Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai le 14 avril 2008, présentée pour la SOCIETE TOTAL FRANCE SA, dont le siège est Tour Total 24 cours Michelet à Puteaux (92800), par la SCP LHJ avocats ; la SOCIETE TOTAL FRANCE SA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600165 du 21 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 25 octobre 2005 par laquelle le préfet de la Seine-Maritime l'a mise en demeure, d'une part, de lui transmettre les rapports d'incidents relatifs aux épandages d'hydrocarbures dans les cuvettes A607, A201, A209 et, d'autre part, de respecter l'article III.6 du chapitre 10 de l'arrêté préfectoral cadre du 14 juin 1999 qui autorise l'exploitation de la raffinerie de Normandie à Gonfreville l'Orcher ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;
La SOCIETE TOTAL FRANCE SA soutient que les écoulements d'hydrocarbures constatés dans le bac A607 de son site d'exploitation le 7 août et le 8 septembre 2005 sont des évènements distincts et n'ont pas eu de conséquences sur l'environnement ; qu'ainsi elle n'était pas tenu de signaler les écoulements relevés au mois d'août aux services de l'Etat ; que le respect des dispositions de l'article III.6 du règlement d'exploitation, objet de la mise en demeure du préfet, est sans objet car ne concernant pas le nettoyage des cuvettes de rétention ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 31 décembre 2008 et régularisé par la production de l'original le 6 janvier 2009, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui conclut au rejet de la requête ; le ministre soutient que l'incident du 6 septembre 2005, déclaré aux services de l'Etat, est la conséquence de la fuite constatée le 7 août 2005 et non déclarée ; qu'eu égard à la capacité du bac A607 les conséquences d'une fuite étaient extrêmement graves pour l'environnement ; que la mise en demeure portait sur le respect de l'article III.1.6 de l'arrêté cadre du 14 juin 1999 ainsi que visé sur le rapport de l'inspecteur des installations classées en date du 21 septembre 2005 ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 mai 2009, présenté pour la SOCIETE TOTAL FRANCE SA, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que ses précédentes écritures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, modifiée ;
Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jean-Marc Guyau, premier conseiller, les conclusions de M. Jacques Lepers, rapporteur public et les parties présentes ou représentées ayant été invitées à présenter leurs observations, Me Lhomme, pour la SOCIETE TOTAL FRANCE SA ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement, reprenant les dispositions de l'article 1er de la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées : Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature et de l'environnement, soit pour la conservation des sites et monuments. ; et qu'aux termes de l'article 38 du décret susvisé du 21 septembre 1977, alors en vigueur : L'exploitant d'une installation soumise à autorisation ou à déclaration est tenu de déclarer dans les meilleurs délais à l'inspection des installations classées les accidents ou incidents survenus du fait du fonctionnement de cette installation qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement. / Un rapport d'accident ou, sur demande de l'inspection des installations classées, un rapport d'incident est transmis par l'exploitant à l'inspection des installations classées. Il précise notamment les circonstances et les causes de l'accident ou de l'incident, les effets sur les personnes et l'environnement, les mesures prises ou envisagées pour éviter un accident ou un incident similaire et pour en pallier les effets à moyen ou à long terme. ;
Considérant que, par arrêté du 25 octobre 2005, le préfet de la Seine-Maritime, par application des dispositions susrappelées, a mis en demeure la SOCIETE TOTAL FRANCE SA de respecter l'obligation de transmission de rapports d'incidents suite à des épandages d'hydrocarbures constatés dans les cuvettes de rétention des bacs A607, A201 et A209 du site qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Gonfreville l'Orcher, ainsi que l'obligation de nettoyage des cuvettes de rétention des bacs A201 et A209 telles que prévues par l'arrêté préfectoral du 14 juin 1999 qui autorise et réglemente l'exploitation de ce site ; que la société requérante relève appel du jugement du Tribunal administratif de Rouen en date du 21 février 2008 ayant rejeté sa demande d'annulation de la décision du 25 octobre 2005 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que des écoulements ont été constatés au mois d'août 2005 sur le bac A607 et qu'une fuite importante a été signalée sur le même bac le 8 septembre 2005 ; qu'un rapport des services de l'inspection des installations classées en date du 21 septembre 2005 fait état de ce que ces écoulements étaient annonciateurs de l'incident survenu en septembre ; qu'un rapport du service d'inspection interne de la SOCIETE TOTAL FRANCE SA, en date du 10 août 2005, retient que les écoulements constatés au cours de ce mois pourraient être un début de fuite qui sera progressive sur les semaines ou mois à venir ; que, dans ces circonstances, ainsi que l'a d'ailleurs retenu le Tribunal de police du Havre le 4 décembre 2007, l'incident d'août 2005 était de nature à porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ; qu'à la date de l'arrêté, le préfet était donc tenu de mettre en demeure la SOCIETE TOTAL FRANCE SA de transmettre le rapport d'incident relatif aux épandages d'hydrocarbures survenus dans les cuvettes de rétention du bac A607 ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article III.1.6 de l'arrêté préfectoral du 14 juin 1999 d'autorisation d'exploitation : Dans la semaine qui suit un incident (débordement de réservoir, fuite sur une conduite,...), les mesures sur les puits piézométriques seront effectuées quotidiennement. / Par ailleurs, toutes les mesures nécessaires au traitement des terres polluées ou a minima au confinement de la pollution seront prises dans les plus brefs délais afin d'éviter toute contamination de la nappe ; que les inspecteurs des installations classées ont relevé le 13 septembre 2005 que la cuvette de rétention du bac A607 était souillée en totalité avec, par endroits, formation de flaques d'hydrocarbures sur plusieurs centimètres de profondeur et que les terres constituant le fond des cuvettes de rétention des bacs A209 et A201 étaient également souillées par la présence d'hydrocarbures consécutivement à des incidents non négligeables, remontant à plus de 6 mois, non déclarés aux services de l'Etat ; que la seule circonstance invoquée par la société requérante, et au demeurant non établie, que les cuvettes de rétention soient étanches ne la dispensait pas de procéder aux travaux de traitement des terres polluées prévues par les dispositions précitées de l'arrêté d'exploitation ; que, dès lors, le préfet était tenu de mettre en demeure la SOCIETE TOTAL FRANCE SA de nettoyer les cuvettes de rétentions des bacs concernés dans un délai de trois mois, sans qu'elle puisse utilement se prévaloir ni d'absence de contamination de la nappe ni de l'erreur matérielle affectant l'arrêté du 25 octobre 2005 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE TOTAL FRANCE SA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de mise en demeure du préfet de la Seine-Maritime en date du 25 octobre 2005 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE TOTAL FRANCE SA est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE TOTAL FRANCE SA et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Copie sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.
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N°08DA00643