Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, d'une part, par télécopie le 12 février 2009 régularisée par la production de l'original le 16 février 2009 et, d'autre part, par télécopie le 3 avril 2009 régularisée par la production de l'original le 6 avril 2009, présentés pour le SYNDICAT FORCE OUVRIERE DE LA SOCIETE ANONYME RIETER AUTOMOTIVE FRANCE, représenté par son représentant statutaire en exercie, dont le siège social est situé 1390 route du Vivier Ganger à Ons-en-Bray (60650), le SYNDICAT CGT DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE France, représenté par son représentant statutaire en exercice, dont le siège social est situé 1390 route du Vivier Danger à Ons-en-Bray (60650), et le COMITE D'ETABLISSEMENT D'ONS-EN-BRAY DE LA SOCIETE ANONYME RIETER AUTOMOTIVE FRANCE, représenté par son représentant légal, dont le siège social est situé 1390 route du Vivier Danger à Ons-en-Bray (60650), par Me Haas, avocat ; Ils demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600380 du 11 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 23 août 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale rejetant leurs demandes de classement du site d'Ons-en-Bray de la SA Rieter Automotive France parmi les établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, et d'autre part, à la condamnation de l'Etat à leur verser la somme de 3 300 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de faire droit à l'ensemble de leurs demandes de première instance ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme globale de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 portant loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Antoine Durup de Baleine, premier conseiller, les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public, aucune partie n'étant présente ni représentée ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision (...) contient (...) l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un mémoire en réplique a été présenté à l'appui de la demande de première instance le 21 novembre 2008, avant la clôture de l'instruction ; que ce mémoire n'est ni visé, ni analysé par le jugement attaqué ; qu'eu égard à l'argumentation qu'elles développaient, ces écritures doivent être regardées comme ayant apporté des éléments nouveaux auxquels il n'a pas été répondu dans les motifs du jugement ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que le jugement est irrégulier et doit, pour cette raison, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les requérants devant le Tribunal administratif d'Amiens ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance, en tant qu'émanant du COMITE D'ETABLISSEMENT D'ONS-EN-BRAY DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe :
Considérant, en premier lieu, que par arrêté en date du 23 avril 2004, publié au Journal officiel du 2 mai 2004, le ministre du travail, de l'emploi et de la cohésion sociale a accordé délégation de signature à M. Jean-Denis A, directeur des relations du travail et signataire de la décision du 23 août 2004 en litige, pour signer, dans la limite de ses attributions et au nom de ce ministre, tous actes, à l'exclusion des décrets ; que la circonstance que cette décision ne mentionne pas qu'elle est signée au nom du ministre est sans incidence, aucune règle de droit n'imposant une telle mention ; qu'il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de cette décision doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que, si, conformément aux dispositions du 1° du I de l'article 41 de la loi susvisée du 23 décembre 1998, l'inscription sur la liste des établissements donnant lieu au versement de l'allocation anticipée aux salariés et anciens salariés victimes de l'amiante est décidée par un arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, le ministre du travail a qualité pour rejeter seul une demande tendant à une telle inscription ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision attaquée émanerait d'une autorité incompétente, faute d'être conjointe à ces autorités ministérielles, doit être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, que la décision du 23 août 2004 ne présente pas le caractère d'une décision individuelle ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette décision n'est pas motivée sur ce point ne peut qu'être écartée ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 dans sa rédaction alors en vigueur : I. - Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante (...), sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que doivent être inscrits sur cette liste les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de l'activité de ces établissements ; qu'il en va ainsi, alors même que ces opérations ne constitueraient pas l'activité principale des établissements en question ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'établissement de la SA Rieter Automotive France situé à Ons-en-Bray a pour activité principale la conception et la fabrication de systèmes de contrôle acoustique et d'isolations thermiques pour véhicules à moteur ; que, si les requérants soutiennent que les salariés avaient pour tâche de thermoformer sur des moules en aluminium des pièces de composés amiantés et ont été conduits à manipuler de l'amiante tout au long du processus de production par l'utilisation de plaques d'amiante carton ensuite remplacés par des tôles de fibrociment contenant de l'amiante, que les fours étaient équipés de plaques d'amiante carton et de joints en tricotin d'amiante et qu'il a été fait une utilisation abondante et généralisée de poudres d'amiante, l'activité essentielle de l'établissement d'Ons-en-Bray est celle de conception et fabrication de systèmes de contrôle acoustique et d'isolations thermiques pour véhicules à moteur ; que si, à l'occasion de cette activité, les salariés ont été amenés à utiliser et manipuler des équipements et matériaux pouvant comporter de l'amiante, l'établissement n'a jamais lui-même fabriqué des matériaux contenant de l'amiante ; que ces utilisation et manipulation ne sauraient, à elles seules, faire regarder l'établissement d'Ons-en-Bray comme exerçant une des activités mentionnées au premier alinéa du I de l'article 41 précité ;
