Vu la requête, enregistrée le 21 février 2012 au greffe de la cour, présentée pour la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais, venant aux droits de la société Appia Nord dont le siège est 53 boulevard Faidherbe, BP 966 à Arras cedex (62033), par la SELARL Atéléia ; la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801235 du 14 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Lille, après avoir prononcé un non-lieu partiel, a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des suppléments de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à l'effort de construction auxquels elle a été assujettie au titre des années 2003, 2004 et 2005 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions supplémentaires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Perrine Hamon, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public ;
1. Considérant que la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge des suppléments de taxe d'apprentissage et de participation des employeurs à l'effort de construction auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2003, 2004 et 2005 à l'issue d'une vérification de comptabilité ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation en vigueur au cours des années d'imposition : " Les employeurs, occupant au minimum dix salariés, à l'exception de l'Etat, des collectivités locales et de leurs établissements publics administratifs, assujettis à la taxe sur les salaires prévue à l'article 231 du code général des impôts, autres que ceux qui appartiennent à des professions relevant du régime agricole au regard des lois sur la sécurité sociale pour lesquelles des règles spéciales ont été édictées en application du a du 3 dudit article 231, doivent consacrer des sommes représentant 0,45 % au moins du montant, entendu au sens des règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale, des rémunérations versées par eux au cours de l'exercice écoulé au financement : a) De construction, d'acquisition ou de démolition de logements, d'aménagement ou de remise en état de logements anciens, d'acquisition et d'aménagement de terrains destinés exclusivement à la construction de logements sociaux ; b) De prise en charge temporaire, en cas de difficultés exceptionnelles des emprunteurs, d'une partie des remboursements de prêts immobiliers destinés à l'accession sociale à la propriété ; c) D'aides directes à des personnes physiques pour le changement de logement ou le maintien dans celui-ci et l'accès au logement locatif, de garanties de loyer et charges apportées aux bailleurs ; d) De dépenses d'accompagnement social dans le domaine du logement ; e) D'aides à des organismes agréés d'information du public sur le logement. f) De subventions à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine. (...) " ; qu'aux termes de l'article 235 bis du même code, dans sa version applicable aux années d'imposition concernées : " 1. Conformément aux articles L. 313-1, L. 313-4 et L. 313-5 du code de la construction et de l'habitation, les employeurs qui, au 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des rémunérations, n'ont pas procédé, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat aux investissements prévus à l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation sont, dans la mesure où ils n'ont pas procédé à ces investissements, assujettis à une cotisation de 2 % calculée sur le montant des rémunérations versées par eux au cours de l'année écoulée, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou au titre IV du livre VII du code rural pour les employeurs de salariés visés à l'article L. 722-20 dudit code (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation et de l'article 235 bis du code général des impôts que l'assujettissement à cette participation au taux de 2 % résulte de ce que le contribuable a décidé de ne pas verser la participation prévue à l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation et non de l'appréciation portée, par l'administration, sur un comportement du contribuable qui serait constitutif d'une infraction passible d'une pénalité ; que, par suite, la requérante ne peut utilement soutenir que, pour la part dépassant l'application du taux de 0,45 % , l'administration aurait dû motiver l'imposition à raison de cette participation en application de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) " ;
5. Considérant que la proposition de rectification du 13 décembre 2006 adressée à la société requérante rappelle les textes déterminant l'assiette de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs à l'effort de construction en soulignant que l'assiette de ces taxes est constituée par l'ensemble des rémunérations du personnel, y compris les indemnités de congés payés ; qu'elle indique donc les motifs de droit fondant les redressements ; qu'en outre, elle indique qu'au titre de ces indemnités de congés payés, l'assiette de ces deux taxes doit être majorée forfaitairement de 13,14 % ; que ce taux est explicité par référence, à titre de simplification, au taux de cotisation que doivent acquitter les employeurs du bâtiment à la caisse de congés payés à laquelle ils sont affiliés, la proposition de rectification renvoyant à ce même mode de calcul pour la participation des employeurs à l'effort de construction ; que, dès lors, la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais n'est pas fondée à soutenir que ladite proposition de rectification serait entachée de défaut de motivation ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne le principe de l'imposition :
