Vu le recours, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Douai le 10 mai 2010, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT, le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0701641 du 17 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme Viviane A a été assujettie au titre des années 1997, 1999, 2000 et 2001 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2°) de remettre à la charge de Mme A ces cotisations supplémentaires ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sylvie Appèche-Otani, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Corinne Baes Honoré, rapporteur public ;
Considérant qu'à la suite de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle dont avait fait l'objet Mme Viviane A, l'administration fiscale a été autorisée par l'autorité judiciaire, en application de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, à consulter certaines pièces de la procédure judiciaire engagée à l'encontre de Mme A dont il ressortait que durant les années 1997 à 2001 au cours desquelles elle exerçait une activité de marchande de tapis sans domicile fixe immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Péronne depuis 1998, celle-ci avait procédé à des versements en espèces sur des contrats d'assurance-vie qui ont été regardés comme des recettes imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel du jugement du 17 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A a été assujettie au titre des années 1997, 1999, 2000 et 2001 ainsi que des pénalités y afférentes ;
Considérant qu'il incombe à l'administration fiscale, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, d'informer le contribuable dont elle envisage, soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine, de la nature et de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir par l'exercice de son droit de communication et, en particulier, de celui qu'elle tient de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, et qu'elle a effectivement utilisés, ainsi qu'elle peut le faire, pour procéder aux redressements, afin que ce contribuable ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents ou les copies de documents qui contiennent ces renseignements et, notamment, ceux dont l'administration avait fait état dans la proposition de rectification prévue par l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ou, en cas d'imposition d'office, dans la notification prévue par l'article L. 76 du même livre, qu'elle lui a, selon le cas, adressée, soient mis à sa disposition ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, le pli, contenant la proposition de rectification en date du 17 octobre 2006, notifiant à Mme A les rehaussements contestés, et qui a été retourné aux services fiscaux revêtu de la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée - retour à l'envoyeur " a été adressé à " Mme A ..." soit le libellé exact de l'adresse mentionnée par l'intéressée dans ses déclarations et courriers adressés à l'administration et seule adresse connue de cette dernière ; que d'autres éléments de la procédure fiscale adressés postérieurement à Mme A à cette même adresse ont été réceptionnés ; que si cette adresse correspond au lieu de domiciliation fiscale de la requérante, à savoir au siège du cabinet U-T-I , cette dernière n'a pas mentionné le nom dudit cabinet dans l'adresse qu'elle a portée à la connaissance de l'administration, laquelle a pu régulièrement adresser les éléments de la procédure et notamment la proposition de rectification à cette adresse ; qu'il suit de là que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'en raison du caractère incomplet de l'adresse figurant sur le pli contenant la proposition de rectification et de l'absence de réception par la destinataire, circonstances au demeurant imputables à cette dernière, l'administration aurait entaché la procédure d'imposition d'irrégularité faute d'avoir mis Mme A en mesure de connaître l'origine, la nature et la teneur exacte des renseignements utilisés pour établir les impositions supplémentaires mises à sa charge et, le cas échéant, d'en demander la communication et de les contester, avant leur mise en recouvrement ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant, en premier lieu, que si Mme A fait valoir qu'elle n'a pas été destinataire des pièces de la procédure menée à son encontre, l'administration démontre par les pièces qu'elle produit qu'elle a adressé à Mme A à l'adresse communiquée par cette dernière, la proposition de rectification en date du 17 octobre 2006 laquelle d'une part, détaillait les rectifications proposées selon la procédure contradictoire s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et selon la procédure d'évaluation d'office concernant les bénéfices industriels et commerciaux et d'autre part indiquait de manière suffisamment complète et précise l'origine et la teneur des pièces et renseignements recueillis par l'administration fiscale dans l'exercice de son droit de communication auprès du juge d'instruction du tribunal de Peronne ; que, contrairement à ce que soutient Mme A, l'administration n'était pas tenue de communiquer d'elle-même, en l'absence de toute demande de la part de la contribuable, lesdites pièces ou copies de celles-ci ;
