Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 septembre 2012, notifiée par la directrice des études, par laquelle le jury d'établissement de l'Université de technologie de Compiègne a prononcé sa réorientation et ne l'a pas autorisée à poursuivre le cycle d'études d'ingénieur au sein de cet établissement.
Par un jugement n° 1203093 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 28 mai 2015 et 30 novembre 2015, Mme A..., représentée par Me D...E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 11 septembre 2012 ;
3°) d'enjoindre au président de l'Université de technologie de Compiègne (UTC) de procéder à sa réintégration au sein du cursus de génie mécanique de cet établissement, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve d'une astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'UTC une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1990, sous réserve que le conseil de l'intéressée renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- son éviction et les conditions dans lesquelles cette décision a été prise révèlent un traitement discriminatoire de la part de l'Université ;
- il existe une rupture d'égalité avec les autres étudiants inscrits au département génie mécanique de l'université ;
- la décision de réorientation en litige constitue une sanction déguisée ;
- en ne l'autorisant pas à poursuivre son cursus, l'administration a entaché sa décision de réorientation d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 26 août 2015 et 22 décembre 2015, l'Université de technologie de Compiègne, représentée par la SELARL Delahousse et associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de Mme A...de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est tardive ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mars 2015 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai désignant Me D...E....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Hadi Habchi, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,
- les observations Me B...F..., représentant l'Université de technologie de Compiègne.
1. Considérant qu'aux termes du règlement intérieur des études d'ingénieur de l'Université de technologie de Compiègne, approuvé le 6 octobre 2011 par le conseil d'administration de l'établissement : " (...) / Article III-5 : " A la fin d'un semestre, le jury de l'UV examine le cas de chaque étudiant inscrit à l'UV et décide : de l'attribution de l'UV ; de la non attribution de l'UV. (...) / La non attribution de l'UV est décidée avec l'une des deux mentions (...) en cas d'insuffisance : FX = INSUFFISANT (un effort supplémentaire aurait été nécessaire pour réussir l'UV) ; F INSUFFISANT (un travail supplémentaire considérable aurait été nécessaire) / (...) / La non attribution de l'UV pour absence est décidée en cas d'absence non justifiée de l'étudiant soit à l'examen final, soit à l'une ou plusieurs des modalités d' évaluation dont la somme des pondérations dans l'évaluation finale représente un pourcentage égal ou supérieur à 50 %. / En cas de circonstance prouvée par justificatif, ayant entraîné pour un étudiant l'incapacité de participer valablement l'une ou plusieurs des modalités d'évaluation, le jury peut décider d'une mise en réserve de l'UV et de subordonner son obtention soit à une épreuve, soit à un travail supplémentaire (...). / L'étudiant doit faire le nécessaire pour que la réserve de l'UV soit impérativement levée dans un délai maximum d'un mois après la rentrée du semestre suivant, faute de quoi la réserve est transformée en " non attribution " définitive (...) " ; qu'aux termes de l'article III-7 du même règlement, intitulé " jury de suivi des études " : " A la fin de chaque semestre, après les résultats des diverses UV, un jury de suivi des études examine le profil de formation de chaque étudiant et peut prendre l'une des décisions suivantes : (...) poursuites avec réserves : dans ce cas, le jury indiquera clairement à l'étudiant, la nature des réserves, ainsi que les objectifs à atteindre au cours du semestre suivant ; / orientation vers des études différentes (...) ; exclusion assortie de conseils de réorientation. / (...) / Le jury de suivi peut annuler le semestre en cas de circonstances exceptionnelles prouvées / (...) " ; que, selon les termes de l'article III-8 de ce règlement intitulé " jury d'établissement ": " Tout étudiant concerné par une décision de réorientation ou d'exclusion, ou son conseiller, peut demander le réexamen de sa situation par le jury d'établissement (...) / Le jury d'établissement prend l'une des décisions suivantes : / réorientation vers une autre formation de l'établissement , / réorientation vers un autre établissement (...,) / exclusion de l'établissement, / (...) " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que MmeA..., née le 29 avril 1961, étudiante en formation continue en génie mécanique, a été admise à s'inscrire en cycle terminal de la formation d'ingénieur au sein de l'Université de technologie de Compiègne (UTC), à compter du semestre d'hiver 2010 / 2011 ; qu'à l'issue de ce premier semestre, le jury de suivi