Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2007 par télécopie et confirmée le 1er juin 2007 par la production de l'original au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Didier X, demeurant ..., par Me Wacquet ; M. X demande à la Cour :
11) d'annuler le jugement n° 0501096 du 3 avril 2007 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mars 2005 du ministre de l'intérieur lui notifiant un retrait de trois points sur son permis de conduire et l'informant de la perte de validité dudit permis pour solde de points nul ;
2°) d'annuler l'ensemble des décisions de retrait des points prises par le ministre de l'intérieur à son encontre ;
3°) d'enjoindre audit ministre de lui restituer, dans un délai de quinze jours, un certificat de conduite comportant un nombre de points égal à 12, d'effacer l'ensemble des mentions y afférentes au sein du système de traitement automatisé des permis de conduire, sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'aux entiers dépens ;
Il soutient que l'annulation de son permis de conduire est intervenue à la suite d'une procédure irrégulière ; que les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises les 24 mai 2004, 17 septembre 2003, 16 octobre 2002, 23 mai 2002, 28 août 2000, 1er mai 2000 et 9 novembre 1998 sont irrégulières dès lors que l'administration ne lui a pas délivré l'information préalable prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que cette formalité, qui constitue une garantie essentielle de l'auteur de l'infraction, est substantielle et que le non-respect de l'obligation d'information préalable constitue une violation de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a été rendu destinataire de cette information préalable pour aucun des retraits de points dont il a fait l'objet ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu l'ordonnance du 10 juillet 2007 portant clôture de l'instruction au 10 octobre 2007 ;
Vu l'ordonnance du 25 janvier 2008 portant réouverture de l'instruction ;
Vu la mise en demeure, adressée le 25 janvier 2008 au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2008 par télécopie et régularisé le 8 février 2008 par la production de l'original, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales qui demande à la Cour de maintenir le retrait de 3 points sur le permis de conduire du requérant avec toutes conséquences de droit ; il soutient que les retraits de points antérieurs à la décision référence 49 du 31 mars 2005 portant injonction de restitution d'un permis de conduire invalidé par solde de points nul ne sauraient être utilement contestés dès lors que l'autorité préfectorale est placée dans une situation de compétence liée ; que les décisions précédentes de retrait de points ont été portées à la connaissance du contrevenant, en application des dispositions des articles L. 223-3 et R. 258 du code de la route par envoi d'une lettre simple référence 48 à l'adresse relevée auprès du conducteur ; que la décision 48 S, envoyée en lettre recommandée avec accusé de réception a eu pour effet de notifier à l'intéressé les décisions de retrait de points et ainsi de les lui rendre opposables ; que l'infraction commise le 24 mai 2004 a fait l'objet d'un procès-verbal dûment signé par M. X mentionnant le retrait de points ; que les procès-verbaux comportent l'information sur le droit d'accès ; que pour les précédentes infractions, le ministre ne peut établir que le requérant a bénéficié de l'information préalable aux retraits de points opérés sur son permis ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Christian Bauzerand, premier conseiller :
- le rapport de Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales a, par une décision en date du 31 mars 2005, dont l'intéressé a accusé réception le 16 avril 2005, prononcé le retrait de trois des points du permis de conduire de M. X en raison de l'infraction commise le 24 mai 2004, lui a rappelé les retraits consécutifs de dix points prononcés à la suite des infractions commises les 9 novembre 1998, 1er mai 2000, 28 août 2000, 23 mai 2002, 16 octobre 2002 et 17 septembre 2003, et l'a informé de la perte de validité de son permis ; que M. X relève appel du jugement du 3 avril 2007 du Tribunal administratif d'Amiens rejetant sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 31 mars 2005 ;
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-1, L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
Considérant, d'une part, qu'en ce qui concerne les retraits de points prononcés à la suite des infractions commises les 9 novembre 1998, 1er mai 2000, 28 août 2000, 23 mai 2002, 16 octobre 2002 et 17 septembre 2003, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales reconnait être dans l'impossibilité d'établir que le requérant a bénéficié de l'information préalable aux retraits de points opérés sur son permis, prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir qu'il n'a pas reçu communication des informations précitées lors de la constatation de ces infractions et à demander l'annulation de ces décisions ;
Considérant, d'autre part, qu'en ce qui concerne le retrait de points prononcé à la suite de l'infraction commise le 24 mai 2004, il ressort des pièces du dossier et notamment du modèle de procès-verbal ayant été remis lors de l'infraction litigieuse que le contrevenant a été informé du retrait de points qu'il était susceptible d'encourir, de l'existence d'un traitement automatisé, et de la possibilité pour lui d'y accéder, conformément aux dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que par suite il n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été privé d'une information constituant une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre d'en contester la réalité et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis de conduire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est seulement fondé à demander par le moyen, soulevé pour la première fois en appel, du défaut d'information préalable, l'annulation des décisions de retrait de points consécutifs aux infractions commises les 9 novembre 1998, 1er mai 2000, 28 août 2000, 23 mai 2002, 16 octobre 2002 et 17 septembre 2003 ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution » ;
Considérant que l'administration a retiré irrégulièrement dix points affectés au permis de conduire de M. X, la présente décision implique que, dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales réaffecte dix points au capital de ce permis et efface dans le fichier national du permis de conduire la mention du retrait de ces points ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) » ;
Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. X et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 31 mars 2005 du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en tant qu'elle prononce les retraits de points consécutifs aux infractions commises les 9 novembre 1998, 1er mai 2000, 28 août 2000, 23 mai 2002, 16 octobre 2002 et 17 septembre 2003 est annulée.
Article 2 : Le jugement n° 0501096 du 3 avril 2007 du Tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales de procéder, dans un délai d'un mois à compter du présent arrêt, à la reconstitution de dix points sur le permis de conduire de M. X et d'effacer dans le fichier national du permis de conduire la mention du retrait de ces points.
Article 4 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Didier X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Copie sera transmise au préfet de la Somme.
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N°07DA00786