Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le
16 mars 2007, présentée pour la COMMUNE DE BOESCHEPE, représentée par son maire en exercice, par la SCP Cattoir, Joly et Associés ; la commune demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0600951 en date du 17 janvier 2007 du Tribunal administratif de Lille qui a annulé l'arrêté en date du 16 juillet 2004 par lequel le maire de la COMMUNE DE BOESCHEPE a refusé de délivrer à M. X un permis de construire un immeuble à usage d'habitation et une grange sur un terrain sis chemin du Sacré Coeur ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Lille ;
3°) de condamner M. X à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient qu'elle abandonne le moyen tiré de l'irrecevabilité de la requête du
2 décembre 2004 ; que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, l'adjoint au maire, signataire de l'acte attaqué, disposait d'une délégation de signature et la délégation figurait dans le dossier d'appel ; que la construction envisagée « grange hospital » n'est pas une habitation à usage agricole ; qu'en application de l'article L. 311-1 du code rural, ce bâtiment pourrait relever d'une activité agricole uniquement en raison du seul box poulinage de 9 m² à condition que cette activité s'exerce de manière habituelle et, donc, constitue l'activité principale de M. X, ce qui n'apparaît pas dans le dossier ; qu'aucun justificatif ne permet d'affirmer que l'intéressé exerce l'activité d'éleveur de chevaux de manière habituelle selon la définition du code rural et la jurisprudence de la Cour de cassation ; qu'à supposer que l'on considère que cette « grange hospital » constitue un bâtiment d'élevage, le maître d'ouvrage aurait dû établir un dossier de déclaration préalable adressé au maire en même temps que le dossier de permis de construire en application des articles 153, 154 et suivants du règlement sanitaire départemental ; qu'en l'absence d'un tel dossier, le maire de Boeschepe, s'il avait accordé le permis de construire, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation pour non-respect du règlement sanitaire départemental et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ; que la maison d'habitation n'est pas directement liée à l'exploitation agricole ; que rien dans le dossier ne permet de dire que la présence constante d'une ou plusieurs personnes est nécessaire pour surveiller ou soigner les poulains venant de naître ; que, par ailleurs, le pétitionnaire est propriétaire à Godewaersvelde d'une maison d'habitation entourée de prairies ; qu'il faut noter, enfin, que la zone naturelle située au sud de la commune correspond aux monts et glacis inscrits des Monts des Flandres qu'il est essentiel de protéger ; qu'il convient de souligner la faiblesse du volet paysager dans le dossier de demande de permis de construire ; que, sur le document graphique du dossier, la propriété du voisin située à sept mètres de la grange n'apparaît pas ; que la notice n'est pas jointe au volet paysager ;
Vu le mémoire, enregistré le 9 août 2007, présenté pour M. Jean-Paul X, demeurant ..., par la SCP Soland et Associés, qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de procéder, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à un nouvel examen de la demande de permis de construire, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à la condamnation de la COMMUNE DE BOESCHEPE à lui verser la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que si la commune produit un arrêté de délégation de signature du 24 avril 2001, signé par le maire, la COMMUNE DE BOESCHEPE ne démontre pas que le maire avait été autorisé à signer un tel arrêté et que ledit arrêté aurait fait l'objet d'une publication au registre des actes administratifs ; que les arguments nouveaux, apportés par la commune, sont inopérants dès lors qu'ils n'ont pas été visés dans la décision initiale du maire ; qu'il est démontré qu'il exerce une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 du code rural, de manière habituelle ; que le dressage de chevaux est désormais reconnu comme activité agricole ; que le moyen tiré de l'absence de déclaration préalable à sa demande de permis de construire de son installation ne peut être que rejeté ; que la construction d'une maison est indispensable car une présence sur place est indispensable pour le suivi des poulains et des juments dès la naissance ainsi que pour les chevaux bénéficiant de soins ; que le projet préserve parfaitement le site des Monts des Flandres dont la vocation agricole est reconnue ;
Vu la lettre en date du 24 septembre 2007, informant les parties, en application de l'article
R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision à intervenir est susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 octobre 2007, présenté pour M. X, en réponse au moyen d'ordre public susceptible d'être soulevé par la Cour ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 octobre 2007, présenté pour la COMMUNE DE BOESCHEPE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2007 à laquelle siégeaient M. Marc Estève, président de chambre, M. Olivier Yeznikian, président-assesseur et
Mme Agnès Eliot, premier conseiller :
- le rapport de Mme Agnès Eliot, premier conseiller ;
- les observations de Me Baisy, pour la COMMUNE DE BOESCHEPE ;
- et les conclusions de M. Jacques Lepers, commissaire du gouvernement ;
Sur l'appel principal :
Considérant que, par arrêté du 16 juillet 2004, le maire de Boeschepe a refusé de délivrer à M. X un permis de construire un bâtiment à usage d'habitation ainsi qu'une grange au motif que « la grange composée de 4 boxes à chevaux ne peut être qualifiée de construction à usage agricole et, qu'en conséquence, l'habitation projetée n'est pas directement liée à l'exploitation agricole » ; que la COMMUNE DE BOESCHEPE fait appel du jugement du Tribunal administratif de Lille qui a annulé cet arrêté ;
Considérant, d'une part, que si la COMMUNE DE BOESCHEPE a produit un arrêté du