mentionné au point 1 l'a alertée sur ses mauvais résultats universitaires et a décidé de sa poursuite d'études avec réserves ; qu'après avoir effectué un second semestre d'études jusqu'à l'automne 2011, au cours duquel aucune matière scientifique n'a été validée, Mme A...a fait l'objet d'une décision d'exclusion de ce cursus ; que, toutefois, sur recours de l'intéressée, qui a fait valoir sa situation familiale et ses problèmes de santé, le jury d'établissement mentionné au point 1, l'a réintégrée dans le cursus de génie mécanique, en conditionnant sa poursuite d'études à l'obtention d'unités de valeur scientifiques à la session d'examens du printemps 2012, ainsi que le permettent les dispositions du III-7 du règlement intérieur des études ; qu'à l'issue d'un troisième semestre d'études achevé à l'été 2012, le jury d'établissement, après avoir constaté l'insuffisance des résultats de l'étudiante dans une majorité d'unités de valeur scientifiques, a prononcé sa " réorientation " ; qu'il n'est pas contesté par Mme A...qu'elle a obtenu une majorité de notations " F " -insuffisant, cette mention étant assortie au règlement cité au point précédent du commentaire suivant : " un travail supplémentaire considérable aurait été nécessaire " -, à l'exception des unités de valeur dans les matières d'économie, d'ergonomie, de langues étrangères et de communication, qui lui ont été attribuées ; qu'en estimant, au vu des résultats insuffisants obtenus par Mme A...dans les principales matières scientifiques (mécanique des solides et des vibrations, acoustique, modélisation géométrique et connaissance des polymères), que l'étudiante ne pouvait se maintenir à l'issue de trois semestres d'études au sein du cycle terminal de la formation d'ingénieur poursuivie, le jury d'établissement n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
3. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit au point 2, le jury d'établissement qui a prononcé sa réorientation au regard de l'appréciation des mérites universitaires de l'étudiante ne lui a pas infligé une sanction administrative ;
4. Considérant que, contrairement à ce qu'affirme l'appelante, le jury d'établissement n'était pas tenu de procéder à l'annulation d'un ou plusieurs semestres suivis, pour des motifs exceptionnels, dès lors que cette faculté est laissée à l'appréciation souveraine du jury, en application des dispositions de l'article III-7 citées au point 1 ; que les absences pour arrêt de maladie, qui n'ont entraîné aucune hospitalisation et les raisons familiales invoquées par l'étudiante ne sont pas de nature à fonder, en l'espèce, des motifs exceptionnels au regard du règlement des études d'ingénieur, qui devaient conduire l'administration à prononcer l'annulation des semestres d'études ; qu'il ressort en outre des pièces versées au dossier que les personnels de l'établissement, notamment son référent universitaire, ont tenté, à plusieurs reprises, de la soutenir dans l'accomplissement de son cursus ; qu'ainsi, les diverses circonstances qu'invoque Mme A...ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'une pratique discriminatoire à son encontre de la part de l'Université de technologie de Compiègne ;
5. Considérant que le moyen tiré d'une rupture d'égalité entre les étudiants n'est pas établi ;
6. Considérant qu'il ne ressort pas davantage des termes de la décision en litige, ni des autres pièces du dossier, et ce, en dépit d'un courriel du 24 mai 2012 du responsable du département génie mécanique, aux termes peu appropriés, parmi un important ensemble d'échanges intervenus entre l'intéressée, l'administration ou le corps enseignant, que l'UTC aurait agi sur le fondement de considérations étrangères aux résultats universitaires de l'étudiante ou à son aptitude à poursuivre le cycle terminal de la formation d'ingénieur ; que, par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
7. Considérant que l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de l'erreur manifeste que le jury d'établissement qui a pris en compte les mérites de l'étudiante aurait pu commettre dans l'appréciation des conséquences de la mesure en litige sur sa situation personnelle ; qu'enfin, et en tout état de cause compte tenu notamment des possibilités de rattrapage qui lui ont été offertes pendant son cursus à l'UTC, un tel moyen n'est pas, dans les circonstances de l'espèce, davantage fondé ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'université, que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme A...une somme de 200 euros à verser à l'Université de technologie de Compiègne sur le même fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Mme A...versera une somme de 200 euros à l'Université de technologie de Compiègne sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et à l'Université de technologie de Compiègne.
Délibéré après l'audience publique du 4 février 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 25 février 2016.
Le rapporteur,
Signé : H. HABCHILe premier vice-président de la cour,
président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°15DA00866 6