Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Robert X, demeurant ..., par la SCP Meriaux, de Foucher, Guey, Chretien ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0300687 en date du 21 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits, intérêts et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du
1er octobre 1998 au 31 décembre 1999 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme qui sera communiquée à l'issue de l'instruction au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que l'avis de vérification ne lui a été adressé ni à son domicile ni au lieu du principal établissement de son entreprise de vente de cassettes audio et vidéo dénommée AVI ; que le Tribunal n'a pas tenu compte qu'au moment de l'expédition, les marchandises étaient stockées à Havay en Belgique et que, de ce fait, le lieu de livraison de ces biens meubles corporels est réputé se situer en Belgique ; que l'administration fiscale n'a établi à aucun moment que les achats de marchandises effectués par l'exposant étaient livrés en France ; que tous ces achats ont eu pour point de livraison l'établissement de Havay ; que la circonstance que l'exposant a eu recours pour l'activité de son entreprise à des prestataires de services français est sans influence sur le fait que le point de départ de l'expédition des marchandises était situé en Belgique ; que l'activité de l'entreprise n'était vivable que dans la mesure où elle était implantée hors de France lui permettant ainsi d'échapper à la redevance audio-visuelle et de la rendre compétitive ; que l'administration fiscale n'a pas contesté le fait que ses achats n'étaient pas soumis à la redevance sur l'audiovisuel ; que le fait qu'il a eu recours à diverses entreprises établies en France pour l'assister dans son activité n'est pas de nature à remettre en cause son statut d'entreprise belge ; que l'administration fiscale belge a toujours considéré l'entreprise AVI comme étant une entreprise belge et à ce titre l'a contrôlée en matière de taxe à la valeur ajoutée le 6 novembre 2000 ; que l'administration fiscale française a reconnu que l'entreprise était belge à compter du 1er octobre 2001 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 décembre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut au rejet de la requête ; il soutient que, compte tenu des documents fournis à l'administration, il ne saurait être reproché à l'administration d'avoir adressé les avis à l'adresse de M. X qui en a personnellement accusé réception ; qu'il appartient à l'entreprise AVI d'apporter la preuve que les bases d'imposition notifiées au titre des années 1998 et 1999 ne sont pas fondées ; que l'usage du droit de communication auprès d'entreprises françaises et les renseignements obtenus lors des opérations de vérification effectuées sur le territoire français ont permis à l'administration de réunir un faisceau d'éléments attestant de la réalisation d'opérations commerciales par l'entreprise AVI en France ; qu'il est avéré que le centre de décision, la direction, la gestion administrative et commerciale, le contrôle de l'entreprise individuelle AVI, la manutention et l'emballage des produits s'effectuaient de manière permanente depuis la France ; que l'administration a démontré que l'entreprise AVI effectuait des opérations commerciales en France à partir d'un établissement stable situé dans les locaux de la SARL Sambronic à Maubeuge ; que, dans les faits, la clientèle d'AVI est essentiellement constituée de comités d'entreprise situés sur l'ensemble du territoire français ; que l'administration a constaté que le compte ouvert par AVI à la banque Scalbert Dupont, ainsi que les chéquiers faisaient référence à l'adresse précitée ; que les opérations de contrôle ont permis d'établir que les marchandises étaient prélevées en France, soit dans les locaux de la société Sagatrans à Bettignies, soit dans les locaux de la société Sambronic à Maubeuge, par des transporteurs français pour être livrées à des clients français ; que le requérant ne produit aucune pièce attestant de la réalité d'une exploitation commerciale en Belgique et se limite à fournir la copie de l'inscription au registre du commerce en Belgique ; que la position adoptée par l'administration française à compter de 2001 s'est fondée sur de nouveaux éléments de fait, postérieurs aux années 1998 et 1999 et sans influence sur le présent litige ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2007 à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant,
