Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2013, présentée par le préfet du Nord qui demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300040 du 17 avril 2013 du tribunal administratif de Lille en tant qu'il a annulé, par son article 1er, ses décisions du 29 juin 2012 obligeant Mme B...E...C...à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, par son article 2, lui a enjoint de procéder au réexamen de sa situation et, par son article 3, a mis à sa charge la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) de rejeter la demande de Mme C...présentée devant le tribunal administratif de Lille ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 2005/85/CE du Conseil du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration ;
Vu le décret n° 2008-702 du 15 juillet 2008 relatif au droit d'asile ;
Vu le décret n° 2011-1031 du 29 août 2011 relatif aux conditions d'exercice du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer à l'audience ses conclusions ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Marie-Odile Le Roux, président-assesseur ;
1. Considérant que le préfet du Nord relève appel du jugement du 17 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Lille, à la demande de Mme B...E...C..., a, par son article 1er, annulé les décisions du 29 juin 2012 obligeant Mme C...à quitter le territoire français et fixant le pays de destination, par son article 2, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de l'intéressée et, par son article 3, a mis à sa charge une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, par la voie de l'appel incident, Mme C...relève appel du jugement en tant qu'il a, par son article 4, rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 juin 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
Sur l'appel principal :
2. Considérant que, selon les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger relevant d'une catégorie visée par ce texte lorsque notamment la délivrance ou le renouvellement du titre de séjour sollicité lui a été refusé ou que ce titre lui a été retiré ; que l'article R. 313-13 du même code prévoit également que : " En cas de refus de délivrance de tout titre de séjour, l'étranger est tenu de quitter le territoire français " ; qu'il s'ensuit que l'étranger qui sollicite la délivrance d'un titre de séjour ne peut, du fait même de l'accomplissement de cette démarche tendant à son maintien en France, ignorer qu'en cas de refus, il ne peut légalement se maintenir sur le territoire français, qu'il doit en principe prendre l'initiative de quitter le territoire et qu'il est également susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'il est ainsi mis à même, pendant la procédure d'instruction de sa demande de titre de séjour, s'il l'estime utile, de présenter tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu des décisions administratives concernant non seulement son droit au séjour en France, mais aussi son possible éloignement du territoire français ; qu'il n'a pas alors à attendre que l'autorité administrative prenne l'initiative de l'informer expressément qu'en cas de rejet de sa demande de titre de séjour, il serait susceptible d'être contraint de quitter le territoire français, en l'invitant à formuler ses observations sur cette éventualité ; que, dans ces conditions, en s'abstenant de procéder à une telle information préalable, le préfet qui assortit son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français, ne méconnaît pas de ce seul fait le droit de l'étranger, qui est au nombre des principes fondamentaux du droit de l'Union et qui a été rappelé par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union, d'être entendu préalablement à cette mesure ; qu'en outre, et dans l'hypothèse où il aurait été porté atteinte dans une situation donnée au droit d'être entendu ainsi reconnu aux étrangers par le droit de l'Union, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de 1'Union européenne (10 septembre 2013, aff. n° C-383/13) qu'il appartient au juge national chargé de l'appréciation de la légalité de la décision affectée de ce vice d'apprécier dans chaque cas d'espèce si cette violation a effectivement privé celui qui l'invoque de la possibilité de mieux faire valoir sa défense dans une mesure telle que la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent ;
3. Considérant que Mme C...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; qu'elle a donc été mise à même de faire valoir, avant l'intervention de l'arrêté qui lui a refusé la délivrance d'un tel titre et l'a également obligée à quitter le territoire français, tous éléments d'information ou arguments de nature à influer sur le contenu de ces mesures ; qu'elle n'invoque aucun autre élément de nature à établir que son droit à être entendue aurait été méconnu ; que, par suite, en obligeant Mme C...à quitter le territoire français, le préfet du Nord n'a pas méconnu cette garantie, telle qu'elle est consacrée par le droit de l'Union ; que, par suite, le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur ce motif pour annuler la décision faisant obligation de quitter le territoire français ;
4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C...devant la juridiction administrative ;
En ce qui concerne la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié (...) a été définitivement refusé et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre, doit quitter le territoire français " ;
6. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C...aurait pu être autorisée à demeurer sur le territoire français à un autre titre que l'asile, notamment en qualité de salariée, dès lors que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi lui a refusé, le 29 août 2011, l'autorisation de travail prévue par les dispositions de l'article R. 5221-1 du code du travail ; que le préfet du Nord a examiné la situation personnelle de Mme C...avant de l'obliger à quitter le territoire français, alors même qu'il n'a pas mentionné la demande d'autorisation de travail formulée auprès de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi ; que, par suite, le préfet, en obligeant Mme C...à quitter le territoire français, n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant que Mme C...ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 10 paragraphe 1 de la directive du Conseil du 1er décembre 2005, laquelle a été transposée dans le droit national par la loi du 24 juillet 2006 et les décrets du 15 juillet 2008 et du 29 août 2011, antérieurement à la décision en litige ;
8. Considérant que la circonstance qu'un étranger qui sollicite son admission au séjour au titre de l'asile n'aurait pas reçu l'ensemble des informations prévues par le a) du paragraphe 1 de l'article 10 de la directive du Conseil du 1er décembre 2005 ainsi que par l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend, ne peut être utilement invoquée à l'appui de conclusions mettant en cause la légalité de la décision par laquelle le préfet statue, en fin de procédure, après intervention de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, après celle de la Cour nationale du droit d'asile, sur son droit au séjour en France au titre de l'asile ou à un autre titre ; que, par suite, le moyen ainsi invoqué est inopérant, à l'encontre de la mesure obligeant Mme C...à quitter le territoire ;
9. Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 741-1, L. 742-3 et R. 733-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile ;
10. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 23 mars 2012 de la Cour nationale du droit d'asile, rejetant le recours de MmeC..., lui a été notifiée par voie postale, conformément à l'article R. 733-20 du code précité, le 5 avril 2012 ; qu'ainsi, le préfet du Nord justifie, par la production de la copie de l'avis de réception de la décision de la cour, de cette notification ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Nord aurait méconnu les dispositions des articles L. 741-1, L. 742-3 et R. 733-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
11. Considérant que MmeC..., née 14 novembre 1989, déclare être entrée en France, sans l'établir, le 13 septembre 2010 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait établi en France le centre de ses intérêts personnels et familiaux ; qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays d'origine où résident ses parents ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision l'obligeant à quitter le territoire ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant que les allégations selon lesquelles Mme C...aurait fui son pays pour échapper aux sévices et mauvais traitements que lui aurait infligés son conjoint, polygame, à qui elle a été mariée de force par ses parents, ne sont pas de nature, à elles seules, à établir qu'elle encourrait un risque d'être soumise à des traitements inhumains et dégradants au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Nord est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé ses décisions faisant obligation à l'intéressée de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de cette mesure, lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de l'intéressée et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Sur les conclusions en appel de MmeC... et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité :
14. Considérant que la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié au soutien de ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour en qualité de réfugié ;
15. Considérant que pour les mêmes raisons que ce qui a été dit aux points 7 et 8, les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 10 paragraphe 1 de la directive du Conseil du 1er décembre 2005 et des dispositions de l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être rejetés comme inopérants ;
16. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 10, le préfet du Nord justifie, par la production de la copie de l'avis de réception de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, de la notification de cette décision à l'intéressée ; que, par suite, Mme C...n'est pas fondée à soutenir, en tout état de cause, que le préfet du Nord aurait méconnu les dispositions de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
17. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique :
18. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme C...demande sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1er, 2 et 3 du jugement du 17 avril 2013 du tribunal administratif de Lille sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par Mme C...devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de la décision du préfet du Nord lui faisant obligation de quitter le territoire français est rejetée.
Article 3 : Les conclusions en appel de Mme C...sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...E...C..., au ministre de l'intérieur et à Me A...D....
Copie sera adressée pour information au préfet du Nord.
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N°13DA00776