Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le maire de la commune d'Hazebrouck a demandé au tribunal administratif de Lille de déclarer M. D... Dassonneville démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal.
Par un jugement n° 1510220 du 8 janvier 2016, le tribunal administratif de Lille a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2016 et le 9 mai 2016, M. Dassonneville, représenté par Me E...G..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 8 janvier 2016 ;
2°) de mettre à la charge de la commune d'Hazebrouck une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- si la participation à une commission d'appel d'offres fait partie des fonctions attribuées par la loi aux élus municipaux, la commission d'appel d'offres du 12 novembre 2015 ne pouvait délibérer à nouveau sur l'appel d'offres du marché de fourniture d'équipements de protections individuelles destinées au fonctionnement des services municipaux de la commune dans la mesure où celle-ci avait émis lors d'une précédente réunion du 21 octobre 2015 un avis défavorable sur l'attribution de ce marché ;
- il ne pouvait se libérer pour assister à cette réunion de commission d'appel d'offres dès lors qu'il devait remplir ses fonctions de conseiller communautaire à la communauté de communes de Flandre intérieure et de Flandre-Lys ;
- il justifie ainsi d'une excuse valable lui permettant de s'exonérer de sa participation à cette commission d'appel d'offres.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 avril 2016 et le 6 juin 2016, le maire de la commune d'Hazebrouck, représenté par Me A...C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. Dassonneville une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- M. Dassonneville a refusé de siéger à la réunion de la commission d'appel d'offres du 12 novembre 2015 qui avait pour but de faire respecter les compétences qui lui sont dévolues ;
- la commission avait, lors d'une précédente réunion du 21 octobre 2015, outrepassé ses compétences en refusant de procéder à l'analyse des offres opérée par le pôle marchés publics de la commune et en exigeant de diminuer le montant des besoins afin de mettre en oeuvre une procédure adaptée ;
- l'intéressé, qui entend favoriser les entreprises locales, a montré une volonté de blocage des missions confiées à la commission d'appel d'offres et de ne plus remplir les fonctions qui lui sont dévolues par la loi en qualité de conseiller municipal ;
- il ne justifie d'aucune excuse valable pour ne pas siéger à la commission d'appel d'offres du 12 novembre 2015 ;
- il n'est pas fondé à se prévaloir de ce qu'il assistait à une autre réunion dans le cadre de ses fonctions de délégué communautaire dans la mesure où il n'est pas établi qu'il exerce ces fonctions.
La procédure a été communiquée au ministre de l'intérieur qui n'a pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code électoral ;
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Muriel Milard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,
- et les observations de Me H...C..., représentant la commune d'Hazebrouck.
1. Considérant que le maire de la commune d'Hazebrouck a saisi le tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à ce que les premiers juges prononcent la démission d'office de M. Dassonneville, conseiller municipal, sur le fondement des dispositions des articles L. 2121-5 et R. 2121-5 du code général des collectivités territoriales ; que M. Dassonneville relève appel du jugement du tribunal administratif de Lille du 8 janvier 2016 qui l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune d'Hazebrouck ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales : " Tout membre d'un conseil municipal qui, sans excuse valable, a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois, est déclaré démissionnaire par le tribunal administratif. / Le refus résulte soit d'une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur, soit de l'abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation. / Le membre ainsi démissionnaire ne peut être réélu avant le délai d'un an. " ; qu'aux termes de l'article R. 2121-5 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 2121-5, la démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif. / Le maire, après refus constaté dans les conditions prévues par l'article L. 2121-5 saisit dans le délai d'un mois, à peine de déchéance, le tribunal administratif. / Faute d'avoir statué dans le délai fixé à l'alinéa précédent, le tribunal administratif est dessaisi. Le greffier en chef en informe le maire en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois, à peine de déchéance, pour saisir la cour administrative d'appel. / Lorsque le tribunal administratif prononce la démission d'un conseiller municipal, le greffier en chef en informe l'intéressé en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois pour se pourvoir devant la cour administrative d'appel. / La contestation est instruite et jugée sans frais par la cour administrative d'appel dans le délai de trois mois. " ;
Sur les conclusions du maire de la commune d'Hazebrouck :
3. Considérant que lorsqu'il saisit le tribunal administratif d'une demande de démission d'office d'un membre du conseil municipal, le maire agit en tant qu'autorité de l'Etat ; que seul le ministre de l'intérieur a ainsi qualité pour représenter l'Etat dans la présente instance d'appel ; que, par suite, le mémoire présenté devant la cour par le maire de la commune d'Hazebrouck doit être regardé comme un mémoire en intervention présenté à l'appui des conclusions du ministre ; que le ministre de l'intérieur n'ayant pas produit de mémoire, l'intervention du maire de la commune d'Hazebrouck ne peut être admise ;
