Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société par actions simplifiée (SAS) Polygone a demandé au tribunal administratif d'Amiens de retenir la valeur locative ayant servi au calcul de l'imposition de l'année précédente non contestée et de prononcer la décharge des impositions contestées, de prononcer subsidiairement la réduction de la cotisation de taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2009, de prononcer subsidiairement la réduction des cotisations foncières des entreprises mises à sa charge au titres des années 2010 et 2011 et, en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement n° 1301542 du 13 mai 2015, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes. Procédure devant la cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 juillet et 10 décembre 2015, la société Polygone, représentée par le cabinet RDB associés, demande à la cour : 1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif ;
2) à titre principal, de prononcer la décharge totale de la taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2009 et de la cotisation foncière des entreprises mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011 ; 3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge partielle des impositions après avoir retenu un local-type à usage d'atelier pour déterminer la valeur locative de l'immeuble utilisé ou, à défaut d'écarter le local de référence retenu par l'administration, d'appliquer un abattement d'au moins 50 % sur la valeur locative de l'immeuble utilisé et, par voie de conséquence, de prononcer le dégrèvement partiel desdites impositions ; 4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que : - le service n'a pas, comme il aurait dû le faire, saisi au préalable la commission intercommunale des impôts directs de sorte que la cour devra retenir la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière ayant servi à l'établissement de la taxe professionnelle au titre de l'année 2008 ; - le local de référence, n° 54, retenu par le service pas plus que les nos 55, 67 et 68, proposés par le service devant le tribunal administratif, ne sont représentatifs de l'immeuble dans lequel elle exploite son activité, qui est un atelier et non un entrepôt ; - si le local de référence n'est pas écarté, doivent être prises en compte les circonstances environnementales entourant l'immeuble occupé et non prises en compte dans la valeur locative de 1970, par le biais d'un abattement en base de 50 % ou par la proposition d'un nouveau local de référence. Par un mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que : - les conclusions aux fins de décharge totale sont irrecevables n'ayant été soulevées pour la première fois, en première instance, que dans un mémoire en réplique enregistré le 30 avril 2014 ; - les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 - la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014 ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus au cours de l'audience publique : - le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller, - et les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public.
Sur les conclusions aux fins de décharge totale : 1. Considérant que si la société appelante soutient que le service n'a pas, comme il aurait dû selon elle le faire, saisi au préalable la commission intercommunale des impôts directs, une telle circonstance, si elle était fondée, ne pourrait en tout état de cause entraîner une décharge totale de l'imposition litigieuse mais seulement la fixation, par le juge de l'impôt, d'une nouvelle valeur locative ; que, par suite et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'administration à ces conclusions présentées après expiration du délai de recours contentieux devant le juge de première instance, la société Polygone n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions aux fins de décharge totale ; Sur les conclusions aux fins de décharge partielle : Sur la régularité de la procédure d'imposition : 2. Considérant qu'aux termes de l'article 1505 du code général des impôts : " Le représentant de l'administration et la commission communale des impôts directs procèdent à l'évaluation des propriétés bâties. / Après harmonisation avec les autres communes du département, les évaluations sont arrêtées par le service des impôts. Il en est de même en cas de désaccord entre le représentant de l'administration et la commission ou lorsque celle-ci refuse de prêter son concours. / Lorsqu'une commission intercommunale des impôts directs est constituée, elle donne, en lieu et place des commissions communales, un avis sur les évaluations foncières des locaux visés à l'article 1498 proposées par l'administration fiscale. En cas de désaccord ou si la commission intercommunale des impôts directs refuse de prêter son concours, les évaluations sont arrêtées par l'administration fiscale " ; que, par application de l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, la commission intercommunale des impôts directs d'Amiens Métropole, nouvellement créée, s'est substituée à la commission communale des impôts directs d'Amiens à compter du 1er janvier 2012 ; 3. