Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B..., Mme D...H...épouse B...et M. A...B...ont demandé, par demandes distinctes au tribunal administratif d'Amiens, l'annulation des arrêtés du 10 décembre 2015 du préfet de l'Oise leur refusant chacun la délivrance d'un titre de séjour, leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.
Après avoir joint les demandes, le tribunal administratif d'Amiens les a rejetées par un jugement commun n° 1600047-1600048-1600049 du 24 juin 2016.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2016, M. C...B..., Mme D...H...épouse B...et M. A...B..., représentés par Me J...I..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 24 juin 2016 du tribunal administratif d'Amiens ;
2°) d'annuler les arrêtés du 10 décembre 2015 du préfet de l'Oise ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Oise de délivrer les titres sollicités dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou à défaut, de délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de leur situation.
Ils soutiennent que :
- le refus de titre de séjour de M. et Mme B...méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour de Mme B...est entaché d'un vice de procédure, le préfet n'ayant pas saisi pour avis le médecin de l'agence régionale de santé ;
- le refus de titre de séjour de M. A...B...méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les obligations de quitter le territoire méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elles méconnaissent les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2016, le préfet de l'Oise conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. C...B...et Mme D...H...épouseB... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 août 2016.
M. A...B...s'est vu refuser l'aide juridictionnelle par une décision du 22 août 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. C...B..., Mme D...H...épouse B...et M. A... B..., leur fils, ressortissants albanais, nés respectivement le 15 juillet 1963, le 18 mai 1971 et le 16 mai 1996, relèvent appel du jugement n° 1600047-1600048-1600049 du 24 juin 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes d'annulation des arrêtés du 10 décembre 2015 du préfet de l'Oise portant refus de renouvellement de leurs titres de séjour et obligations de quitter le territoire français ;
Sur la situation de M. C...B...et de Mme D...H... :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 3 novembre 2015, confirmé par un avis du 22 janvier 2016 après recours gracieux de M. C...B..., que l'état de santé de M. C...B...nécessite une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une extrême gravité et qu'un traitement existe dans son pays d'origine ; qu'il ressort des différentes pièces médicales versées au dossier par M. B...que celui-ci souffre de céphalées chroniques quotidiennes et d'un petit anévrisme cérébral caverneux gauche impliquant d'effectuer tous les six mois une surveillance par imagerie médicale et de ne pas faire d'efforts physiques intenses ; que cette pathologie nécessite également un traitement médicamenteux par la prise de Laroxyl et d'Epitomax ; que si M. B...soutient que son état de santé s'est dégradé et l'a obligé à être hospitalisé du 6 au 12 novembre 2015, il ressort des termes du certificat médical du 31 décembre 2015, que suite à cette hospitalisation, son traitement médicamenteux a été réévalué et que l'anévrisme présente un aspect stable sans signe de gravité ; qu'ainsi ces différentes pièces, eu égard à leur teneur, ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé, tant sur la gravité de la pathologie du requérant, que sur la disponibilité du traitement en Albanie ; que le préfet de l'Oise a procédé à un examen approfondi de sa situation au regard de son état de santé et n'a pas méconnu les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'est pas démontré que l'état de santé de M. C...B...l'empêche de voyager sans risque vers son pays d'origine ; que le préfet de l'Oise a ainsi pu légalement lui refuser un titre de séjour pour raison de santé et l'obliger à quitter le territoire français ;
4. Considérant qu'il est constant que Mme H...a sollicité le 10 juin 2015 un titre de séjour en qualité d'accompagnante d'étranger malade ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de l'Oise pouvait rejeter sa demande de titre en cette qualité en conséquence du refus de titre de séjour pour soins de M. C...B... ; que, n'ayant pas sollicité un titre sur le fondement du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de l'Oise n'avait pas à saisir le médecin de l'agence régionale de santé pour avis ; que si la requérante a sollicité le 29 juillet 2014 un titre de séjour mention " étranger malade " en raison d'un syndrome de dépression post-traumatique, il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Oise a rejeté cette demande le 27 mars 2015 après avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que cette décision, non contestée par MmeH..., est devenue définitive ; que, par suite, Mme H...ne peut se prévaloir utilement de la méconnaissance du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en tout état de cause, le préfet de l'Oise a régularisé la situation de Mme H...en lui délivrant par la même décision du 27 mars 2015, une autorisation provisoire de séjour valable jusqu'au 6 juin 2015 ;
Sur la situation de M. A...B... :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;
6. Considérant que le 17 juin 2015, M. A...B...a sollicité la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précitées ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de ses résultats scolaires et des nombreuses attestations d'enseignants, que M. A...B...peut se prévaloir d'une bonne intégration par son sérieux dans ses études et son implication dans son milieu scolaire ; qu' après avoir obtenu un certificat d'aptitude professionnelle en maintenance automobile, il prépare actuellement un baccalauréat professionnel mention " maintenances des matériels option aéroportuaire " dont il soutient qu'il n'existe aucun équivalent en Albanie ; que, toutefois, M. A...B...ne justifie pas, par ces seules circonstances, de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à lui permettre l'octroi d'un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions précitées ;
Sur la situation de la familleB... :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que la famille B...déclare être entrée en France le 29 mai 2012 ; que les requérants font valoir une bonne intégration par l'investissement associatif de MmeB..., la scolarisation des enfants Aldo et Rénato et l'emploi qu'occupe leur père M.B..., en dépit de son handicap ; que, toutefois, ils ne justifient pas être dépourvus d'attaches en Albanie, pays où s'est constituée la cellule familiale et où M. et Mme B...ont vécu l'essentiel de leurs vies ; que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Albanie, pays dont ils ont tous trois la nationalité ; que dans ces conditions, eu égard aux conditions du séjour de la famille, les arrêtés attaqués n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ils ont été pris ; qu'ils n'ont donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, ces arrêtés ne sont pas entachés d'erreur manifeste d'appréciation ;
9. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'aux termes de l'article 1er de la même convention : " Au sens de la présente Convention, un enfant s'entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation ;
10. Considérant que M. A...B..., né le 16 mai 1996, majeur à la date des arrêtés querellés, ne saurait utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
11. Considérant que s'agissant du second enfant de la famille, G...B..., né le 25 mars 1999, les arrêtés attaqués n'ayant ni pour objet, ni pour effet de le séparer de ses parents, rien ne s'oppose à ce qu'il suive ses parents en Albanie ; que, s'il est scolarisé en France, M. et Mme B...n'apportent aucun élément de nature à établir l'impossibilité pour celui-ci de poursuivre sa scolarité dans leur pays d'origine ; que, dans ces conditions, en refusant aux époux B...la délivrance d'un titre de séjour, le préfet de l'Oise n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de Rénato ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 doit être écarté ;
12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 de ce même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur de l'agence régionale de santé ; (...) " ;
13. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 3 et 4, il n'est pas établi que M. et Mme B...auraient été au nombre des étrangers visés par les dispositions précitées de l'article L. 511-4 de ce code qui ne peuvent légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leurs demandes ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C...B..., de Mme D...H...et de M. A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à Mme D...H...épouseB..., à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et à Me J...I....
Copie sera adressée au préfet de l'Oise.
Délibéré après l'audience publique du 14 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme F...E..., première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 28 mars 2017.
Le premier conseiller le plus ancien,
Signé : M. E...Le président-rapporteur,
Signé : M. K...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°16DA01313