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05/04/2018 | FRANCE | N°16DA00899

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre - formation à 3, 05 avril 2018, 16DA00899


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'Université de Technologie de Compiègne (UTC) à lui verser la somme de 183 682 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2014 en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la résiliation de la convention d'occupation du 1er avril 1993 dont il bénéficiait en vue d'exploiter un bar cafétéria dans les locaux de l'université.

Par un jugement n° 1401594 du 22 mars 2016, le tribunal administratif

d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'Université de Technologie de Compiègne (UTC) à lui verser la somme de 183 682 euros avec intérêts au taux légal à compter du 6 mars 2014 en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de la résiliation de la convention d'occupation du 1er avril 1993 dont il bénéficiait en vue d'exploiter un bar cafétéria dans les locaux de l'université.

Par un jugement n° 1401594 du 22 mars 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 13 mai et 5 décembre 2016, 6 et 26 janvier 2017, M. D...A..., représenté par la SCP d'avocats Juriprince, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Université de Technologie de Compiègne (UTC) à lui verser les sommes de 153 682 euros au titre de l'ensemble des préjudices liés à la résiliation de la convention, 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de la rupture unilatérale hors délai de la convention du 1er avril 1993 ;

3°) d'assortir des condamnations des intérêts moratoires à compter du 6 mars 2014 ;

4°) de mettre à la charge de l'Université de Technologie de Compiègne la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La clôture de l'instruction a été fixée au 19 juin 2017 à 12 h 00 par une ordonnance du 1er juin 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Xavier Fabre, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Amélie Fort-Besnard, rapporteur public,

- et les observations de Me B...C..., représentant l'Université de Technologie de Compiègne.

Considérant ce qui suit :

1. M. D...A...a conclu, le 1er mars 1980, une première convention avec l'Université de Technologie de Compiègne (UTC) pour l'exploitation d'un bar cafétéria au sein du bâtiment Ampère du centre Benjamin Franklin de l'université, situé en centre-ville de Compiègne et dédié à la formation initiale. Après avoir fait l'objet de nombreux avenants, cette première convention a été remplacée par une seconde, conclue le 1er avril 1993. Par une lettre du 28 janvier 2013, l'UTC a informé M. A...qu'elle entendait mettre fin à leurs relations contractuelles au plus tard le 30 avril 2013. M. A...a continué à exercer son activité jusqu'à la fin de l'année universitaire 2012/2013. Estimant avoir été irrégulièrement évincé, M. A...a présenté, par lettre du 6 mars 2014, une demande indemnitaire auprès de l'UTC qui l'a rejetée par lettre du 25 mars 2014. M. A...relève appel du jugement du 22 mars 2016 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande indemnitaire dirigée contre l'UTC.

Sur la régularité du jugement :

2. Il résulte de l'instruction que, dans sa demande de première instance, M. A...sollicitait l'indemnisation du préjudice résultant de la destruction de ses biens par l'UTC. Il est constant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens ne s'est pas prononcé sur ce chef de préjudice. Par suite, M. A...est fondé à soutenir que ce jugement est dans cette mesure irrégulier et qu'il doit, par suite, dans cette même mesure, être annulé.

3. Il y a lieu, en l'espèce, d'évoquer et de statuer immédiatement, dans cette mesure, sur la demande présentée par M.A.... Il y a lieu de statuer sur les autres chefs de préjudice dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel.

Sur la faute résultant de l'irrégularité de la décision de non-renouvellement de la convention d'occupation :

4. Selon les stipulations de l'article 11 de la convention conclue entre M. A...et l'UTC le 1er avril 1993 : " La présente convention prend effet au 1er avril 1992. / Elle annule et remplace la convention du 1er mars 1980 et ses 15 avenants. / Elle est conclue pour une durée de 3 ans. Elle pourra ensuite être renouvelée chaque année à la même période, par tacite reconduction par période d'une année sauf dénonciation par l'une ou l'autre partie, par lettre recommandée, trois mois avant l'expiration de chaque période annuelle ".