président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de M. Christian Bauzerand, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en l'absence du dépôt de déclarations de chiffre d'affaires, par M. Robert X, exploitant individuel de l'entreprise Audio Vidéo International, dont le siège est situé à Havay (Belgique) et qui a pour activité la vente de cassettes audio et vidéo sur le territoire français, l'administration a procédé à la taxation d'office du chiffre d'affaires à la taxe sur la valeur ajoutée ; que le requérant demande l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Lille en date du 21 avril 2005 qui a rejeté sa demande de décharge des droits supplémentaires de taxes mises à sa charge au titre de la période du 1er octobre 1998 au 31 décembre 1999 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : « Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (…) » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les plis recommandés avec accusés de réception contenant les avis de vérification de comptabilité en date des 29 mars et
4 mai 2000 adressés à M. X, pris en sa qualité d'exploitant de l'entreprise individuelle Audio Vidéo International (AVI), ont été réceptionnés par lui les 1er avril et 12 mai 2000 ; que la circonstance que ces plis ont été adressés au siège de la société Sambronic et non au domicile du contribuable ou au lieu du principal établissement en France de la société AVI est, dès lors, sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ; que, par ailleurs, la circonstance que d'autres documents ultérieurs, notamment la notification de redressement du 26 octobre 2000, les mises en demeure préalables à la taxation d'office et l'avis de mise en recouvrement ont également été envoyés à l'adresse de la société Sambronic sont également sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que M. X ne soutient pas qu'il ne les aurait pas effectivement reçus ; qu'ainsi, le requérant a été informé préalablement par l'envoi de cet avis d'une vérification de comptabilité conformément aux dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant , en premier lieu, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. (…) » ; qu'aux termes de l'article 256 bis du même code : « I. 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises ; (…) 3° Est considérée comme acquisition intracommunautaire l'obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d'un bien meuble corporel expédié ou transporté en France par le vendeur, par l'acquéreur ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur à partir d'un autre Etat membre de la communauté européenne. (…) » ; qu'aux termes de l'article 258 de ce code : « I. Le lieu de livraison des biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : a. Au moment de l'expédition ou du transport par le vendeur, par l'acquéreur, ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur (…) » ; qu'aux termes de l'article 258 C : « I. Le lieu d'une acquisition intracommunautaire de biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque les biens se trouvent en France au moment de l'arrivée de l'expédition ou du transport à destination de l'acquéreur. (…) » ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les livraisons de biens meubles corporels réalisées en France par le requérant, en sa qualité d'exploitant de la société AVI, ou pour son compte par des transporteurs, auprès d'une clientèle constituée d'associations ou de comités d'entreprise, lesquels sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou sont des personnes morales non assujetties, constituent, en tout état de cause, soit des livraisons en France relevant des champs d'application de l'article 256 et du I de l'article 258 du code général des impôts, soit des acquisitions intracommunautaires relevant du champ d'application des articles 256 bis et 258 C du code général des impôts ; que, dans les deux cas, ces opérations sont imposables à la taxe sur la valeur ajoutée en France ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir, au motif que le siège de son entreprise est situé en Belgique, que les livraisons effectuées en France ne seraient pas soumises, dans cet Etat, à la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 283 du code général des impôts: « 1. La taxe sur la valeur ajoutée doit être acquittée par les personnes qui réalisent les opérations imposables, sous réserve des cas visés aux articles 274 à 277 A où le versement de la taxe peut être suspendu. (…) 2 bis. Pour les acquisitions intracommunautaires de biens imposables mentionnées à l'article 258 C, la taxe doit être acquittée par l'acquéreur. Toutefois, le vendeur est solidairement tenu avec ce dernier au paiement de la taxe, lorsque l'acquéreur est établi hors de France. (…) »;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des informations obtenues par l'administration, dans l'exercice de son droit de communication auprès des transporteurs, que