Vu, I, sous le n° 10DA00732, la requête enregistrée par télécopie le 21 juin 2010 et régularisée par la production de l'original le 22 juin 2010 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE, dont le siège social est situé 72 rue Pasteur à Mont-Saint-Aignan cedex (76130), par Me Campergue, avocat ; le centre hospitalier demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0602176 du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Rouen l'a condamné à verser, d'une part, à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen une indemnité de 18 388,35 euros ainsi qu'une somme de 966 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, d'autre part, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, une somme de 5 355 euros ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2°) de rejeter les demandes présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen et par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales devant le Tribunal administratif de Rouen ;
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Vu, II, sous le n°10DA00739, la requête enregistrée par télécopie le 22 juin 2010 et régularisée par la production de l'original le 24 juin 2010, présentée pour Mme Sandra A, demeurant ..., par la SCP de Bezenac, Lamy, Mahiu, Alexandre, société d'avocats ; elle conclut, à titre principal, qu'elle a été victime d'un aléa thérapeutique, subsidiairement, à ce que le centre hospitalier du Belvédère et l'ONIAM soient condamnés à l'indemniser solidairement de son entier préjudice et, plus subsidiairement, de condamner le centre hospitalier du Belvédère à l'indemniser de son préjudice et, enfin, de condamner solidairement la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen et le centre hospitalier du Belvédère à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient, qu'en l'absence de lien direct établi par les experts médicaux entre le retard mis à pratiquer une césarienne et l'hémorragie cataclysmique dont elle a été victime, cette dernière résulte entièrement d'un aléa thérapeutique ; que la décision du tribunal administratif a eu pour conséquence d'amener l'ONIAM à retirer son offre d'indemnisation ; que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu l'existence d'un lien de causalité entre le retard à pratiquer la césarienne et l'accident survenu ; qu'il ressort du rapport d'expertise du Pr B que rien ne permet d'affirmer qu'une décision plus précoce d'extraire l'enfant aurait permis d'éviter l'hémorragie ; que la commission régionale de conciliation et d'indemnisation a relevé, dans son avis du 3 octobre 2006, que le dommage subi résultait d'un accident médical imputable à un acte de soins, en l'occurrence la césarienne ; que la commission exclut toute faute du personnel soignant et, par suite, toute responsabilité du centre hospitalier du Belvédère ; que l'action de la caisse primaire a eu pour conséquence de diminuer le droit à indemnisation de la victime, contrairement aux objectifs de la loi du 4 mars 2002 ; que, si les experts n'excluent pas le retard mis pour pratiquer la césarienne pour expliquer l'apparition de l'hémorragie, ils observent également qu'il n'est pas possible d'affirmer que ce retard soit la cause unique de ladite hémorragie ; que, même dans l'hypothèse où une faute se combinerait avec un aléa thérapeutique, aucun élément du dossier ne permet d'établir un partage de 50 % au titre de la perte de chance ; qu'en effet, s'il y a faute du centre hospitalier, celle-ci ne peut être que la cause de la totalité du préjudice ; qu'il y aurait donc lieu, dans ce cas, de mettre à la charge de ce dernier, l'indemnisation de l'intégralité du préjudice ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Michel Durand, président-assesseur,
- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,
- et les observations de Me de Bézenac, avocat, pour Mme A ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que, le 7 juin 2002, Mme Sandra A a subi, au CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE à Rouen, une césarienne au cours de laquelle une hémorragie utérine massive est survenue, dont les conséquences ont entraîné des troubles dans ses conditions d'existence pendant une durée de 25 mois et 15 jours ; que l'intéressée a été indemnisée de ce préjudice par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à hauteur de 10 710 euros, suivant un protocole d'accord signé le 5 décembre 2006 ; que, toutefois, après le recours formé devant le Tribunal administratif de Rouen par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen, qui réclamait le montant des débours exposés pour Mme A du fait des conséquences de cette hémorragie, l'ONIAM a également demandé au tribunal de condamner le CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE à lui rembourser l'indemnité accordée à l'intéressée ; que le CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE et Mme A relèvent appel du jugement du tribunal administratif du 22 avril 2010 qui déclare le centre hospitalier responsable d'une faute dans la conduite de l'accouchement et évalue à 50 % l'incidence de cette faute dans la survenance de l'accident hémorragique ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du Pr B, enregistré au greffe du tribunal le 26 octobre 2004, et du rapport d'expertise établi le 14 juin 2006 par le Dr C pour la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, que Mme A a présenté le 7 juin 2002 une dystocie en cours de travail, qui s'est traduite par un arrêt de la progression de la dilatation du col à 4 centimètres à partir de 4 heures du matin ; que cette dystocie dynamique s'est maintenue jusqu'à l'extraction de l'enfant par césarienne ; qu'il résulte de l'instruction que la décision de pratiquer une césarienne a été prise tardivement, après plus de cinq heures de stagnation de la dilatation, et qu'il s'est écoulé un délai supplémentaire non justifié d'une heure entre la prise de la décision de pratiquer une césarienne et l'intervention chirurgicale correspondante ; que, toutefois, nonobstant ce délai, il ne ressort ni du rapport du Pr B, ni de celui du Dr C, lequel précise qu'il ne peut affirmer qu'une intervention plus précoce aurait permis d'éviter l'accident hémorragique majeur, dans la mesure où il ne peut préciser le moment de la rupture, que l'hémorragie cataclysmique dont a été victime Mme A était en lien direct avec le retard mis pour pratiquer la césarienne ; qu'il résulte également de ces éléments, qu'en l'absence de précisions quant aux conditions dans lesquelles est intervenue la rupture utérine, il n'est pas davantage établi que ce retard aurait fait perdre à l'intéressée une chance d'éviter l'hémorragie ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont imputé cette hémorragie à une faute médicale et à une faute dans l'organisation du service de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier et, par conséquent, à demander l'annulation du jugement qui condamne le centre hospitalier ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant, d'une part, qu'en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge du CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE les frais d'expertise exposés en première instance ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, en vertu de ces dispositions, et contrairement à ce qu'a décidé le tribunal administratif, de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, les frais de l'expertise, confiée au Dr C en 2006, représentant une somme de 700 euros ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge du CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, les sommes que la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen et l'ONIAM demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen à payer au CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen à payer à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1, 2, 3, et 5 du jugement n° 0602176 du Tribunal administratif de Rouen du 22 avril 2010 sont annulés.
Article 2 : Les frais d'expertise de 700 euros, exposés dans le cadre de la procédure devant la commission régionale de conciliation et d'indemnisation, sont mis à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Article 3 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen Elbeuf Dieppe Seine-Maritime et sa demande devant le Tribunal administratif de Rouen, ainsi que les conclusions de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et sa demande devant le Tribunal administratif de Rouen sont rejetées.
Article 4 : La caisse primaire d'assurance maladie de Rouen Elbeuf Dieppe Seine-Maritime versera, respectivement à chacun, une somme de 1500 euros au CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE et à Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE et le surplus des conclusions de Mme A sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DU BELVEDERE, à Mme Sandra A, à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen Elbeuf Dieppe Seine-Maritime, au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
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Nos10DA00732,10DA00739