5. Il résulte de l'instruction que la décision de ne pas renouveler la convention liant l'UTC à M.A..., qui, compte tenu des lieux d'exercice, de leurs aménagements, de l'objet de la convention et de ses termes imposant des obligations de service public contrôlées par l'UTC, a le caractère d'un contrat d'occupation du domaine public, a été notifiée à M. A...par lettre du 28 janvier 2013, reçue le 31 janvier 2013. Il résulte des stipulations précitées que, faute d'avoir été dénoncée " à la même période " c'est-à-dire, avant le 1er avril de chaque année, la convention doit être regardée comme reconduite tacitement. Il est constant que, compte tenu de sa date d'envoi et du délai de trois mois prévu conventionnellement, et d'ailleurs rappelé dans la lettre du 28 janvier 2013, le courrier par lequel l'UTC a indiqué à M. A...vouloir mettre fin à la convention " au plus tard dans un délai de trois mois à compter de la réception du présent courrier " doit être regardé non pas comme un refus de renouvellement du contrat au 1er avril 2013, mais comme une décision de résiliation, au 30 avril 2013, du contrat renouvelé tacitement le 1er avril 2013. La portée exacte du courrier devant être appréciée au regard de sa date de prise d'effet, M. A...ne peut donc utilement soutenir que la méconnaissance du délai de non renouvellement constituerait une faute. Au demeurant, M. A...ne justifie pas d'un préjudice attaché à une telle méconnaissance du délai de trois mois.

Sur la faute résultant de la décision de résiliation de la convention :

6. Il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité. Dans l'hypothèse où il fait droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il peut décider, si des conclusions sont formulées en ce sens, que le requérant a droit à l'indemnisation du préjudice que lui a, le cas échéant, causé la résiliation, notamment du fait de la non-exécution du contrat entre la date de sa résiliation et la date fixée pour la reprise des relations contractuelles.

7. Il résulte de l'instruction, en premier lieu, que l'UTC a mis en oeuvre, dès l'été 2012, un programme de travaux de grande ampleur destinés à la réhabilitation du bâtiment Ampère du centre Benjamin Franklin - y compris les locaux occupés par M. A...qui n'avaient pas fait l'objet d'investissements depuis de nombreuses années ainsi que cela ressort notamment des constats d'huissier produits au dossier - afin de créer un espace dédié à la vie étudiante, en liaison avec le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS). Il résulte de l'instruction, en second lieu, que M. A...avait exprimé, au cours de la même période, à plusieurs reprises, le souhait de cesser son activité et de partir à la retraite. Il souhaitait néanmoins mettre en oeuvre ce projet après avoir présenté à l'UTC et obtenu l'agrément de celle-ci d'un candidat à la reprise afin de pouvoir lui céder son " fonds de commerce " ou ce qu'il estimait être ses droits d'exploitation. Cette position a d'ailleurs été réitérée par l'intéressé dans un courrier du 29 mai 2013 par lequel il indiquait que, si le choix du repreneur convenait à l'université, il cesserait son activité à la fin du semestre, soit mi-juillet 2013. Ce courrier a été adressé par M. A...en réponse à celui du 28 mai 2013 par lequel l'UTC lui rappelait la fin de leurs relations contractuelles à compter du 30 avril 2013 et lui demandait de préciser la date de cessation d'activité. Ce courrier de l'UTC indiquait, en outre, que le choix du repreneur était toujours à l'étude. Par une lettre du 24 juillet, M A...a confirmé son intention de conditionner son départ à l'agrément d'un repreneur et indiqué que, faute d'un tel agrément, le contrat, qui, selon lui, n'avait pas été résilié, se poursuivrait.

8. En premier lieu, il n'est pas contesté que les travaux de grande ampleur prévus par l'UTC étaient nécessaires. Ils ont d'ailleurs été exécutés dans le courant de l'année 2013. Ils correspondaient à l'intérêt même du domaine.