le transport des biens par M. X, ou pour son compte par des transporteurs, à destination des acquéreurs situés en France est effectué depuis, d'une part, des locaux de la SARL Sambronic sis à Maubeuge en France, avec laquelle le requérant n'est pas dépourvu de tous liens et, d'autre part, des locaux de la société Sagatrans, sis à Bettignies en France ; que les transporteurs dont s'agit, à savoir les sociétés Exapaq et Mang Transports, ne procèdent à l'enlèvement des marchandises que depuis ces locaux de Maubeuge et de Bettignies et non depuis des locaux situés en Belgique ; qu'à l'occasion des opérations de contrôle, M. X a précisé le 10 avril 2000 que le transport des marchandises à destination des clients était assuré, non par les fournisseurs de la société AVI, ni par cette dernière, mais par les sociétés Exapaq et Mang Transports ; que les diverses factures produites en première instance par le requérant au soutien de ses conclusions ne suffisent pas à établir que les transporteurs procéderaient à l'enlèvement des marchandises ailleurs qu'en France, dès lors que, contrairement à ce qu'allègue M. X, ces factures ne mentionnent pas le ou les lieux d'enlèvement des marchandises, mais se bornent à faire état de l'adresse du siège de l'entreprise AVI ou du nom de la localité accueillant ce siège ; qu'en revanche, le contrat de transport en date du mois d'octobre 1999 produit par le requérant et conclu entre ce dernier et la société Exapaq fait état d'une adresse d'enlèvement située en France, à Bettignies, et non en Belgique ; qu'en réponse à la demande de l'administration, la société Mang Transports a précisé n'avoir jamais enlevé les marchandises en Belgique, mais à Bettignies entre le 30 août 1998 et le 31 janvier 1999, puis à Maubeuge jusqu'au début du mois de novembre 1999 ; qu'aucune des pièces du dossier n'est de nature à établir qu'au moment de l'expédition ou du transport des marchandises, par ces transporteurs et pour le compte du requérant, à destination des acquéreurs, les marchandises se trouvaient ailleurs qu'en France ; que, si le requérant soutient que les marchandises, après avoir été emballées en Belgique, étaient ensuite acheminées en France, à Bettignies, par l'entreprise Sagatrans, il résulte toutefois de l'instruction que, à supposer même ces faits établis, les cartons de marchandises dont la présence a été matériellement constatée à Bettignies le 13 juin 2000 sont entreposés par marques et non par clients ; que M. X a lui-même précisé que les transporteurs chargés du transport à destination des clients étaient seulement les sociétés Exapaq et Mang Transports ; qu'il suit de là que l'éventuel acheminement de marchandises par la société Sagatrans depuis Havay jusqu'à Bettignies n'est pas un élément du transport des marchandises, par le vendeur ou pour son compte, à destination de l'acquéreur, mais constitue une opération de transport antérieure, distincte du transport à destination de l'acquéreur ; qu'ainsi, il est établi qu'au moment de l'expédition ou du transport des marchandises, par ces deux transporteurs et pour le compte du requérant, à destination des acquéreurs, les marchandises se trouvaient en France ; qu'il en résulte que les opérations de livraisons en France de biens meubles corporels réalisées par la société AVI relèvent du champ d'application des dispositions précitées du I de l'article 258 du code général des impôts mais, en revanche, ne constituent pas, de la part de ces acquéreurs, des acquisitions intracommunautaires et, dès lors, ne relèvent pas du champ d'application des dispositions précitées de l'article 258 C du même code ; qu'il en résulte que, par application des dispositions, précitées, du 1 de l'article 283 dudit code, M. X est redevable de la taxe sur la valeur ajoutée à raison de ces opérations ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts : « Le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle » ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 256 du code général des impôts que le moyen tiré de ce que le requérant n'aurait, d'après lui, aucun établissement stable en France, est inopérant, les conclusions de la requête tendant seulement à la décharge de rappels de taxe sur la valeur ajoutée due à raison de la réalisation en France d'opérations de livraisons de biens meubles corporels, et non d'opérations de prestations de service relevant du champ des dispositions précitées de l'article 259 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, la somme, au demeurant non chiffrée, que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. Robert X est rejetée.
Article : Le présent arrêt sera notifié à M. Robert X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
N°06DA00619 2