Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la société civile immobilière AZUR (SCI AZUR), dont le siège est situé
28/36 rue des arts à Lille (59000), par la SCP Mériaux, De Foucher, Guey, Chretien ; la SCI AZUR demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0202052 en date du 17 février 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes pour la période du 1er janvier 1994 au
31 décembre 1996, qui lui ont été réclamés par avis de mise en recouvrement du 13 avril 2000 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
Elle soutient qu'exerçant l'activité de marchand de biens, elle pouvait immédiatement déduire la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions de l'article 271 du code général des impôts ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête ;
Il soutient que les travaux de construction et de restauration effectués par la SCI AZUR ont été utilisés à des fins étrangères à l'entreprise dans une proportion supérieure à 90 %, et ce, en violation des dispositions de l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts ; que la
SCI AZUR n'exerçait pas une activité de marchand de biens mais se livrait seulement à des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, la déduction ne pouvant, dès lors, intervenir qu'à la livraison ;
Vu l'ordonnance en date du 30 mars 2006 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai a fixé la clôture de l'instruction au 5 mai 2006 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 octobre 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, M. Patrick Minne et M. Manuel Delamarre, premiers conseillers :
- le rapport de M. Manuel Delamarre, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société civile immobilière AZUR (SCI AZUR) a acheté au mois de
juin 1991 un immeuble à usage d'habitation situé à Grimaud (Var) ; qu'elle a revendu ce bien au mois d'avril 1998, après y avoir effectué des travaux de construction et de restauration ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité relative aux années 1994 à 1996, l'administration fiscale a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant lesdits travaux, en estimant, d'une part, que ces travaux avaient été utilisés à des fins étrangères à l'entreprise dans une proportion supérieure à 90 %, contrairement aux exigences posées par l'article 230 de l'annexe II au code général des impôts et, d'autre part, que la SCI AZUR n'effectuant qu'occasionnellement des opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, elle ne pouvait déduire cette taxe qu'en 1998, année de la livraison de l'immeuble litigieux, conformément aux dispositions du 2 du I de l'article 271 du code général des impôts ; que la SCI AZUR demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 17 février 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes pour la période du
1er janvier 1994 au 31 décembre 1996 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : « I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. Toutefois, les personnes qui effectuent des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée n'exercent le droit à déduction qu'au moment de la livraison (…) » ; qu'aux termes de l'article 239 ter du même code : « I. Les dispositions du 2 de l'article 206 ne sont pas applicables aux sociétés civiles créées après l'entrée en vigueur de la loi n° 64-1278 du 23 décembre 1964 et qui ont pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, à la condition que ces sociétés ne soient pas constituées sous la forme de sociétés par actions ou à responsabilité limitée et que leurs statuts prévoient la responsabilité indéfinie des associés en ce qui concerne le passif social.- Les sociétés civiles visées au premier alinéa sont soumises au même régime que les sociétés en nom collectif effectuant les mêmes opérations ; leurs associés sont imposés dans les mêmes conditions que les membres de ces dernières sociétés. II. Les dispositions du I sont également applicables : 1° Aux sociétés civiles ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente (…) » ;
Considérant que la SCI AZUR fait valoir qu'elle exerçait une activité de marchand de biens, achetant habituellement des immeubles en vue de leur revente, et qu'elle pouvait donc déduire la taxe sur la valeur ajoutée à tout moment de son activité, et non pas seulement au moment de la livraison des biens comme le soutient l'administration en se référant aux règles posées par l'article 271 du code général des impôts ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs nullement contesté, qu'au cours de son existence, la SCI AZUR n'a acquis et revendu que l'immeuble litigieux ; qu'elle a elle-même, en 1991, modifié ses statuts pour étendre son objet social de marchand de biens à celui de société civile ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de la vente, au sens de l'article 239 ter du code général des impôts ; qu'au cours des années qui ont suivi, la société requérante n'a jamais été imposée à l'impôt sur les sociétés, ce qui aurait dû être le cas si elle avait effectivement exercé une activité de marchand de biens ; qu'au contraire, ses associés ont été imposés personnellement à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, conformément aux dispositions de l'article 239 ter du code général des impôts ; qu'ainsi le renvoi à ce texte de loi, inséré dans les statuts, ne constituait pas, comme le soutient la requérante, une erreur ; que l'activité effective de la SCI AZUR, consistant à réaliser des travaux de construction et d'aménagement sur le bien litigieux avant de le revendre, entrait dans le champ d'application de l'article 239 ter, nonobstant le fait que les travaux dont s'agit n'aient pas abouti à la construction d'un immeuble entièrement neuf, et peu important que la société ait eu, en 1991, l'intention de revendre ledit bien ; que, dans ces conditions, l'activité de la SCI AZUR doit être regardée comme une activité de construction-vente, sans que puisse y faire obstacle le seul fait que la société requérante ait indiqué, dans ses statuts, exercer une activité de marchand de biens ; que c'est, dès lors, à bon droit que l'administration, après avoir constaté que la société n'avait réalisé à ce titre que la seule opération relative à l'immeuble acquis à Grimaud, a pu estimer que la taxe sur la valeur ajoutée grevant les éléments du prix de cette opération occasionnelle ne pouvait être déduite qu'en 1998, année de la livraison de l'immeuble ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI AZUR n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société civile immobilière AZUR est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière AZUR et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie sera transmise au directeur du contrôle fiscal Nord.
N°05DA00425 2