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17/02/2015 | FRANCE | N°13DA00405

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 17 février 2015, 13DA00405


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2013, présentée pour la société Soneram, société anonyme, dont le siège est 10 rue de la Poterne, Espace du Palais à Rouen (76008), représentée par Me D...C..., liquidateur judiciaire, par Me B...A... ; la société Soneram demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001611 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des ann

es 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions ;

3°) de me...

Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2013, présentée pour la société Soneram, société anonyme, dont le siège est 10 rue de la Poterne, Espace du Palais à Rouen (76008), représentée par Me D...C..., liquidateur judiciaire, par Me B...A... ; la société Soneram demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1001611 du 24 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités correspondantes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, premier conseiller,

- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public,

- les observations de Me Valérie Rouillon, avocate de la société Soneram ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'évaluation des travaux en cours :

1. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...) 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. Les travaux en cours sont évalués au prix de revient " ; qu'aux termes de l'article 38 nonies de l'annexe III de ce code : " 1. Les marchandises, matières premières, matières et fournitures consommables, emballages perdus, produits en stock et productions en cours au jour de l'inventaire sont évalués pour leur coût de revient, qui s'entend : (...) b. Pour les biens produits par l'entreprise, du coût de production qui comprend les coûts directement engagés pour la production ainsi que les frais indirects de production variables ou fixes et des coûts d'emprunt dans les conditions prévues à l'article 38 undecies (...). 2. Le coût des stocks est déterminé par l'identification spécifique des coûts individuels, fournis par la comptabilité analytique ou, à défaut, par des calculs ou évaluations statistiques " ;

2. Considérant que la société Soneram a procédé à l'évaluation des travaux en cours, correspondant à la fabrication de quatre machines outils destinées à des sociétés espagnoles, à partir d'un logiciel informatique prenant en compte, pour chaque machine les achats réalisés et un nombre d'heures de travail ; qu'en l'absence de comptabilité analytique de ces travaux, faisant notamment ressortir les frais indirects de production, l'administration a pu, à bon droit, compte tenu de ces insuffisances, remettre en cause cette évaluation, sans qu'il lui soit nécessaire, au préalable, de rejeter la comptabilité de l'entreprise ;

3. Considérant que pour évaluer le prix de revient réel des machines outils en cours de fabrication, l'administration s'est fondée sur les acomptes facturés par la société requérante à ses clients et a retenu un taux de marge estimé sur la base des taux constatés pour la vente de machines outils à des clients espagnols lors de l'exercice précédent ; que si la faculté de déterminer le coût de revient des travaux en cours au montant des acomptes réclamés au client avant facturation est ouverte, en vertu de l'article 4 LA de l'annexe IV du code général des impôts, aux sociétés qui tiennent une comptabilité super-simplifiée, il ne résulte pas de l'instruction que la méthode d'évaluation retenue par l'administration, alors même que la société Soneram ne tient pas une telle comptabilité, soit inadaptée aux conditions d'exploitation de l'entreprise ; qu'en outre, la société Soneram n'apporte aucun élément précis de nature à remettre en cause la pertinence de l'évaluation ainsi réalisée par l'administration ;

En ce qui concerne les charges de sous-traitance :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1°) Les frais généraux de toute nature (...) " ;

5. Considérant que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

6. Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou des biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

7. Considérant que la société Soneram a produit des factures émises par la société Sismatron et correspondant à des charges salariales supportées par la société requérante qui a réglé les salaires des employés de cette dernière société ; que le ministre, qui ne conteste pas la régularité formelle de ces factures, ni le fait qu'elles aient été effectivement comptabilisées dans les charges de la société Soneram, se borne à faire valoir, alors que la demande d'assistance administrative effectuée auprès des autorités espagnoles avait démontré que la société Sismatron avait une existence réelle au cours des années en litige et que les documents comptables produits au dossier établissent que cette société réalisait un chiffre d'affaires important, que l'existence de relations commerciales entre les deux sociétés n'était pas avérée ; que ce seul élément de fait, fortement contesté par la société requérante dont les précisions données tant sur les liens qu'elle entretient avec la société Sismatron que sur la justification de la prise en charge des salaires des employés de la société espagnole n'ont pas été utilement contredites par le ministre, ne permet pas à l'administration de considérer que les charges en cause n'ont pas été effectivement exposées par la société requérante ; que la société Soneram est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré dans ses résultats imposables des années 2004 et 2005 les sommes de 157 848 euros et 440 187 euros ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Soneram est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen ne lui a pas accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés à raison des redressements portant sur des sommes de 157 848 euros et 440 187 euros au titre des années 2004 et 2005 ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la société Soneram et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La base de l'impôt sur les sociétés assignée à la société Soneram au titre des années 2004 et 2005 est réduite, respectivement, d'une somme de 157 848 euros et de 440 187 euros.

Article 2 : La société Soneram est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des pénalités les assortissant correspondant à cette réduction des bases d'imposition.

Article 3 : Le jugement n° 1001611 du tribunal administratif de Rouen du 24 janvier 2013 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à la société Soneram au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de la société Soneram est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Me D...C..., liquidateur judiciaire de la société Soneram et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

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