Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 avril 2016 par lequel le préfet de la Somme a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1601471 du 15 septembre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 janvier, 1er février et 22 juin 2017, M. C...A..., représenté par Me D...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté préfectoral ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Somme de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de la Somme de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- son recours conserve un objet en dépit de l'exécution de la mesure d'éloignement ;
- elle est intervenue en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en violation des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle repose sur une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de la mesure sur sa situation personnelle ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant de l'admettre au séjour ;
- elle a été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le Pakistan comme pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
- elle a été prise en violation de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2017, le préfet de la Somme demande à la cour de prononcer un non-lieu sur la requête.
Il soutient que l'éloignement de l'intéressé est intervenu le 25 avril 2017 à destination de son pays d'origine.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 novembre 2016 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- et les observations de Me D...B..., représentant M.A....
Sur le non-lieu à statuer :
1. Considérant que l'exécution de la mesure d'éloignement ne rend pas sans objet le recours pour excès tendant à l'annulation de l'arrêté par lequel l'autorité préfectorale a refusé la délivrance d'un titre de séjour à un étranger, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il peut être reconduit ;
2. Considérant que par un arrêté du 29 avril 2016, le préfet de la Somme a refusé à M. A...son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que la mesure d'éloignement a été mise à exécution le 25 avril 2017 ; qu'une telle mesure ne prive pas d'objet le recours tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral qui refuse la délivrance de titre de séjour et prononce l'éloignement ; qu'au demeurant, la circonstance que l'intéressé n'a pas fait obstacle à son éloignement ne peut être regardé comme un acquiescement à l'arrêté préfectoral qui lui est défavorable ;
Sur la légalité de la décision refusant de l'admettre au séjour :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur à la date de la décision : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;
4. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de cet article, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ;
5. Considérant que M.A..., ressortissant pakistanais né le 1er janvier 1977, est entré irrégulièrement en France le 16 septembre 2012 ; qu'il a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 23 avril 2014, rejet confirmé par la Cour nationale du droit d'asile le 1er octobre 2014 ; qu'il s'est ainsi maintenu en France à la faveur de l'examen de sa demande d'asile ; qu'en se fondant sur un défaut d'examen particulier de sa situation en raison du changement de sa situation matrimoniale, le tribunal administratif de Paris a annulé une première mesure d'éloignement prise à son encontre par l'autorité préfectorale et a enjoint à celle-ci de procéder au réexamen de celle-ci ; qu'à la suite de ce réexamen par le préfet territorialement compétent, M. A...a de nouveau fait l'objet d'un refus d'admission au séjour et d'une mesure d'éloignement, objet du présent litige ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le requérant s'est marié le 18 octobre 2014 avec une ressortissante française, rencontrée au cours de l'année 2014, et qu'ils vivent au même domicile depuis le mois de juillet 2014 à Eppeville dans la Somme ; qu'il ressort des pièces produites que le requérant, qui suit avec assiduité des cours d'alphabétisation en français, a tissé des liens sur le territoire français, notamment avec sa belle-famille et les trois enfants mineurs de sa conjointe dont il s'occupe régulièrement ; que, toutefois, à la date de la décision contestée, la vie commune et le mariage étaient récents ; qu'il est dépourvu de ressources en France et n'a pas la charge des enfants de sa conjointe qui vivent alternativement chez leur père et leur mère, lesquels assurent l'autorité parentale conjointe ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne serait pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-cinq ans et dans lequel résident encore ses trois enfants et ses parents ; que s'il a déclaré dans sa demande d'asile être marié au Pakistan, il indique être veuf à la suite du décès de son épouse au Pakistan ; que, dès lors et compte tenu de l'ensemble de ces éléments et notamment de la durée et des conditions du séjour en France, il n'apporte pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels propres à justifier une admission exceptionnelle sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, le préfet de la Somme n'a pas, à la date de la décision attaquée et compte tenu des conditions et de la durée du séjour en France, porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels le refus de séjour a été pris ; que, par suite, il n'a ni méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni entaché sa décision d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle du requérant ;
8. Considérant que le refus de titre de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet de séparer les enfants de la conjointe de M. A...de leurs parents ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la circonstance que M. A...s'occupait régulièrement de ses beaux-enfants révèle une atteinte à l'intérêt supérieur de ceux-ci ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;
Sur la légalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours :
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de séjour doit être écarté ;
10. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, le préfet de la Somme n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels l'obligation de quitter le territoire français a été prise ; que, par suite, il n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la légalité de la décision fixant le Pakistan comme pays de destination :
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être écarté ;
12. Considérant qu'aux termes de l'alinéa 2 de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;
13. Considérant que M. A...déclare que la situation du Pakistan est instable en raison de la recrudescence des violences commises par des groupes terroristes tels que Al Quaida et Daesh ; que, toutefois, il ne verse au dossier aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques personnels, directs et actuels qu'il encourrait en cas de retour en Pakistan ; qu'au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, et par la Cour nationale du droit d'asile par une ordonnance le 1er octobre 2014 ; qu'ainsi, il n'est pas établi que les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., au ministre de l'intérieur et à Me D...B....
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Somme.
Délibéré après l'audience publique du 29 juin 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Xavier Fabre, premier conseiller,
- Mme Amélie Fort-Besnard, premier conseiller.
Lu en audience publique le 13 juillet 2017.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : X. FABRELe premier vice-président de la cour,
Président-rapporteur,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : C. SIRE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Christine Sire
N°17DA00021 2