Vu, I, sous le no 07DA01007, la requête, enregistrée le 4 juillet 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Yves X, demeurant ..., par Me Chabert, avocat ; ils demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0301487, en date du 17 avril 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;
2°) de prononcer ladite décharge et, subsidiairement, de ramener au taux légal le taux de l'intérêt de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que Mme X a effectivement exercé une activité professionnelle en sa qualité de gérante statutaire de la SARL VTP ; qu'elle était notamment chargée d'élaborer la stratégie à long terme et d'adopter les décisions concernant la marche quotidienne de l'entreprise ; que la circonstance que la rémunération de M. X soit supérieure à celle de son épouse en 1998 et 1999 ne remet pas en cause la déductibilité des rémunérations perçues par Mme X en sa qualité de gérante statutaire ; que le taux des intérêts de retard crée une discrimination entre les contribuables ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 octobre 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui demande à la Cour de rejeter la requête et d'annuler l'article 2 du jugement n° 0301487 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles ; il fait valoir que M. et Mme X n'ayant contesté les rehaussements qu'à hauteur de 76 000 francs, ils supportent, pour le surplus, le fardeau de la preuve de l'exagération des impositions querellées ; que Mme X n'exerçait aucune activité au sein de la SARL VTP ; que M. X, directeur salarié de la SARL VTP, est détenteur de parts sociales de cette société, à raison de la qualité d'associée de sa femme et en assume la gérance de fait ; que rien ne s'oppose à ce que le taux des intérêts de retard soit supérieur au taux de l'intérêt légal ; que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en mettant à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles au seul motif qu'un dégrèvement partiel, correspondant à une mesure gracieuse, est intervenu en cours d'instance ;
Vu, II, sous le no 08DA00959, la requête, enregistrée le 23 juin 2008 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai et régularisée le 15 septembre 2008, présentée pour M. et Mme Yves X, demeurant ..., par Me Chabert, avocat ; ils demandent à la Cour de prononcer, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 0301487, en date du 17 avril 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;
Ils soutiennent que le recouvrement de la somme litigieuse, en vue duquel ils sont contraints de procéder à la vente de leur immeuble, aurait des conséquences difficilement réparables en cas de réformation du jugement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 septembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique qui demande à la Cour de rejeter la requête ; il fait valoir que le jugement rejetant une demande de décharge n'entraîne, en tant que tel, aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet du sursis prévu à l'article R. 811-17 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 décembre 2008, à laquelle siégeaient M. Gérard Gayet, président de Chambre, Mme Marie-Christine Mehl-Schouder, président-assesseur et M. Xavier Larue, conseiller :
- le rapport de M. Xavier Larue, conseiller ;
- et les conclusions de M. Alain de Pontonx, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes nos 07DA01007-08DA00959 de M. et Mme X présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;
Considérant que, suite à une vérification de comptabilité de la SARL VTP, l'administration a estimé que Mme X n'exerçait pas la gérance dont elle était statutairement chargée et a, en conséquence, procédé à la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des revenus perçus par l'intéressée ; que M. et Mme X ont demandé l'annulation et le sursis à exécution du jugement n° 0301487, en date du 17 avril 2007, par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;
Sur les conclusions de la requête n° 07DA01007 :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
Considérant que l'article R*194-1 du livre des procédures fiscales dispose que : « Lorsque ayant donné son accord à la rectification (...), le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) » ; que l'article 109-1 du code général des impôts dispose que : « Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital. (...) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article 110 du même code : « Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés (...) » ; que l'article 211 du même code dispose que : « I. Dans les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes (...) et dont les gérants sont majoritaires, (...) les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations sont, sous réserve des dispositions du 3 de l'article 39 et 211 bis, admis en déduction du bénéfice de la société pour l'établissement de l'impôt, à la condition que ces rémunérations correspondent à un travail effectif. Les sommes retranchées du bénéfice de la société en vertu du premier alinéa sont soumises à l'impôt sur le revenu au nom des bénéficiaires dans les conditions prévues à l'article 62. Pour l'application du présent article, les gérants qui n'ont pas personnellement la propriété de parts sociales sont considérés comme associés si leur conjoint ou leurs enfants non émancipés ont la qualité d'associé. Dans ce cas, comme dans celui où le gérant est associé, les parts appartenant en toute propriété ou en usufruit au conjoint et aux enfants non émancipés du gérant sont considérées comme possédées par ce dernier » ;
