Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E...A...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le conseil départemental de l'Eure à l'indemniser des préjudices subis à la suite d'un accident survenu le 31 mai 2012, d'ordonner une expertise médicale, et de condamner le conseil départemental de l'Eure à lui verser la somme provisionnelle de 15 000 euros. La caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime a demandé au tribunal administratif de Rouen la condamnation du département de l'Eure à lui verser 895,75 euros au titre de ses débours, assortie des intérêts et 298,58 euros au titre de l'indemnité forfaitaire.
Par un jugement n° 1401786 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Rouen a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 juillet 2015, Mme A..., représentée par Me F...H..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 13 mai 2015 ;
2°) de surseoir à statuer sur l'indemnisation de ses préjudices et de désigner avant dire droit un expert aux fins d'évaluer ces chefs de préjudice et de lui allouer, à ce titre, une indemnité provisionnelle de 15 000 euros ;
3°) de mettre à la charge du département de l'Eure une somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa chute est imputable à un défaut d'entretien et à une mauvaise configuration des lieux qui engagent la responsabilité du département de l'Eure ;
- elle établit le lien de causalité entre l'ouvrage et le dommage ;
- elle a subi un préjudice important.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 octobre 2015, le département de l'Eure, représenté par Me G...D..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme A...la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- Mme A...n'établit pas la matérialité des faits ;
- il établit l'absence de défaut d'entretien ;
- la chute de Mme A...est entièrement imputable à son imprudence.
Vu le mémoire produit le 25 novembre 2016 par la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que Mme E...A...relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à ce que le département de l'Eure soit condamné à l'indemniser des préjudices qu'elle a subis suite à une chute survenue le 31 mai 2012 à l'entrée du bâtiment du centre de la protection maternelle et infantile (PMI) du Pont-de-L'arche ;
Sur la responsabilité :
2. Considérant que Mme A...soutient avoir glissé sur des marches alors qu'elle quittait le centre de la PMI du Pont-de-L'arche avec son nourrisson qu'elle portait dans une nacelle ; que cette chute lui a notamment occasionné une fracture tri-malléolaire de la cheville gauche et une entorse de la cheville droite ;
En ce qui concerne la faute commise par le département de l'Eure :
3. Considérant que Mme A...se prévaut de la faute commise par le département de l'Eure, consistant en la méconnaissance des dispositions de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ; que ce moyen fondé sur la responsabilité pour faute, qui n'est pas d'ordre public, a été écarté comme irrecevable par le tribunal administratif de Rouen au motif qu'il avait été soulevé plus de deux mois après la date de saisine du tribunal, et ressortait d'une cause juridique distincte de celle à laquelle se rattachait la demande, qui n'était fondée que sur le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ; que la requérante n'est pas plus recevable en appel à reprendre ce moyen ; que, par suite, celui-ci ne peut qu'être écarté ;
En ce qui concerne le défaut d'entretien normal de l'ouvrage public :
4. Considérant que, pour obtenir réparation, par le maître de l'ouvrage, des dommages qu'ils ont subis à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, les usagers doivent démontrer devant le juge administratif, d'une part, la réalité de leur préjudice et, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage ; que, pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse ainsi sur elle, il incombe à la collectivité maître d'ouvrage, soit d'établir qu'elle a normalement aménagé ou entretenu l'ouvrage, soit de démontrer la faute de la victime ou l'existence d'un évènement de force majeure ;
5. Considérant que Mme A...soutient que ses dommages sont imputables à un défaut d'entretien du perron sur lequel elle a chuté ; que Mme A...produit deux attestations, l'une émanant d'un médecin de la PMI déclarant qu'une puéricultrice lui a porté secours alors qu'elle se trouvait " allongée au bas des marches ", l'autre établie par le service départemental d'incendie et de secours ; qu'il en résulte, par suite, que les dommages subis par Mme A...sont en lien direct et certain avec le perron du centre de la PMI du Pont-de-L'arche ;
6. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le perron en question est composé de quatre larges marches de faible hauteur bornées d'un côté par un muret et de l'autre par la façade du bâtiment qui supporte une rampe ; que ni l'absence de rampe sur l'un des cotés de l'escalier, ni la présence alléguée mais non établie de mousse sur les marches de l'escalier, ou encore de végétation au pied de la rampe, ne sont, dans les circonstances de l'espèce, susceptibles de révéler un défaut d'aménagement ou de présenter, un caractère particulièrement dangereux excédant les risques contre lesquels un usager normalement attentif doit se prémunir en prenant les précautions nécessaires et dont il est seul tenu de supporter les conséquences ; qu'il résulte en outre de l'instruction que l'accident a eu lieu en plein après-midi, alors que Mme A... quittait la PMI et dont elle connaissait la configuration des lieux ; que par suite, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la chute dont Mme A...a été victime est exclusivement imputable à une faute d'inattention de sa part ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'expertise et celles tendant au versement d'une indemnité provisionnelle ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de l'Eure, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme A... à l'occasion du litige ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme demandée par le département de l'Eure sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département de l'Eure sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...et au département de l'Eure.
Copie sera adressée à la caisse primaire d'assurance maladie de Rouen-Elbeuf-Dieppe-Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 29 novembre 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme C...B..., première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 décembre 2016.
Le premier conseiller le plus ancien,
Signé : M. B...Le président-assesseur,
Signé : M. I...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA01137