9. En second lieu, l'article 10 des stipulations contractuelles prévoit que " la présente convention constitue un contrat de caractère personnel vis-à-vis de M A...qui ne pourra céder ses droits d'exploitation à une tierce personne physique sans l'accord écrit préalable de l'université ". Il ne ressort pas de ces stipulations qu'elles subordonneraient la cessation des relations contractuelles entre les parties à un accord par l'UTC sur un repreneur éventuel présenté par M.A.... Par suite, M. A...ne peut valablement soutenir que la mesure de résiliation n'aurait pu régulièrement intervenir avant que l'UTC donne son accord sur un des candidats à la reprise qu'il lui avait présentés. En outre, il est constant que l'UTC l'avait informé qu'elle cherchait de son côté à confier la reprise de l'exploitation notamment de l'activité gérée par M.A..., au CROUS.

10. Il résulte des deux points précédents que M. A...n'est pas fondé à soutenir que la mesure de résiliation prononcée par l'UTC serait irrégulière ou non-fondée et qu'en prononçant cette mesure, l'université aurait commis une faute. Dès lors, et à supposer même que les conclusions de M. A...doivent être regardées comme tendant à la reprise des relations contractuelles, celles-ci doivent être rejetées. En outre, elles ont, à la date du présent arrêt, perdu leur objet. Il s'en suit que le contrat d'occupation du domaine public en litige avait pris fin au 1er mai 2013.

Sur la faute résultant de l'éviction de M. A...à l'été 2013 :

11. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que, à compter du 1er mai 2013, M. A... ne disposait plus d'un titre l'autorisant à occuper le domaine public. Si, par sa lettre du 2 septembre 2013, le directeur général des services de l'université lui a, de façon erronée, indiqué que la convention de mise à disposition des locaux avait pris fin le 12 juillet 2013, date de fin de l'année universitaire 2012/2013, sa poursuite de l'exploitation du café cafétéria n'a, en réalité, et ainsi que cela ressort d'ailleurs de la lettre que l'université lui a adressée le 21 mai 2013, résulté que d'une tolérance de la part de l'université, qui ne peut être regardée comme valant autorisation ou contrat d'occupation du domaine public. A cet égard, la circonstance que, pendant cette période, M. A...a réalisé différentes prestations pour l'Université, telles que la réalisation de cocktails ou de plateaux repas, n'est pas de nature à démontrer la possession d'une telle autorisation régulière d'occupation postérieurement au 30 avril 2013. Une telle occupation avait ainsi un caractère nécessairement précaire. Par ailleurs, M. A...avait été prévenu de la réalisation des travaux et de la nécessité d'enlever le mobilier lui appartenant. Il n'est donc pas fondé à soutenir que l'UTC aurait commis une faute en l'évinçant illégalement des locaux à l'occasion des travaux de réhabilitation du bar cafétéria réalisés au mois de juillet 2013.

Sur la réparation des préjudices résultant d'une résiliation régulière :

12. Si l'autorité domaniale peut mettre fin avant son terme à un contrat portant autorisation d'occupation du domaine public pour un motif d'intérêt général et en l'absence de toute faute de son cocontractant, ce dernier est toutefois en droit d'obtenir réparation du préjudice résultant de cette résiliation unilatérale dès lors qu'aucune stipulation contractuelle n'y fait obstacle. L'occupant est en droit d'obtenir réparation du préjudice direct et certain résultant de la résiliation de la convention d'occupation domaniale avant son terme, telle que la perte des bénéfices découlant d'une occupation du domaine conforme aux prescriptions de la convention et des dépenses exposées pour l'occupation normale du domaine, qui auraient dû être couvertes au terme de cette occupation.

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 12 que M. A...peut demander à être indemnisé des préjudices ayant résulté de la décision de l'UTC de résilier la convention d'occupation du domaine public.

