Vu la requête, enregistrée le 7 mars 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société EURINPRO, dont le siège est situé Generaal De Wittalan 9/18 à 2800- Mechelen (Belgique), représentée en France par la société anonyme Verelst France, dont le siège est ... à Bois Grenier (59280) prise en la personne de son président-directeur général en exercice, par Me X... ; la société EURINPRO demande à la Cour :
1) d'annuler le jugement n° 99-4233 du Tribunal administratif de Lille en date du 30 décembre 2002 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie au titre du mois de décembre 1996 ;
2) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;
La société EURINPRO soutient qu'à défaut de mise en évidence d'une situation abusive ou frauduleuse, l'administration n'était pas fondée à lui retirer rétroactivement la qualité d'assujetti pour remettre en cause le crédit de taxe sur le chiffre d'affaires remboursé ; qu'elle est fondée à demander en application des dispositions des articles 271-V-d du code général des impôts et 242 OM et suivants de l'annexe II audit code, le remboursement de crédits de taxe sur le chiffre d'affaires bénéficiant aux entreprises étrangères ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête ; il soutient qu'au cas particulier, l'examen des déclarations de chiffre d'affaires souscrites par la requérante ne fait apparaître depuis sa création aucune recette taxable ; que dans les faits, la société n'a jamais été en mesure de démontrer son intention de réaliser des opérations imposables ; que la société ne peut se prévaloir de l'application à sa situation de la solution consacrée par la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes, dès lors qu'elle ne peut se prévaloir d'une situation identique à celle de la partie en cause devant cette juridiction ; que la société requérante n'apporte pas la preuve qu'une quelconque dépense d'investissement ou de prestation aurait été concrètement engagée en vue de la réalisation d'un projet économique précis qui n'aurait pu, par la suite, prospérer pour des raisons extérieures à l'entreprise ; qu'elle n'est pas davantage fondée à demander, en application des dispositions des articles 271-V-d du code général des impôts et 242 OM et suivants de son annexe II, le remboursement de crédits de taxe sur le chiffre d'affaires bénéficiant aux entreprises étrangères, dès lors qu'une telle procédure est réservée aux entreprises étrangères qui n'ont pas d'établissement stable en France et qui, n'y réalisant pas de livraison de biens ou de prestations de service entrant dans le champ territorial de la taxe sur la valeur ajoutée, n'ont pas désigné de représentant fiscal, alors que la requérante a, conformément aux dispositions de l'article 289 A-I du code général des impôts, désigné un représentant fiscal en France aux fins d'accomplissement des obligations déclaratives et qu'elle ne peut en conséquence que recevoir un traitement fiscal identique aux autres sociétés résidant en France et y étant imposables ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er avril 2005, présenté pour la société EURINPRO ; la société EURINPRO conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens et en outre par le moyen que l'administration ne précise nullement les dispositions lui permettant d'affirmer que la seule désignation d'un représentant fiscal sur le territoire français fait obstacle au bénéfice de la procédure spéciale de remboursement de crédits de taxe sur le chiffre d'affaires réservée aux assujettis étrangers ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie conclut au rejet de la requête par les mêmes motifs que ceux exposés précédemment ;
Vu l'ordonnance en date du 14 avril 2005 par laquelle le président de la Cour fixe la clôture de l'instruction le 1er juin 2005 à 16 heures 30 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 juin 2005 à laquelle siégeaient M. Gipoulon, président de chambre, Mme Signerin-Icre, président-assesseur et M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller :
- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Paganel, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société EURINPRO qui a été créée en octobre 1996 exerce l'activité de marchand de biens et de promotion immobilière ; que cette entreprise dont le siège social est situé en Belgique a désigné, conformément aux dispositions de l'article 289 A-I du code général des impôts, un représentant fiscal en France afin que celui-ci accomplisse les obligations déclaratives et acquitte en son nom la taxe sur la valeur ajoutée sur des opérations imposables en France pour son compte ; que l'administration a demandé le reversement du remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée obtenus au titre du mois de décembre 1996 par la société EURINPRO au motif que cette dernière n'avait réalisé aucune opération taxable depuis sa création ; que la société EURINPRO fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille en date du 30 décembre 2002 qui a rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle elle a été assujettie au titre du mois de décembre 1996 