Sur le fond :
4. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 22 du code des marchés publics que les commissions d'appel d'offres sont notamment composées pour les communes, et selon leur taille, de trois ou cinq membres du conseil municipal élus en son sein ; que, par suite, les fonctions de membres de ces commissions confiées par le maire à des membres du conseil municipal comptent parmi les fonctions qui leur sont dévolues par les lois au sens de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales cité au point 2 ; que le conseiller municipal concerné ne peut se soustraire à l'obligation de remplir cette fonction que s'il est en mesure, sous le contrôle du juge administratif, de présenter une excuse valable ; que peut être, le cas échéant, regardé comme excipant d'une telle excuse, pour l'application de ces dispositions, un conseiller municipal qui établit l'existence de manoeuvres consistant en des décisions ou comportements d'un maire destinés à provoquer un refus de l'intéressé d'exercer ses fonctions susceptible de le faire regarder comme s'étant de lui-même placé dans la situation où il peut être déclaré démissionnaire d'office ;
5. Considérant que M. Dassonneville a, par une délibération du 27 juin 2014, été désigné membre titulaire de la commission d'appel d'offres de la commune d'Hazebrouck ; qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier du procès-verbal de la réunion du 12 novembre 2015 de cette commission chargée de se prononcer sur l'analyse des offres du marché de fourniture d'équipements de protections individuelles destinées au fonctionnement des services municipaux de la commune, que lors de cette réunion M. Dassonneville a refusé de se prononcer sur les offres présentées et d'attribuer les lots en raison de son désaccord sur la procédure d'appel d'offres mise en oeuvre par la commune et quitté la séance avant la fin de celle-ci et l'épuisement des affaires inscrites à l'ordre du jour sans signer le procès-verbal, provoquant ainsi un défaut de quorum et empêchant la commission de se prononcer sur les offres présentées ; que le 16 novembre 2015, le maire de la commune, qui avait déjà, par des lettres du 22 octobre 2015 et du 4 novembre 2015, attiré l'attention de M. Dassonneville sur son comportement lors de la précédente réunion du 21 octobre 2015 de la commission qui avait conduit cette dernière, en méconnaissance des règles applicables en matière de marchés publics, à outrepasser ses compétences en modifiant la procédure de passation engagée par le pouvoir adjudicateur, lui a rappelé ses obligations en qualité de membre titulaire de la commission d'appel d'offres ; que si M. Dassonneville soutient que la commission n'avait plus à se réunir dès lors qu'elle avait émis, le 21 octobre 2015, un avis défavorable sur les offres qui lui étaient soumises, cette circonstance ne le dispensait toutefois pas d'exercer ses fonctions et de siéger à une nouvelle séance convoquée pour le 18 novembre 2015 afin précisément de pallier tant les irrégularités constatées lors de la réunion du 21 octobre précédent que le défaut de quorum provoqué par le départ intempestif de l'intéressé lors de celle du 12 novembre ; que si M. Dassonneville soutient, en outre, qu'il était indisponible le 18 novembre 2015 en raison d'une réunion à laquelle il se devait d'assister le même jour en sa qualité de délégué communautaire de la communauté de communes de Flandre intérieure et de celle de Flandres-Lys, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé qui, au demeurant, n'est pas délégué au sein de la communauté de communes Flandre-Lys, s'est borné à adresser à la commune un message électronique le 18 novembre 2015 à 12 heures 45 pour une réunion fixée à 14 heures 30, indiquant qu'il n'était pas disponible ainsi que son suppléant et que " malgré un avis négatif de la première commission d'appel d'offres sur ce marché ", il n'était plus nécessaire de le convoquer à une autre réunion ; que, dans ces conditions, M. Dassonneville, qui ne fait état d'aucune manoeuvre consistant à provoquer son refus d'exercer ses fonctions, n'a présenté aucune excuse valable et a ainsi refusé de remplir l'une des fonctions qui lui étaient dévolues par la loi ; qu'il entrait ainsi dans le champ des prévisions de l'article L. 2121-5 du code général des collectivités territoriales ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Dassonneville n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille l'a déclaré démissionnaire d'office de ses fonctions de conseiller municipal de la commune d'Hazebrouck ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les conclusions de la commune d'Hazebrouck présentées sur le même fondement et dont l'intervention n'est pas admise, doivent également être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : L'intervention du maire de la commune d'Hazebrouck n'est pas admise.
Article 2 : La requête de M. Dassonneville est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Hazebrouck présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...Dassonneville et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au maire de la commune d'Hazebrouck.
Délibéré après l'audience publique du 5 juillet 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Michel Hoffmann, président de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- Mme Muriel Milard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 19 juillet 2016.
Le rapporteur,
Signé : M. B...Le président de chambre,
Signé : M. F...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°16DA00347