Considérant qu'il est constant que M. et Mme X ont formulé des observations le 18 janvier 2002 en réponse à la notification de redressement datée du 14 décembre 2001 ; qu'ils ont notamment demandé que, pour chacune des années faisant l'objet des rehaussements querellés, une somme de 11 586,12 euros (76 000 francs) soit regardée comme des rémunérations de Mme X ; qu'ils ont ainsi contesté le redressement qui leur a été notifié dans la catégorie des revenus de capitaux mobilier et non, comme le soutient l'administration, accepté ce rehaussement, à concurrence du surplus de cette somme ; qu'il suit de là que, conformément aux dispositions précitées de l'article R*194-1 du livre des procédures fiscales, l'administration doit, pour démontrer le bien-fondé des impositions en litige, établir que Mme X a perçu des sommes ne correspondant pas, de sa part, à l'exercice d'une activité effective ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition en litige :
Considérant que l'administration fait valoir que Mme X n'exerce aucune activité dans la société VTP ; qu'elle n'a, d'ailleurs, jamais été présente lors des interventions du service sur place, et a donné tout pouvoir à son mari, salarié en qualité de directeur, pour la représenter ; que, d'ailleurs, il ressort des propres allégations des requérants que Mme X se bornait à recueillir les comptes rendus de son mari sur la gestion de la société ; que l'administration fait également valoir que M. X, qui a la qualité d'associé de la SARL VTP conformément aux dispositions précitées de l'article 211 du code général des impôts, assumait les relations avec les clients et les fournisseurs ainsi que la gestion du personnel, procédait au choix des marchés et à leur signature après en avoir fixé les prix, se chargeait de la signature des traites commerciales, de la rédaction des correspondances de toute nature et des déclarations fiscales de la société et disposait d'une procuration sur le compte bancaire de la SARL VTP ainsi que de la carte bleue correspondante ; qu'en outre, les rémunérations de M. X sont supérieures en 1998 et comparables, quoique légèrement inférieures, pour l'année 1999, à celles de son épouse ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder M. X comme le gérant de fait de la SARL VTP ; que les requérants ne contestent pas sérieusement la position de l'administration en se bornant à soutenir que Mme X était la gérante de droit de la société, que les rémunérations qui lui étaient versées correspondaient à un travail effectif, au demeurant non justifié, et que l'intéressée avait en charge d'adopter les décisions relatives à la marche quotidienne de l'entreprise ainsi que l'élaboration de sa stratégie à long terme ; qu'il suit de là que l'administration doit être regardée comme rapportant la preuve qui lui incombe ; que, par suite, c'est à bon droit que les sommes litigieuses ont été imposées, sur le fondement des dispositions précitées des articles 109-1 1° et 110 du code général des impôts, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
En ce qui concerne les intérêts de retard :
Considérant que, pour contester les intérêts de retard, M. et Mme X se bornent à soutenir devant la Cour, comme ils l'ont fait devant les premiers juges, que leur taux créerait une discrimination entre les contribuables ; qu'il y a lieu, par adoption des motifs du jugement attaqué, d'écarter ce moyen ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1998, 1999 et 2000 ;
Sur les conclusions reconventionnelles de l'Etat tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué :
Considérant qu'il n'y avait pas lieu, du seul fait du dégrèvement prononcé à titre de mesure gracieuse par l'administration fiscale, d'accorder à M. et Mme X la somme demandée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions de l'Etat à fin d'annulation de l'article 2 du jugement attaqué doivent donc être accueillies ;
Sur les conclusions de la requête n° 08DA00959 :
Considérant que dans la mesure où la Cour statue, par le présent arrêt, sur la demande d'annulation du jugement n° 0301487 du Tribunal administratif de Rouen en date du 17 avril 2007, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement, présentées par M. et Mme X dans leur requête enregistrée sous le n° 08DA00959 sont devenues sans objet ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu de statuer sur ces conclusions ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme demandée par M. et Mme X au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 08DA00959.
Article 2 : La requête n° 07DA01007 de M. et Mme X est rejetée.
Article 3 : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Yves X ainsi qu'au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Nord.
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Nos07DA01007,08DA00959