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur le chiffre d'affaires les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ; qu'aux termes de l'article 256 A du même code : Sont assujetties à la taxe sur le chiffre d'affaires les personnes qui effectuent, de manière indépendante, à titre habituel ou occasionnel, une ou plusieurs opérations soumises à la taxe sur le chiffre d'affaires, quel que soit le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard d'autres impôts ou la nature de leur intervention ; que ces dispositions ont été prises pour l'adaptation de la législation nationale aux articles 2 et 4, paragraphes 1 et 2 de la sixième directive n° 77/388 du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, en vertu desquels est notamment considéré comme assujetti quiconque accomplit des activités économiques de producteur, de commerçant ou de prestataire de services ou se livre à des opérations comportant l'exploitation d'un bien corporel ou incorporel en vue d'en retirer des recettes ayant un caractère de permanence ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 271 du code général des impôts : I. 1. La taxe sur le chiffre d'affaires qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur le chiffre d'affaires applicable à cette opération... IV. La taxe déductible dont l'imputation n'a pu être opérée peut faire l'objet d'un remboursement... V. Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur le chiffre d'affaires : d) les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France (...) ; qu'aux termes de l'article 242 OM de l'annexe II au même code : Les assujettis établis à l'étranger peuvent obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qui leur a été régulièrement facturée si, au cours du trimestre civil ou de l'année civile auquel se rapporte la demande de remboursement, ils n'ont pas eu en France le siège de leur activité ou un établissement stable ou à défaut, leur domicile ou leur résidence habituelle et n'y ont pas réalisé, durant la même période, d'opérations entrant dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée au sens des articles 256 à 259 C du code général des impôts ; qu'enfin, aux termes de l'article 289 A dudit code : 1. Lorsqu'une personne établie hors de France est redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou doit accomplir des obligations déclaratives, elle est tenue de faire accréditer auprès du service des impôts un représentant assujetti établi en France qui s'engage à remplir les formalités incombant à cette personne et, en cas d'opérations imposables, à acquitter la taxe à sa place. A défaut, la taxe sur la valeur ajoutée et, le cas échéant, les pénalités qui s'y rapportent, sont dues par le destinataire de l'opération taxable... ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que la société EURINPRO, dont les déclarations de chiffre d'affaires souscrites entre le mois d'octobre 1996 et le mois de juin 1999 ne font apparaître aucune recette taxable, doit être regardée comme n'ayant engagé aucune dépense d'investissement ou de prestation en vue de la réalisation d'un projet économique ; que, dès lors, sans qu'il fût nécessaire pour elle de mettre en évidence une situation abusive ou frauduleuse, l'administration était fondée à lui retirer rétroactivement la qualité d'assujetti pour remettre en cause le crédit de taxe sur le chiffre d'affaires qui lui avait été remboursé au titre du mois de décembre 1996 ;
Considérant, en second lieu, que, dans ses dernières écritures, la société EURINPRO soutient pour démontrer que c'est à tort que l'administration fiscale lui a refusé, en qualité d'entreprise étrangère, le remboursement de taxe sur le chiffre d'affaires ayant grevé des biens meubles et de services acquis en France, qu'aucune disposition de la législation fiscale ne permet d'affirmer que la seule désignation d'un représentant fiscal ferait obstacle au bénéfice de la procédure spéciale de remboursement de crédit de taxe sur le chiffre d'affaires réservée aux assujettis étrangers ; que, toutefois, elle n'assortit pas ce moyen des éléments de nature à lui permettre de revendiquer le bénéfice des dispositions susvisées de l'article 271-V-d du code général des impôts et de l'article 242 OM et suivants de l'annexe II audit code auxquelles l'administration entend se référer, en démontrant, comme il lui incombe de le faire, que, bien qu'ayant désigné, conformément aux dispositions de l'article 289 A-I du code précité, un représentant fiscal en France afin d'accomplir les obligations déclaratives et d'acquitter pour son compte la taxe sur le chiffre d'affaires sur les opérations imposables en France et s'étant, par suite placée sous le régime des assujettis établis en France, elle n'a disposé sur ce territoire ni d'établissement stable, ni de domicile, ni de résidence habituelle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société EURINPRO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société EURINPRO est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société EURINPRO et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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N°0300239