Vu la requête, enregistrée le 5 septembre 2013, présentée pour la société SA Saint Judist, dont le siège est zone industrielle à Saint-Just-en Chaussée (60130), par Me B...A...; la société SA Saint Judist demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 1101774-1200416-1201053 du 27 juin 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à la restitution des sommes de 17 561 euros, 33 518 euros et 7 728 euros qu'elle a acquittées au titre de la contribution pour une pêche durable pour, respectivement, les périodes du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008, du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 et du 1er janvier 2011 au 30 juin 2011 ;
2°) de prononcer la restitution de ces impositions ;
3°) le cas échéant, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne une question préjudicielle relative à la validité de l'imposition en litige au regard des aides d'Etat ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité instituant la Communauté européenne ;
Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, modifiée ;
Vu la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Daniel Mortelecq, président,
- les conclusions de M. Vladan Marjanovic, rapporteur public ;
1. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne, alors applicable, devenu l'article 107 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions " ; qu'aux termes de l'article 88 du même traité, alors applicable, devenu l'article 108 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : " 1. La Commission procède avec les Etats membres à l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces Etats. (...) / 2. Si (...) la Commission constate qu'une aide accordée par un Etat ou au moyen de ressources d'Etat n'est pas compatible avec le marché commun aux termes de l'article 87 (...) elle décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier (...) / 3. La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, s'il relève de la compétence exclusive de la Commission de décider, sous le contrôle de la Cour de justice de l'Union européenne, si une aide de la nature de celles visées par l'article 87 du traité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par le traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l'invalidité des dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l'obligation de notifier à la Commission le projet, préalablement à toute mise à exécution ;
2. Considérant qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, d'une part, que les taxes n'entrent pas dans le champ d'application des stipulations précitées du traité concernant les aides d'Etat, à moins qu'elles ne constituent le mode de financement d'une mesure d'aide, de sorte qu'elles font partie intégrante de cette mesure, d'autre part, que, pour que l'on puisse juger qu'une taxe, ou une partie d'une taxe, fait partie intégrante d'une mesure d'aide, il doit exister un lien d'affectation contraignant entre la taxe et l'aide en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe est nécessairement affecté au financement de l'aide ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 302 bis KF du code général des impôts, issu de l'article 60 de la loi de finances rectificative pour 2007 du 25 décembre 2007, applicable du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2011, instituant une contribution pour une pêche durable : " Les ventes en France métropolitaine à des personnes autres que des personnes assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée agissant en tant que telles, de poissons, crustacés, mollusques et autres invertébrés marins, ainsi que de produits alimentaires dont le poids comporte pour plus de 30 % de tels produits de la mer sont soumises à une taxe. / La taxe ne s'applique pas aux huîtres et aux moules. / La liste des poissons, crustacés, mollusques ou invertébrés marins visés au premier alinéa est fixée par arrêté. / La taxe est calculée au taux de 2 % sur le montant hors taxe des ventes des produits visés au premier alinéa. / La taxe est due par les personnes dont le chiffre d'affaires de l'année précédente a excédé le premier des seuils mentionnés au I de l'article 302 septies A. / Le fait générateur et l'exigibilité de la taxe interviennent dans les mêmes conditions que celles applicables en matière de taxe sur la valeur ajoutée. La taxe est constatée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe " ;
4. Considérant qu'en vertu du principe à valeur constitutionnelle d'universalité budgétaire résultant des dispositions de l'article 2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, les recettes et les dépenses doivent figurer au budget de l'Etat pour leur montant brut, sans être contractées, et l'affectation d'une recette déterminée à la couverture d'une dépense déterminée est interdite, sous réserve des exceptions prévues par le deuxième alinéa de l'article 2 et le quatrième alinéa de l'article 6 de la même loi ;
5. Considérant, qu'eu égard à ce principe et aux dispositions précitées de l'article 302 bis KF du code général des impôts, et sans qu'il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires dont est issu l'article 60 de la loi de finances rectificative pour 2007 du 25 décembre 2007, ni aux différentes prises de position publiques exprimées par les autorités françaises, il n'existait aucun lien d'affectation contraignant entre la contribution pour une pêche durable et le plan d'action en quinze mesures pour une pêche durable et responsable ou une des mesures de ce plan ; que cette contribution constituait une recette du budget général dépourvue de tout lien avec le budget du ministère en charge de la pêche et la dotation inscrite à ce dernier budget servant à financer le plan d'action pour une pêche durable ; qu'il n'y avait pas de rapport entre le produit de la contribution en cause et le montant des financements publics consacrés au plan pour une pêche durable et responsable ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient la société SA Saint Judist, les dispositions de l'article 302 bis KF du code général des impôts instaurant la contribution pour une pêche durable n'ont pas été édictées en méconnaissance de l'obligation, prévue par l'article 88 paragraphe 3 du traité instituant la Communauté européenne devenu l'article 108 paragraphe 3 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de notification préalable de ce régime d'imposition à la Commission européenne ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, la société SA Saint Judist n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société SA Saint Judist est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société SA Saint Judist et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
''
''
''
''
4
N°13DA01504