Considérant, en second lieu, que les requérants soutiennent également que de nombreux salariés ont été exposés à de forts taux d'empoussièrement à l'amiante par l'utilisation de poudre d'amiante ainsi qu'à l'occasion de fréquentes opérations de nettoyage et de maintenance de machines incorporant des matériaux amiantés, telles que, à l'atelier de moulage, des presses chauffantes équipées de plaques d'amiante carton, remplacées entre 1989 et 1992 par des tôles de fibrociment contenant de l'amiante, et de flexibles en tresse d'amiante, ainsi que, à l'atelier de fabrication, des fours équipés de plaques d'amiante carton et de joints en tricotin d'amiante ; qu'ils ajoutent, d'une part, que les opérateurs de machine et le personnel de maintenance utilisaient abondamment l'amiante pour éponger les tables de presse ainsi que des fuites d'huile et des flaques d'eau et, d'autre part, qu'un flocage d'amiante a été découvert en 1993 dans les murs et le plafond de la chaufferie de l'usine ;
Considérant, toutefois et à supposer que certaines opérations de maintenance et de nettoyage dont font état les requérants puissent être regardées comme des opérations de calorifugeage ou décalorifugeage à l'amiante, qu'il ressort également des pièces du dossier que le service de dépannage et de maintenance de l'entreprise, service commun à l'établissement d'Ons-en-Bray et à celui de la Chapelle-aux-Pots, comptait entre 12 et 15 salariés, sans qu'il résulte de l'instruction qu'un tel nombre de salariés aurait représenté une part significative de l'effectif de l'établissement d'Ons-en-Bray ; que, si, d'après les documents établis par les médecins du travail de l'entreprise en 2001 et 2003, 56 ouvriers se trouvaient exposés à l'amiante dans l'atelier UF (unité de fabrication ou formage sur presse) du fait de l'utilisation, à raison d'un sac de 25 kilogrammes par semaine, de poudres d'amiante pour éponger des fuites et flaques ainsi que saupoudrer des tables de presse, de telles utilisations de l'amiante ne constituent pas des travaux de calorifugeage ou décalorifugeage ; qu'en outre, si, d'après les mêmes documents, 40 ouvriers se trouvaient exposés à l'amiante dans les ateliers UM (unités de moulage), il n'en ressort toutefois pas que ces salariés effectuaient eux-mêmes les opérations de maintenance consistant à changer, toutes les deux à trois semaines, les plaques d'amiante carton équipant les presses chauffantes ainsi qu'à changer, deux fois par an, les flexibles en tresse d'amiante équipant ces machines, à raison de quatre par presse, mais que ces opérations, impliquant la découpe, au stanley ou à la meule, de plaques d'amiante carton et leur installation sur les presses chauffantes, la mise à la dimension, à la meule, de joints amiantés et la découpe aux ciseaux de tresses amiantées, étaient effectuées dans l'atelier de maintenance et par le personnel, à l'effectif beaucoup plus réduit, de cet atelier, tandis que ce même personnel assurait dans les ateliers UM le remplacement des plaques d'amiante carton, flexibles en tresse d'amiante et joints amiantés sur les machines ; que, s'il est établi qu'un flocage d'amiante a été découvert en 1993 au niveau des murs et du plafond d'une chaufferie, il ressort seulement du dossier que 6 mécaniciens sont entrés dans cette chaufferie pendant les opérations de déflocage ; qu'enfin, les requérants ne font état d'aucune reconnaissance en nombre de maladies professionnelles liées à l'amiante s'agissant de salariés ayant exercé dans l'établissement d'Ons-en-Bray entre 1960 et 1992, une unique reconnaissance de cette nature étant intervenue, par décision de la Caisse primaire d'assurance maladie de Beauvais du 30 mars 2004, concernant un salarié, agent de production au sein de l'établissement entre janvier 1975 et mars 2003 ; que, compte tenu de ces divers éléments, les activités de l'entreprise susceptibles d'être regardées comme de calorifugeage ou décalorifugeage ainsi que de flocage ou déflocage à l'amiante n'ont pas constitué une part significative de l'activité de l'établissement d'Ons-en-Bray de la SA Rieter Automotive France ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le ministre du travail, de l'emploi et de la cohésion sociale se serait livré à une inexacte application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi susvisée du 23 décembre 1998 en refusant d'inscrire l'établissement d'Ons-en-Bray de la société Rieter Automotive France sur la liste des établissements ouvrant droit ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; que les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 23 août 2004 ne peuvent, dès lors, être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que demandent les requérants au titre des frais exposés, tant en première instance qu'en appel, et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif d'Amiens n° 0600380 du 11 décembre 2008 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le SYNDICAT FORCE OUVRIERE DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE, le SYNDICAT CGT DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE et le COMITE D'ETABLISSEMENT D'ONS-EN-BRAY DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE devant le Tribunal administratif d'Amiens et le surplus des conclusions de leur requête d'appel sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au SYNDICAT FORCE OUVRIERE DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE, au SYNDICAT CGT DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE, au COMITE D'ETABLISSEMENT D'ONS-EN-BRAY DE LA SOCIETE RIETER AUTOMOTIVE FRANCE et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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N°09DA00229 2