24 avril 2001 par lequel son maire a donné délégation de signature à M. Michel Y, premier adjoint, à l'effet de signer, notamment, les actes concernant l'urbanisme et le droit du sol, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet arrêté a été régulièrement publié au recueil des actes administratifs de cette commune et qu'il était, dès lors, exécutoire au moment où M. Y a signé, pour le maire de Boeschepe, l'arrêté en date du 16 juillet 2004 refusant d'accorder à M. X un permis de construire ; que, par suite, c'est à bon droit que le Tribunal a retenu le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté contesté ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article ND 1 du plan local d'urbanisme de LA COMMUNE DE BOESCHEPE : « Types d'occupation ou d'utilisation du sol admise : / Dans l'ensemble de la zone : / 1. Les constructions à usage agricole ainsi que les maisons d'habitations directement liées à l'exploitation agricole (…) » et qu'aux termes de l'article ND 2 du même texte : « Occupations et utilisations du sol interdits / Toutes constructions ou installations quelle qu'en soit la nature à l'exception de celles prévues à l'article ND 1 » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X justifie exercer les activités d'élevage et d'étalonnage de chevaux et qu'il est également soigneur de chevaux de compétition ; que la construction d'une grange composée de quatre box à chevaux, destinée, notamment, à accueillir les animaux blessés et en fin de vie, alors même que ladite construction ne correspondrait pas à l'activité principale de M. X, doit être regardée comme une construction à usage agricole au sens de la réglementation d'urbanisme applicable ; qu'il est, par ailleurs, établi que la construction d'une maison d'habitation sur la même parcelle répond à la nécessité de suivre, par une présence permanente et continue, l'état de santé des chevaux ; qu'elle est, dès lors, directement liée à l'activité agricole exercée par le pétitionnaire et est permise par les dispositions de l'article ND 1 du plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE BOESCHEPE précité ;
Considérant, toutefois, que la COMMUNE DE BOESCHEPE, pour fonder légalement l'arrêté contesté, fait valoir en appel qu'elle aurait dû, en tout état de cause, refuser d'accorder le permis de construire demandé, faute pour le pétitionnaire d'avoir produit, en application de l'article 153 du règlement sanitaire départemental, le dossier de déclaration préalable de création d'un bâtiment d'élevage ; qu'il résulte, toutefois, des dispositions de l'article L. 421-2 et R. 421-1-1 du code de l'urbanisme que les règlements sanitaires départementaux ne peuvent édicter des conditions de procédure relatives à l'octroi du permis de construire ; que la COMMUNE DE BOESCHEPE ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de l'article 153 du règlement sanitaire départemental ; qu'elle n'est pas davantage fondée à invoquer les dispositions de l'article 154 du même règlement relatif à l'épandage dès lors qu'il est constant que l'élevage de chevaux se fait sur litière ;
Considérant, enfin, que si la régularité de la procédure d'instruction d'un permis de construire requiert la production par le pétitionnaire de l'ensemble des documents exigés par les dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme le caractère insuffisant du contenu de l'un de ces documents au regard desdites dispositions ne constitue pas nécessairement une irrégularité de nature à entacher la légalité de l'autorisation si l'autorité compétente est en mesure, grâce aux autres pièces produites, d'apprécier l'ensemble des critères énumérés par les dispositions précitées ; que, contrairement à ce que soutient la COMMUNE DE BOESCHEPE, avait été jointe à la demande de permis de construire la notice, exigée par le 7° de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme précité ; que si la COMMUNE DE BOESCHEPE fait valoir, par ailleurs, que la propriété du voisin située à sept mètres du bâtiment dont la construction est envisagée ne figure pas dans le document graphique, cette insuffisance n'était pas, en l'espèce, eu égard aux autres pièces produites dans la demande de permis de construire, de nature à entacher d'illégalité la délivrance du permis litigieux dès lors que le maire de Boeschepe était en mesure d'apprécier l'insertion des futurs bâtiments dans leur environnement ainsi que leur impact visuel ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de procéder à une substitution des motifs qui ont fondé la décision attaquée ; que, par suite, la COMMUNE DE BOESCHEPE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lille a annulé l'arrêté en date du 16 juillet 2004 par lequel son maire a refusé de délivrer à M. X un permis de construire ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'à la suite de l'annulation de l'arrêté attaqué, il y a lieu, sans qu'il soit besoin de prononcer d'astreinte, de prescrire au maire de Boeschepe de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, à un nouvel examen de la demande de permis de construire de M. X relative à la construction d'un bâtiment à usage d'écurie et de centre de soins pour chevaux et d'une maison d'habitation ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. X qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la COMMUNE DE BOESCHEPE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de la COMMUNE DE BOESCHEPE au profit de M. X la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la COMMUNE DE BOESCHEPE est rejetée.
Article 2 : Le maire de Boeschepe procédera, dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt, à un nouvel examen de la demande de permis de construire relative à la construction d'un bâtiment à usage d'écurie et de centre de soins pour chevaux et d'une maison d'habitation.
Article 3 : La COMMUNE DE BOESCHEPE versera à M. X la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE BOESCHEPE et à M. Jean-Paul X.
Copie sera transmise au préfet du Nord.
N°07DA00401 2