Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2005 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP), dont le siège est 114 avenue Emile Zola à Paris (75015), par
Me Levy ; la SMABTP demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement nos 0201078-0400062 en date du 31 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille, après avoir condamné l'Etat à lui verser la somme de 3 048,98 euros, ladite somme étant assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 novembre 2001, les intérêts échus au 6 janvier 2004 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date étant capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts, en remboursement d'un quart de la somme qu'elle avait dû verser suite à l'accident mortel dont a été victime M. X le 4 septembre 1991 sur un chantier de construction, et la somme de 750 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a rejeté le surplus de ses demandes tendant à la condamnation de l'Etat, en tant que responsable des conséquences dommageables dudit accident, à lui verser les sommes de
99 163,36 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de sa première demande et de la capitalisation desdits intérêts, 5 000 euros au titre des frais irrépétibles, 24 790,84 euros correspondant au quart des sommes versées à la famille de M. X en exécution du jugement du Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Arras en date du 8 mars 1999 assortie des intérêts au taux légal à compter de sa première demande adressée à l'Etat et de la capitalisation desdits intérêts ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 24 790,84 euros avec intérêts de droit et capitalisation des intérêts ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code justice administrative ;
Elle soutient que, devant la Cour, elle justifie avoir réglé, pour son assurée la société Y, la majoration de la rente servie aux consorts X à hauteur de 570 468,97 francs ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance en date du 8 août 2005 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai a fixé la clôture de l'instruction au 30 novembre 2005 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 février 2006, présenté par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête et de confirmer le jugement attaqué ; il soutient que la SMABTP ne peut être subrogée dans les droits de la société Y, dès lors que cette dernière ne dispose plus d'aucune action directe à l'encontre de l'Etat ; que la SMABTP a d'ores et déjà recouvert les sommes qui pouvaient être réclamées à l'Etat au titre de sa responsabilité dans l'accident survenu le 4 septembre 1991 ;
Vu l'ordonnance en date du 27 février 2006 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour administrative d'appel de Douai a rouvert l'instruction ;
Vu le mémoire en réponse, enregistré le 27 avril 2006, présenté pour la SMABTP, par lequel elle conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que le fait que la société Y ait été condamnée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à indemniser les consorts X en raison d'une faute inexcusable n'exonère nullement l'Etat de sa part de responsabilité, et qu'il doit donc indemniser les consorts X à hauteur du quart de la majoration de la rente servie aux héritiers de M. X à hauteur de 570 468,97 francs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le code des assurances ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :
- le rapport de M. Manuel Delamarre, premier conseiller ;
- les observations de Me Chriqui, pour la SMABTP ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le 4 septembre 1991, M. X a été victime d'un accident mortel alors qu'il participait à la réalisation de travaux prévus par un marché de travaux publics passé entre la société Y, son employeur, et la SNCF, le maître d'oeuvre étant l'Etat (direction départementale de l'équipement du Pas-de-Calais) ; qu'il résulte d'un jugement rendu le 25 mai 2000 par le Tribunal administratif de Lille que l'accident a été rendu possible à la fois par des fautes commises par la société Y et par l'Etat ; que, par ailleurs, le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Arras a, dans un jugement en date du 8 mars 1999, condamné la société Y à payer aux consorts X une somme totale de 80 000 francs au titre du préjudice moral subi et, après avoir qualifié les agissements de ladite société à l'origine de l'accident de faute inexcusable au sens des dispositions de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, mis à sa charge une rente complémentaire au bénéfice des consorts X ; que, par sa requête, la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP), assureur de la société Y, demande la réformation du jugement en date du 31 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a limité son indemnisation, au titre des sommes versées par elle en lieu et place de son assurée, à une somme de 3 048,98 euros, représentative du quart de la somme totale accordée aux consorts X au titre de leur préjudice moral ;
Sur la subrogation de la SMABTP dans les droits de la société Y :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : « L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur » ;
Considérant que, devant la Cour de céans, la SMABTP rapporte la preuve qu'elle a payé en lieu et place de son assurée, la société Y, la somme de 570 468,97 francs, correspondant à la majoration de la rente servie aux consorts X en réparation du décès de M. X à la suite de l'accident survenu le 4 septembre 1991, en versant aux débats, en plus des pièces déjà produites devant les premiers juges, un relevé bancaire en date du 2 mars 2000 établissant qu'elle a bien réglé la somme litigieuse ; qu'il suit de là que la SMABTP, en application des dispositions précitées de l'article L. 121-12 du code des assurances, est subrogée dans les droits et actions détenus par la société Y contre l'Etat ;
Sur l'indemnisation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale : « Lorsque l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction , la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire (…) » ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 452-2 du même code : « (...) La majoration est payée par la caisse, qui en récupère le montant par l'imposition d'une cotisation complémentaire dont le taux et la durée sont fixés par la caisse régionale d'assurance maladie sur la proposition de la caisse primaire, en accord avec l'employeur, sauf recours devant la juridiction de la sécurité sociale compétente » ; que, selon les dispositions de l'article L. 452-4 dudit code : « L'auteur de la faute inexcusable est responsable sur son patrimoine personnel des conséquences de celle-ci » ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le supplément de rente imposé par la juridiction compétente de sécurité sociale doit demeurer exclusivement à la charge de l'employeur dont la faute, qualifiée d'inexcusable par ladite juridiction, est à l'origine de l'accident mortel dont a été victime un travailleur salarié ; que, par suite, ladite rente complémentaire ne peut être répartie entre les coauteurs de cet accident ; qu'il suit de là que la société requérante, contrairement à ce qu'a jugé à tort le tribunal administratif, n'est pas fondée à demander que l'Etat soit condamné à lui rembourser une partie de la rente complémentaire mise à sa charge par le jugement rendu le
8 mars 1999 par le Tribunal des affaires de sécurité sociale d'Arras ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SMABTP n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a limité son indemnisation à la somme de 3 048,98 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SMABTP demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP) est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE MUTUELLE D'ASSURANCE DU BATIMENT ET DES TRAVAUX PUBLICS (SMABTP) et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.
N°05DA00939 2