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 1505 du code général des impôts que la commission communale des impôts directs doit être saisie lors de chaque modification par l'administration de l'évaluation des propriétés bâties relevant de l'article 1498 de ce code, en dehors du cas où cette modification résulte exclusivement de l'actualisation de la valeur locative par application des coefficients annuels de majoration prévus à l'article 1518 bis de ce code ; 4. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, la SAS Polygone a été imposée à la taxe professionnelle et à la cotisation foncière des entreprises pour le local qu'elle occupe au 23 rue de la Vassellerie à Amiens, par comparaison avec le local de référence n° 54 pour une valeur de 4,57 le m² ; que le service a, à cette occasion, constaté que le local dont la société est locataire était imposé sur la base d'une surface erronée, dès lors que la surface prise en compte était de 336 m² alors qu'il ressortait du bail conclu par la société Polygone avec la SCI Marie Amke en janvier 2007 que la superficie occupée s'élevait à 1 120 m² ; que, contrairement à ce que soutient la société appelante, le service n'a pas ainsi procédé à une modification de l'évaluation de l'immeuble de la société Polygone mais s'est borné à corriger une erreur matérielle, relative à la surface prise à bail par la société dans cet immeuble ; que, par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que la commission intercommunale aurait dû être saisie par le service avant de procéder aux rectifications en litige ;
Sur le bien-fondé des impositions : En ce qui concerne le changement de destination du local de référence : 5. Considérant qu'aux termes de l'article 1498 du code général des impôts : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / 1° Pour les biens donnés en location à des conditions de prix normales, la valeur locative est celle qui ressort de cette location ; / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date. / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / 3° A défaut de ces bases, la valeur locative est déterminée par voie d'appréciation directe " ; qu'aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. / II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 324 Y à 324 AC, au regard de l'affectation de la situation de la nature de la construction de son importance de son état d'entretien et de son aménagement. / Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision " ; qu'enfin, l'article 1517 du code général des impôts dans sa version alors applicable prévoit que : " I. 1. Il est procédé, annuellement, à la constatation des constructions nouvelles et des changements de consistance ou d'affectation des propriétés bâties et non bâties. Il en va de même pour les changements de caractéristiques physiques ou d'environnement quand ils entraînent une modification de plus d'un dixième de la valeur locative. / (...) " ; 6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la valeur locative de l'immeuble en cause a été établie, sur le fondement du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, par comparaison avec le local n° 54, situé place Parmentier, dans le quartier Saint-Leu à Amiens, ce local étant, en 1970, occupé par une société amiénoise spécialisée dans le transport de marchandises et cet immeuble était un entrepôt ; 7. Considérant qu'aux termes du III de l'article 32 de la loi de finances rectificatives du 29 décembre 2014 : " sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, pour la détermination de la valeur locative des locaux mentionnés à l'article 1496 du code général des impôts et de ceux évalués en application du 2° de l'article 1498 du même code, sont validées les évaluations réalisées avant le 1er janvier 2015 en tant que leur légalité serait contestée au motif que, selon le cas, le local de référence ou le local-type ayant servi de terme de comparaison, soit directement, soit indirectement, a été détruit ou a changé de consistance, d'affectation ou de caractéristiques physiques. " ;
8. Considérant que, par application de cette disposition législative, le moyen soulevé par la société appelante selon lequel le local-type n° 54, désormais exploité par un office notarial, est constitué de bureaux et a changé d'affectation, ne peut pas, de ce fait, être retenu comme local de référence, ne peut plus être utilement soulevé ; En ce qui concerne le caractère inadapté du local de référence : 9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le bien immobilier dont la société Polygone est locataire, situé en pleine zone industrielle, était initialement utilisé comme commerce de fruits et légumes et qu'il a été évalué dans la catégorie de biens " Docks-Entrepôts-Magasins généraux " ; qu'au vu des pièces du dossier, ce local est aménagé