Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. et Mme Bernard A, demeurant ..., par Me Farcy, avocat ; M. et Mme A demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701273 du 11 mai 2010 du tribunal administratif de Rouen en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions supplémentaires contestées ;
3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Patrick Minne, premier conseiller,
- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,
- et les observations de Me Farcy, avocat, pour M. et Mme A ;
Sur l'appel principal :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la sixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises (...) " ; qu'aux termes du 7 de l'article 371 AJ de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction issue du décret n° 96-650 du 19 juillet 1996 relatif aux centres de formalités des entreprises : " Les centres des impôts créent les centres compétents pour les personnes suivantes, dès lors qu'elles ne relèvent pas des dispositions des 1 à 6 et qu'elles n'ont pas d'autres obligations déclaratives que statistiques et fiscales : (...) c) Les assujettis à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices non commerciaux ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que ne sont tenues de faire connaître leur activité à un centre de formalités des entreprises que les personnes assujetties à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices non commerciaux exerçant une activité à titre de profession habituelle ;
Considérant que les détournements de fonds effectués au moyen d'utilisation abusive de procurations bancaires d'un proche ne peuvent être qualifiés d'activité exercée à titre de profession habituelle, alors même que les revenus procurés par de tels agissements doivent être assimilés à des bénéfices non commerciaux en vertu des dispositions du 1 de l'article 92 du code général des impôts ; qu'il résulte de l'instruction que, par une proposition de rectification du 8 février 2006 notifiée le 14 février suivant à M. et Mme A, l'administration a envisagé d'imposer, comme revenus assimilés à des bénéfices non commerciaux, les sommes versées par une tante de M. A, au cours des années 2000 et 2001 ; que le comportement adopté par M. A pour s'approprier ces sommes ne peut être qualifié d'activité exercée dans le cadre d'une entreprise individuelle, qui aurait dû le conduire à souscrire une déclaration d'existence auprès du centre de formalités des entreprises situé dans le centre des impôts dont il relève ; que le droit de reprise de l'administration ne pouvait donc s'exercer au-delà de la fin de la troisième année suivant celles au titre desquelles les impositions en litige étaient dues ; que, par suite, les contribuables sont fondés à soutenir, qu'à la date du 14 février 2006, le droit de reprise de l'administration était atteint par la prescription de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A sont fondés à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001 ;
Sur l'appel incident :
Considérant, ainsi qu'il est dit ci-dessus, que l'administration n'était pas en droit d'étendre son droit de reprise aux années d'imposition 2000 et 2001 ; que, par suite, le ministre intimé n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme A ont été assujettis à raison de la suppression de l'abattement sur les revenus de capitaux mobiliers prévu par le 3 de l'article 158 du code général des impôts ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. et Mme A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : M. et Mme A sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2000 et 2001.
Article 2 : Le jugement n° 0701273 du 11 mai 2010 du tribunal administratif de Rouen est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le recours incident du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est rejeté.
Article 4 : L'Etat est condamné à verser à M. et Mme A une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme A est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Bernard A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement.
Copie sera transmise au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
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N°10DA00860 2