Considérant, en deuxième lieu, que Mme A n'est pas fondée à invoquer l'absence de réception du pli contenant la proposition de rectification susmentionnée pour soutenir qu'elle aurait été de ce fait privée de la possibilité d'un débat contradictoire, la non-réception de ce pli n'étant pas imputable à l'administration qui doit être regardée comme ayant régulièrement procédé à cette notification ; qu'en tout état de cause, s'agissant des bénéfices industriels et commerciaux faisant l'objet d'une évaluation d'office, l'administration était seulement tenue de l'informer des bases d'impositions qu'elle se proposait de retenir mais n'avait pas l'obligation, avant l'établissement des impositions, d'ouvrir un dialogue contradictoire ;
Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que Mme A était inscrite au registre du commerce et des sociétés de Péronne depuis le 12 mars 1998, ne faisait pas obligation à l'administration fiscale si elle entendait examiner le dossier fiscal de l'intéressée d'engager une procédure de vérification de comptabilité ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas engagé une telle procédure et s'est livrée à un contrôle sur pièces au cours duquel elle a procédé à l'examen critique des déclarations de l'intéressée au regard des pièces et documents obtenus auprès du tribunal de grande instance de Péronne ; que l'administration n'était pas tenue d'aviser Mme A préalablement à l'engagement d'un tel contrôle sur pièces ;
Sur le bien-fondé des impositions litigieuses :
En ce qui concerne la prescription de l'action de l'administration :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales : " Même si les délais de reprise prévus à l'article L. 169 sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une instance devant les tribunaux ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos l'instance et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due " ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que dans le cadre de l'exercice en février 2006 auprès de l'autorité judiciaire du droit de communication prévu à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales, l'administration a eu connaissance d'omissions de déclaration de revenus concernant les années d'imposition litigieuses ; que ces omissions ayant ainsi été révélées par une instance devant les tribunaux, l'administration disposait du délai spécial prévu par les dispositions précitées de l'article L. 170 du livre des procédures fiscales pour les réparer, délai qui n'était pas expiré à la date à laquelle le pli contenant la proposition de rectification en date du 17 octobre 2006 doit être regardé comme régulièrement notifié à sa destinataire, nonobstant son retour à l'expéditeur avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée " ; que, par suite, l'action de l'administration concernant les années 1997, 1999, 2000 et 2001 en litige n'était pas prescrite ;
En ce qui concerne le quotient familial :
Considérant qu'aux termes de l'article 194 du code général des impôts dans sa rédaction applicable " I. A compter de l'imposition des revenus de 1995, le nombre de parts à prendre en considération pour la division du revenu imposable prévue à l'article 193 est fixé comme suit : (...) / Célibataire ou divorcé ayant un enfant à charge = 1,5 (...) / II. Le nombre de parts prévu au I est augmenté de 0,5 pour l'imposition des contribuables célibataires ou divorcés qui vivent seuls et supportent effectivement la charge du ou des enfants, nonobstant la perception d'une pension alimentaire versée pour leur entretien en vertu d'une décision de justice " ;
Considérant que pour bénéficier de la demi-part supplémentaire prévue au II de cet article, le contribuable doit vivre seul et supporter effectivement la charge du ou des enfants ; que l'administration fait valoir qu'il ressort des procès-verbaux d'audition de la personne gardée à vue du 15 juin 2005 et du procès-verbal d'interrogatoire de première comparution du 20 octobre 2005 que Mme A a déclaré " travailler à deux son conjoint et elle-même " ; que les déclarations ainsi faites dont se prévaut l'administration et qui ne sont pas contestées, établissent que la relation de Mme A avec la personne qu'elle désigne elle-même comme son conjoint perdurait depuis le début de son activité professionnelle et n'était pas uniquement professionnelle ; que l'administration doit ainsi être regardée comme apportant la preuve que Mme A ne vivait pas seule durant les années d'imposition en litige ; que Mme A ne réfute pas efficacement les éléments ainsi avancés par l'administration en se bornant à soutenir qu'elle n'est pas mariée et que ces déclarations ont été faites en 2005 ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir qu'ayant un enfant à charge, sa situation lui ouvrait droit non pas à une part et demi comme l'a estimé l'administration mais à deux parts au titre du quotient familial ;
En ce qui concerne l'erreur sur le montant de l'imposition due pour l'année 2001 :
Considérant que, contrairement à ce que soutient Mme A, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2001, procédé à hauteur de 338 euros à une double imposition ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A a été assujettie au titre des années 1997, 1999, 2000 et 2001 ainsi que des pénalités y afférentes ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du 17 décembre 2009 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles Mme A a été assujettie au titre des années 1997, 1999, 2000 et 2001 et les pénalités y afférentes sont remises intégralement à sa charge.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU COMMERCE EXTERIEUR et à Mme Viviane A.
Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
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N°10DA00553