6. Considérant qu'aux termes de l'article 225 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige et relatif au régime de la taxe d'apprentissage : " La taxe est assise sur les rémunérations, selon les bases et les modalités prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou au titre IV du livre VII du code rural pour les employeurs de salariés visés à l'article L. 722-20 dudit code (...) " ; qu'aux termes de l'article 235 bis du même code, dans sa version applicable aux années d'imposition concernées : " 1. Conformément aux articles L. 313-1, L. 313-4 et L. 313-5 du code de la construction et de l'habitation, les employeurs qui, au 31 décembre de l'année suivant celle du paiement des rémunérations, n'ont pas procédé, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat aux investissements prévus à l'article L. 313-1 du code de la construction et de l'habitation sont, dans la mesure où ils n'ont pas procédé à ces investissements, assujettis à une cotisation de 2 % calculée sur le montant des rémunérations versées par eux au cours de l'année écoulée, évalué selon les règles prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du livre II du code de la sécurité sociale ou au titre IV du livre VII du code rural pour les employeurs de salariés visés à l'article L. 722-20 dudit code (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, applicable au cours des impositions concernées : " Pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire (...) " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions et de celles des articles L. 223-16 du code du travail, devenu l'article L. 3141-30 de ce code, et de l'article D. 732-1 du code du travail devenu l'article D. 3141-29 de ce code, que la circonstance que le service des indemnités de congés payés soit assuré pour le compte d'un employeur par une caisse de congés payés à laquelle il est affilié en exécution des dispositions de l'article L. 223-16 du code du travail, devenu l'article L. 3141-30 de ce code, est sans incidence sur l'assiette de la taxe d'apprentissage et de la participation des employeurs à l'effort de construction ; que, par suite, l'administration était en droit d'inclure, dans l'assiette de la taxe et de la participation en litige, les indemnités de congés payés dues par la requérante à ses salariés ;
7. Considérant que la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais ne peut utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la réponse ministérielle du 14 avril 1976 à M.A..., député, reprise dans l'instruction 5 L-7-76, dont les dispositions sont devenues caduques à la suite de l'entrée en vigueur de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 ; que la circonstance que la doctrine administrative ainsi invoquée n'aurait été expressément rapportée par le ministre chargé du budget que le 17 février 2009 est, en conséquence, inopérante ;
En ce qui concerne le montant de l'imposition :
8. Considérant qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir, ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ;
9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour le calcul des indemnités de congés payés à prendre en compte dans l'assiette des taxes en litige, l'administration s'est livrée pour les années 2004 et 2005 à une évaluation de ces indemnités à hauteur d'un dixième de la rémunération brute totale perçue par les salariés de la société au cours de la période de référence et a, comme il a été dit ci-dessus, prononcé les dégrèvements résultant de cette réduction des bases d'imposition ; que, pour l'année 2003, l'administration a appliqué un taux forfaitaire de 13,14 % ;
10. Considérant que si la société requérante relève que les sommes ainsi retenues par l'administration ne sont pas issues d'une reconstitution des montants des indemnités de congés payés qu'elle aurait versées à ses salariés en l'absence d'affiliation obligatoire à une caisse, elle n'apporte pas, comme elle seule peut le faire, les éléments permettant de procéder à cette reconstitution et qui résultent pourtant de son exploitation ; qu'il suit de là que, faute pour la requérante de fournir des données plus précises, l'administration doit être regardée comme établissant le bien-fondé des impositions restant en litige, sans que la société puisse utilement soutenir que ce mode de détermination du montant des impositions porterait atteinte au principe de sécurité juridique ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
12. Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais doivent, dès lors, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage Travaux Publics Nord/Pas-de-Calais et au ministre de l'économie et des finances.
Copie sera adressée au directeur chargé de la direction de contrôle fiscal Nord.
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N°12DA00299