comme significative la modification ou la transformation d'une infrastructure de transport existante ayant pour effet d'augmenter la gêne diurne ou nocturne due au bruit de plus de 2 dB (A) ;
Considérant qu' au début de l'année 1999, a été mise en place sur l'autoroute A27 une signalisation destinée à détourner une partie du trafic traversant l'agglomération lilloise en incitant les usagers à la contourner par un itinéraire de substitution empruntant notamment l'autoroute A27 ; qu'à la suite de ces travaux, l'association Les riverains de l'A27 a demandé au ministre de l'équipement, des transports et du logement de mettre en oeuvre les mesures de limitation du bruit prévues par l'article 1er du décret n° 95-22 du 9 janvier 1995 ; que cette demande a été implicitement rejetée ; que, par jugement avant dire droit en date du 3 avril 2003, le Tribunal administratif de Lille, estimant que les travaux en cause constituaient la modification d'une infrastructure existante, a ordonné une expertise afin de déterminer si la contribution sonore devant résulter à terme de la signalisation mise en place était susceptible d'augmenter de plus de 2 dB (A) la gêne subie par les riverains ; que, par jugement en date du 1er juillet 2004 rendu après expertise, le tribunal administratif a annulé la décision implicite opposée à l'association Les riverains de l'A27 et a enjoint au MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER de prendre, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, les mesures prescrites par le décret n° 95-22 du 9 janvier 1995 ;
Considérant, toutefois, que, par un arrêt du 29 juillet 2004, la Cour administrative d'appel de Douai, jugeant que les travaux de signalisation réalisés ne constituaient pas une modification ou transformation significative d'une infrastructure existante au sens du décret du 9 janvier 1995 et ne nécessitaient pas, dès lors, la mise en oeuvre des mesures prévues par ce décret, a annulé le jugement avant dire droit du 3 avril 2003 ; qu'il suit de là que le ministre requérant est fondé à demander l'annulation du jugement du 1er juillet 2004 lui enjoignant de prendre ces mesures et le rejet de la demande présentée par l'association Les riverains de l'A27 devant le Tribunal administratif de Lille ;
En ce qui concerne les frais d'expertise exposés en première instance :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de mettre ces frais, taxés à la somme de 5 629,19 euros toutes taxes comprises, à la charge de l'association Les riverains de l'A27 ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'association Les riverains de l'A27 à verser à l'Etat la somme de 8 000 euros qu'il demande au titre des frais exposés en première instance et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans l'instance n° 04DA00691, la partie perdante, soit condamné à payer à l'association Les riverains de l'A27 la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur le recours n° 04DA00692 :
Considérant, d'une part, que, le présent arrêt annulant le jugement du 1er juillet 2004 du Tribunal administratif de Lille, la demande du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement est devenue sans objet ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu de rejeter les conclusions de l'association Les riverains de l'A27 tendant à l'application, dans l'instance n° 04DA00692, des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0102995 du Tribunal administratif de Lille en date du 1er juillet 2004 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l'association Les riverains de l'A27 devant le Tribunal administratif de Lille est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 1er juillet 2004.
Article 4 : Les frais d'expertise exposés en première instance sont mis à la charge de l'association Les riverains de l'A27 .
Article 5 : Les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER et l'association Les riverains de l'A27 sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, DU TOURISME ET DE LA MER et à l'association Les riverains de l'A27 .
Copie sera transmise pour information au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience du 28 avril 2005, à laquelle siégeaient :
- M. Merloz, président de chambre,
- M. Dupouy, président-assesseur,
- M. Stéphan, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 12 mai 2005.
Le rapporteur,
Signé : A. DUPOUY
Le président de chambre,
Signé : G. MERLOZ
Le greffier,
Signé : B. ROBERT
La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
B. ROBERT
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Nos04DA00691, 04DA00692