Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée Déclic Auto a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2006 au 31 mars 2008 et des pénalités y afférentes, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1101136 du 12 décembre 2013, le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge sollicitée et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par un recours enregistré le 30 janvier 2014, le ministre délégué chargé du budget demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 12 décembre 2013 ;
2°) de remettre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les pénalités en litige à la charge de la SARL Déclic Auto.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Maryse Pestka, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Déclic Auto a déclaré exercer une activité d'intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui consistant à mettre des particuliers français, désireux d'acquérir des véhicules automobiles d'occasion, en relation avec des sociétés espagnoles et polonaises proposant de tels véhicules à la vente ; qu'elle a déclaré percevoir à raison de cette activité des commissions sur ventes, prestations intracommunautaires donnant lieu à auto liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée et à récupération immédiate ; qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont la SARL Déclic Auto a fait l'objet et qui a porté en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er janvier 2006 au 31 mars 2008, l'administration a remis en cause le caractère transparent de l'activité d'intermédiaire déclarée par cette société, estimant que celle-ci avait, en réalité, agi en son nom propre et qu'elle devait ainsi être regardée comme un intermédiaire opaque, assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée sur le montant total du prix auquel les véhicules fournis étaient vendus aux particuliers français ; qu'elle a, en conséquence, mis à la charge de la SARL Déclic Auto des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 2006 au 31 mars 2008 et assorti ces suppléments de la pénalité prévue à l'article 1729 du code général des impôts en cas de manoeuvres frauduleuses ; que le ministre délégué chargé du budget relève appel du jugement du 12 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a prononcé la décharge de ces impositions et pénalités et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. / (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour retenir que la SARL Déclic Auto ne s'était pas comportée, au cours de la période vérifiée, comme un intermédiaire transparent agissant au nom et pour le compte d'autrui, l'administration a estimé que, en dépit des termes des contrats de mandat conclus par la SARL Déclic Auto avec ses clients français, qui donnaient pouvoir à celle-ci de rechercher, de commander, et d'effectuer au nom de ces derniers toutes les prestations nécessaires pour parvenir à l'achat et à l'importation du produit recherché, les conditions d'exploitation observées au cours des opérations de vérification de comptabilité et les éléments recueillis dans le cadre de l'assistance administrative internationale avaient permis d'établir que la SARL Déclic Auto n'apparaissait pas, tant à l'égard de ses fournisseurs de véhicules de l'Union européenne que de ses clients, comme un mandataire transparent, mais que ces constatations et éléments d'information révélaient que cette société avait, en réalité, agi à leur égard en son nom propre, se comportant ainsi comme un intermédiaire opaque ; que, ce faisant, l'administration n'a aucunement écarté les contrats de mandat comme présentant un caractère fictif, ni même comme ayant été conclus dans le but exclusif d'éluder ou d'atténuer l'impôt, mais a seulement entendu donner à ces actes, compte tenu des faits portés à sa connaissance, une qualification différente de celle adoptée par le contribuable ; qu'à la suite de cette qualification, le service n'a été amené à écarter une partie des factures émises par un fournisseur espagnol qu'après avoir constaté que ce dernier avait recours à une pratique de double facturation et sans toutefois remettre en cause la réalité même des ventes de véhicules effectivement conclues avec la SARL Déclic Auto ; qu'il suit de là que le ministre est fondé à soutenir que, pour prononcer la décharge des impositions en litige, le tribunal administratif d'Amiens a estimé à tort que l'administration avait implicitement mais nécessairement invoqué un abus de droit et que, faute pour le vérificateur d'avoir avisé la SARL Déclic Auto de ce qu'elle avait la possibilité de saisir le comité consultatif pour la répression des abus de droit, ces impositions avait été établies à l'issue d'une procédure irrégulière ;
4. Considérant qu'il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par la SARL Déclic Auto devant le tribunal administratif d'Amiens ;
Sur l'application de la loi fiscale :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / (...) / V. L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés " ; qu'aux termes de l'article 256 bis de ce code : " (...) / III. Un assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une acquisition intracommunautaire, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien " et qu'aux termes de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : / (...) / b. Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : / Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 et au III de l'article 256 bis ; / (...) " ;
6. Considérant que, si, comme il a été dit au point 3, la SARL Déclic Auto établissait des contrats de mandat avec ses clients français, il résulte des copies de ces documents que ceux-ci, s'ils comportent une mention expresse selon laquelle la SARL Déclic Auto agit en tant que mandataire transparent, ne précisent ni le taux, ni le montant de la commission censée rémunérer cette entremise ; que ces contrats présentent, en revanche, la mention d'une provision calculée sur le prix de vente du véhicule recherché ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que le service vérificateur a constaté que les factures d'achat de véhicules d'occasion établies par les fournisseurs espagnols et polonais au nom des clients finaux français et produites par la SARL Déclic Auto ne font pas mention de l'intervention de cette dernière en tant que mandataire ; que ces factures indiquent l'application du régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévu à l'article 297 A du code général des impôts, alors que ces fournisseurs s'approvisionnaient auprès de sociétés établies dans d'autres Etats de l'Union européenne et ayant bénéficié d'un droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée et qui mettaient, en réalité, directement ces biens à la disposition de la SARL Déclic Auto, qui en prenait livraison ; que les éléments dont le service a pris connaissance dans le cadre de l'exercice de l'assistance internationale lui ont permis de constater, d'une part, que les virements internationaux mentionnaient cette dernière société comme acquéreur des véhicules et, d'autre part, que celle-ci s'engageait annuellement auprès de ses fournisseurs à acquérir un nombre donné de véhicules en contrepartie de l'obtention de tarifs plus avantageux ; qu'enfin, les acquéreurs finaux des véhicules, dont certains ont signé un mandat de recherche concernant un véhicule se trouvant déjà dans les locaux de la SARL Déclic Auto, réglaient le prix d'acquisition et la commission à cette dernière ; que, dans ces conditions, l'administration, après avoir relevé que les modalités d'exploitation de la SARL Déclic Auto, telles qu'elles avaient été révélées lors du contrôle, permettaient d'établir que cette société avait agi, au cours de la période vérifiée, non en tant qu'intermédiaire transparent pouvant prétendre au bénéfice du régime de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge prévu à l'article 297 A du code général des impôts, mais comme un intermédiaire opaque, a mis à bon droit à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée calculés, conformément aux dispositions précitées de l'article 266 de ce code, sur le montant total des transactions réalisées au cours de la période considérée ;
Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale :
7. Considérant que les paragraphes 78 à 81 de l'instruction 3 CA-92 du 31 juillet 1992 ne comportent aucune interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application ; que la SARL Déclic Auto ne saurait donc s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a accordé à la SARL Déclic Auto la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige et des pénalités y afférentes ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, au titre des frais exposés par la SARL Déclic Auto et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 12 décembre 2013 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels la SARL Déclic Auto a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2006 au 31 mars 2008 et les pénalités y afférentes sont remis à sa charge.
Article 3 : Les conclusions présentées par la SARL Déclic Auto au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à la société à responsabilité limitée Déclic Auto.
Copie sera adressée au directeur chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
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N°14DA00185