Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...E...a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 janvier 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.
Par un jugement n° 1501651 du 7 août 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2015, M.E..., représenté par Me A...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 août 2015 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité externe du fait d'une absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle contrevient aux stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision faisant obligation de quitter le territoire contrevient aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2015, le préfet de l'Eure conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E...ne sont pas fondés.
M. E...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 septembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M.E..., ressortissant de la République démocratique du Congo déclarant être entré irrégulièrement en France le 8 mai 2004, après avoir vu sa demande d'asile rejetée par une décision du 29 janvier 2004 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 17 janvier 2005 de la Commission de recours des réfugiés, a sollicité le 13 novembre 2014 la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il relève appel du jugement du 7 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 janvier 2015 du préfet de l'Eure refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office ;
Sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
2. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
3. Considérant que M.E..., par les pièces qu'il produit, n'établit sa résidence en France qu'au titre des années 2004 et 2005 et à compter de 2013 ; que, s'il est constant qu'il est père de deux jumelles nées le 16 septembre 2014 de la liaison qu'il entretient depuis le début de l'année 2013 avec MmeD..., compatriote titulaire d'une carte de séjour " vie privée et familiale " en qualité de parent d'un enfant français né d'une union précédente, ses liens personnels et familiaux en France ne peuvent être regardés comme intenses stables et anciens dès lors qu'il n'établit aucune insertion dans la société française, qu'il est dépourvu de toutes ressources, que ses conditions de vie pendant plusieurs années sur le territoire français sont ignorées et que sa liaison avec une compatriote est très récente ; qu'en ce qui concerne l'enfant français de Mme D..., aucune pièce n'établit l'existence d'une relation affective ou d'une contribution de son père à son entretien ou à son éducation ; que le requérant n'établit pas non plus être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a lui-même habituellement vécu jusqu'à l'âge de trente ans et où demeurent... ; que dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de M.E..., l'arrêté du 28 janvier 2015 du préfet de l'Eure n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et ne méconnaît pas, ainsi, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'est pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent utilement être invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
5. Considérant que le refus de titre de séjour en litige n'implique pas la séparation durable de la famille ni la rupture des liens entre le requérant, ses enfants et l'enfant français de la compagne de M.E... ; qu'il existe, en l'espèce, des possibilités de reconstitution de la cellule familiale en République démocratique du Congo, pays dont le requérant et sa compagne possèdent la nationalité, dans la mesure où aucune pièce ne démontre l'existence de liens affectifs entre l'enfant français de sa compagne et le père de nationalité française de cet enfant ; qu'aucune pièce n'établit, ainsi, la réalité de la contribution de son père à son entretien ou son éducation ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
6. Considérant que M. E...ne fait dès lors état d'aucune circonstance de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, en prenant l'arrêté en cause le préfet de l'Eure n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de ces dispositions ;
Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
7. Considérant qu'ainsi qu'il est dit aux points 3 à 5, la décision contestée ne contrevient ni aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni à celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E..., à Me A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.
Délibéré après l'audience publique du 9 juin 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Paul-Louis Albertini, président de chambre,
- M. Olivier Nizet, président-assesseur,
- M. Jean-Jacques Gauthé, premier conseiller.
Lu en audience publique le 23 juin 2016.
Le rapporteur,
Signé : J.-J. GAUTHÉLe président de chambre,
Signé : P.-L. ALBERTINILe greffier,
Signé : I. GENOT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Isabelle Genot
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N°15DA01733
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