Vu la requête, enregistrée le 15 mai 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Rachid X, demeurant ..., par
Me Banoukepa ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0507019 du 7 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 septembre 2005 du préfet du Nord lui refusant le renouvellement de son titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire français ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;
3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » ;
Il soutient :
- que la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;
- que cette même décision est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne fait pas mention des circonstances particulières caractérisant la situation sociale, professionnelle et familiale de l'exposant ;
- que ladite décision est intervenue sur une procédure irrégulière, le préfet ayant omis de saisir la commission du titre de séjour de son cas ;
- qu'au fond, alors que son mariage n'était pas dissous, il remplissait les conditions lui permettant de prétendre au renouvellement de son titre de séjour, les seules circonstances qu'il a dû résider en région parisienne pour raisons professionnelles, qu'il a été hospitalisé puis a quitté temporairement le domicile conjugal en raison de dissensions apparues dans son couple pour des motifs imputables à son épouse, étant insuffisantes pour permettre au préfet de lui opposer l'absence de vie commune avec celle-ci ; qu'il établit d'ailleurs avoir contribué aux charges du ménage et avoir rejoint régulièrement son épouse à Lille jusqu'à la date de son hospitalisation ;
- que l'enquête de police visée par la décision attaquée était insuffisante pour permettre de lui opposer le caractère frauduleux de son mariage ;
- qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public et justifie de sa bonne intégration ;
- qu'eu égard à la durée et à la stabilité de la vie commune de l'exposant avec son épouse et aux liens sociaux et amicaux tissés en France, la décision attaquée porte au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- que, contrairement à ce qu'a estimé à tort le tribunal administratif, la décision attaquée est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur sa vie privée et familiale ;
- que la décision attaquée est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé, compte tenu des affections dont il est atteint ;
- qu'en tant qu'elle invite l'exposant à quitter le territoire français, la décision attaquée est également entachée d'illégalité, dès lors qu'il était en situation de prétendre à la délivrance de plein droit du titre sollicité ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu l'ordonnance en date du 6 juin 2006, par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai fixe la clôture de l'instruction au 16 octobre 2006 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2006, présenté par le préfet du Nord ; le préfet conclut au rejet de la requête ;
Le préfet soutient :
- que la décision attaquée a été prise par une autorité bénéficiant d'une délégation régulièrement publiée ;
- que, dès lors que M. X n'était pas en situation de bénéficier du renouvellement qu'il sollicitait, la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie de son cas préalablement à l'édiction de la décision attaquée ;
- que ladite décision est suffisamment motivée ;
- qu'au fond, il n'est pas contesté que la vie commune du requérant avec son épouse avait cessé à la date de la décision attaquée ; que l'intéressé n'était donc pas en droit de prétendre au renouvellement du titre de séjour qui lui avait été précédemment délivré en sa qualité de conjoint de ressortissante française ; que la circonstance que la vie commune aurait été rompue à l'initiative de l'épouse du requérant est sans incidence ;
- qu'il est établi par une enquête des services de police que M. X n'a contracté mariage que dans le seul but d'obtenir un titre de séjour ;
- que, séparé de son épouse et alors qu'il n'est pas isolé dans son pays d'origine,
M. X, malgré les liens sociaux et amicaux tissés en France, n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- que le requérant n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, dès lors, l'administration n'était pas tenue d'examiner les droits de l'intéressé à obtenir un titre de séjour sur ce fondement ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 18 août 2006, présenté pour M. X ; il conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les lettres du 24 octobre 2006 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office ;
Vu le mémoire présenté pour M. X, enregistré le 6 novembre 2006, soit après la clôture de l'instruction ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2006 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Patrick Minne, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par l'arrêté attaqué, en date du 27 septembre 2005, le préfet du Nord a, d'une part, refusé à M. Rachid X, ressortissant marocain, entré en France le 10 septembre 2003, le renouvellement du titre de séjour dont il était jusqu'alors titulaire en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française et, d'autre part, l'a invité à quitter le territoire français ; que l'invitation à quitter le territoire français contenue dans l'article 2 de l'arrêté attaqué, qui est la conséquence nécessaire de la décision de refus de séjour prononcée par l'article 1er de ce même arrêté, ne fait pas, par elle-même, grief ; que, dès lors,
M. X n'est pas recevable à en contester la légalité ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été pris par M. Y, secrétaire général adjoint de la préfecture du Nord, qui bénéficiait d'une délégation de signature qui lui avait été conférée par un arrêté du préfet du Nord en date du
1er mars 2005 régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture ;
Considérant, en troisième lieu, que la décision de refus de séjour attaquée qui énonce les circonstances de droit et de fait caractérisant la situation personnelle et familiale de M. X est suffisamment motivée alors même qu'elle ne mentionnerait pas l'ensemble des éléments du dossier ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : (…) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée en France ait été régulière, que la communauté de vie n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé la nationalité française (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : « (…) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé (…) » ;
Considérant que si M. X fait valoir que son mariage avec une ressortissante française n'était pas dissous à la date de la décision attaquée, il indique lui-même que son épouse a refusé de l'accueillir au domicile conjugal à sa sortie de l'hôpital le 22 janvier 2005 et qu'il a, depuis lors, été hébergé chez un tiers ; que s'il soutient que cette situation n'était que temporaire et résultait de dissensions intervenues dans le couple, il n'apporte aucun élément de nature à établir que la vie commune aurait repris à une date antérieure à celle à laquelle la décision attaquée a été prise ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que l'épouse du requérant a engagé une procédure de divorce en janvier 2005 ; que, par suite, quelle que soit la cause de cette rupture de la vie commune et alors que les circonstances antérieures à celle-ci s'avèrent sans incidence, le préfet du Nord pouvait légalement, pour ce seul motif, refuser à M. X le renouvellement de son titre de séjour ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être dit, M. X ne peut se prévaloir d'une vie familiale en France ; que, dans ces conditions, eu égard à la faible durée de son séjour en France nonobstant les liens amicaux et sociaux tissés par l'intéressé dans ce pays et alors que le requérant n'allègue pas être isolé dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans et où demeurent ses parents et ses frères et soeurs, la décision attaquée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles elle a été prise, ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, cette même décision n'est, en outre, pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur la vie privée et familiale du requérant ;
Considérant, en sixième lieu, que si les certificats médicaux produits par M. X établissent que l'intéressé est atteint d'asthme et de diabète, qu'il a été hospitalisé en janvier 2006 et suit un traitement médical depuis lors, ces circonstances ne sont pas suffisantes pour démontrer que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elle comporte sur l'état de santé de l'intéressé ;
Considérant, enfin, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que, contrairement à ce qu'il soutient, M. X n'était pas au nombre des étrangers, mentionnés à l'article L. 313-11 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pouvant obtenir le renouvellement de la carte de séjour temporaire prévue par ces dispositions ; que, par suite, le préfet n'était pas tenu, en application des dispositions de l'article L. 312-2 du même code, de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que, dès lors, ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Rachid X est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Rachid X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet du Nord.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2006 à laquelle siégeaient :
- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,
- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,
- M. Patrick Minne, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 novembre 2006.
Le rapporteur,
Signé : B. PHEMOLANT
Le président de chambre,
Signé : C. V. HELMHOLTZ
Le greffier,
Signé : M. T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le Greffier
M. T. LEVEQUE
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N°06DA00631