sommairement et y sont entreposées de lourdes machines et des installations techniques, servant à l'activité de fabrication d'ossatures bois, sans que le local puisse être pour autant qualifié d'industriel ; qu'ainsi, le local exploité par la société Polygone doit être regardé comme ayant gardé les caractéristiques des " Docks-Entrepôts-Magasins généraux ", en dépit des évolutions d'aménagement liées à l'activité qui y est désormais réalisée, et doit donc être évalué comme un entrepôt et non comme un atelier, contrairement à ce que demande la société appelante ; que, par suite, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que toute comparaison avec un local de référence constituant un entrepôt est inadaptée ; 10. Considérant, toutefois, que si le bien immobilier exploité par la société appelante peut, de par sa nature, être comparé à un entrepôt, il résulte également de l'instruction que le bien loué par la société se trouve à proximité des grands axes routiers, du réseau ferré, des centres d'activités économiques et présente de grandes facilités d'accès et de stationnement alors que le local de référence, entrepôt en étage de faible hauteur, est situé, pour sa part, en plein centre-ville, à proximité immédiate de la cathédrale d'Amiens, et donc éloigné de toutes ces caractéristiques avantageuses ; que, dans ces conditions, le local type n° 54 ne saurait être retenu comme terme de comparaison pour l'évaluation du bien situé 23 rue de la Vassellerie exploité par la société Polygone, ce dont le service ne disconvient d'ailleurs pas en défense ; En ce qui concerne la recherche d'un autre local de référence : 11. Considérant, en premier lieu, que ne peuvent être utilisés comme termes de comparaison, pour l'application de la méthode d'évaluation de la valeur locative prévue au a. du 2° de l'article 1498 du code général des impôts, que les locaux-types régulièrement inscrits aux procès-verbaux des opérations de révision des évaluations foncières des propriétés bâties communales au 1er janvier de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ; 12. Considérant que les locaux-types nos 67 et 68, dont fait état le service, n'ont été portés sur le procès-verbal de la ville d'Amiens qu'en 2012 ; que, par suite, ils ne sauraient, en tout état de cause, être retenus comme immeubles de comparaison au titre des impositions en litige ; qu'il en va différemment du local type n° 55, sis 85 rue André Durouchez à Amiens, qui présente, quant à lui, des caractéristiques très proches du bien immobilier exploité par la société Polygone ; que ce local type peut, de ce fait, être considéré comme adapté pour servir de comparaison pour le bien immobilier exploité par la société appelante alors que cette dernière ne démontre pas, et qu'il ne résulte pas plus des pièces figurant aux dossiers d'appel et de première instance, que la restructuration du bâtiment avec changement d'affectation, dont elle fait état, serait intervenue antérieurement au 1er janvier des années d'imposition en litige ;
13. Considérant, en second lieu, que, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point précédent, le local n° 55 peut être regardé comme local type pour la définition de la valeur locative du bien exploité par la société appelante, cette dernière n'est pas fondée dans sa demande tendant à ce que soit appliqué un abattement de 50 %, la société ne présentant, dans ses écritures d'appel, une telle demande que pour le cas où le local de référence ne serait pas écarté ; 14. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la valeur locative du local type n° 55 s'élève à 6,74 euros le m² alors que celle du local type n° 54 s'élève à 4,57 euros ; que, par suite, dès lors que le local type utilisé par le service pour les impositions et les années en litige est plus favorable à la société que le local type n° 55, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ses demandes tendant à une décharge partielle des cotisations de taxe professionnelle due au titre de l'année 2009 et de cotisation foncière des entreprises due au titre des années 2010 et 2011 ; Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la société requérante et non compris dans les dépens ; DÉCIDE : Article 1er : La requête de la SAS Polygone est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Polygone et au ministre de l'économie et des finances Copie en sera transmise pour information à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord. Délibéré après l'audience publique du 6 janvier 2017 à laquelle siégeaient : - M. Olivier Yeznikian, président de chambre, - M. Christian Bernier, président-assesseur, - M. Xavier Fabre, premier conseiller. Lu en audience publique le 19 janvier 2017. Le rapporteur,Signé : X. FABRELe premier vice-président de la cour,Président de chambre,Signé : O. YEZNIKIANLe greffier,Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt. Pour expédition conforme,Le greffier en chef,Par délégation,Le greffier,Christine Sire N°15DA01202 2