Sur les préjudices invoqués :

En ce qui concerne le manque à gagner :

14. Si comme il a été dit précédemment, la convention d'occupation du domaine public a été résiliée à compter du 1er mai 2013, M. A...a pu, selon une tolérance administrative, poursuivre l'exercice de son activité jusqu'à la mi-juillet 2013. Il est constant que, à raison des vacances universitaires, la période de fin juillet à fin août n'est susceptible de générer quasiment aucun chiffre d'affaires et donc aucun bénéfice. Compte tenu des éléments financiers produits par l'intéressé figurant dans les documents intitulés " bilan et compte de résultats simplifiés " et en tenant compte par ailleurs de la circonstance que M. A...a bénéficié, par décision du 24 septembre 2013, d'une aide financière de la part de l'administration du travail, il sera fait une juste appréciation du manque à gagner susceptible d'être indemnisé, pour la période allant de septembre 2013 à mars 2014, en lui allouant la somme de 8 000 euros,

En ce qui concerne la perte du fonds de commerce :

15. Eu égard au caractère révocable et personnel d'une autorisation d'occupation du domaine public, celle-ci ne peut donner lieu à la constitution d'un fonds de commerce dont l'occupant serait propriétaire. Si la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 a introduit dans le code général de la propriété des personnes publiques un article L. 2124-32-1 selon lequel un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l'existence d'une clientèle propre, ces dispositions ne sont, dès lors que la loi n'en a pas disposé autrement, applicables qu'aux fonds de commerce dont les exploitants occupent le domaine public en vertu de titres délivrés à compter de son entrée en vigueur. Par suite, l'exploitant qui occupe le domaine public ou doit être regardé comme l'occupant en vertu d'un titre délivré avant cette date, qui n'a jamais été légalement propriétaire d'un fonds de commerce, ne peut prétendre à l'indemnisation de la perte d'un tel fonds.

16. La convention d'occupation du domaine public signée par M. A...en 1993 ne pouvait donner lieu à la constitution d'un fonds de commerce et ne comportait d'ailleurs aucune stipulation relative à la constitution d'un tel fonds de commerce. Par suite, M. A...ne peut prétendre à l'indemnisation de la perte d'un fonds de commerce. En outre, il ne peut davantage, en tout état de cause, obtenir réparation d'un préjudice dès lors que l'UTC ne l'a pas induit en erreur sur l'existence d'un bail commercial.

En ce qui concerne la perte de chance de céder ses droits d'exploitation :

17. Ainsi qu'il a été dit au point 9, les stipulations de l'article 10 de la convention de 1993, ne conféraient pas à M. A...un droit consistant à pouvoir subordonner la cessation de la convention à la reprise par un candidat qu'il aurait présenté à l'UTC. Il est, par ailleurs, constant que si l'UTC a examiné les candidats à la reprise que M. A...lui avait présentés, elle ne les a pas retenus. Elle a en définitive, comme elle lui avait annoncé, porté son choix sur le CROUS. Par suite, M. A...ne peut prétendre à la réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du seul fait qu'un repreneur qui avait présenté sa candidature à l'université, lui aurait proposé le rachat du " fonds de commerce " pour 100 000 euros.

En ce qui concerne les préjudices matériels :

S'agissant de l'alarme et de l'adoucisseur d'eau :

18. M. A...prétend que, du fait de la réalisation de travaux dans les locaux du bar cafétéria à l'été 2013, il n'a pu récupérer l'alarme et l'adoucisseur d'eau qui lui appartenaient. Il n'en est cependant fait état ni dans l'état des lieux réalisé le 19 mars 1993, ni dans les constats d'huissier des 23 juillet et 22 novembre 2013 produits par M. A...ni, en enfin, dans la liste des matériels jointe au courrier du 14 avril 2014 adressée par l'université à M.A.... Ce dernier se borne à produire à l'appui de ses déclarations des devis des 29 avril et 3 mai 2016 concernant respectivement un projet d'installation d'alarme et l'achat et l'installation d'un adoucisseur d'eau. Ces éléments sont donc insuffisants pour justifier tant de l'installation effective de ces éléments que de leur perte. Par suite, M. A...qui n'apporte ainsi aucun élément de nature à établir la réalité et l'étendue de son préjudice, n'est pas fondé à en demander réparation. Il n'est pas davantage fondé à demander la prise en compte de la valeur non amortie de ces biens.

S'agissant du meuble fixe de bar :

19. Il résulte de l'instruction, en particulier d'un courriel du 19 mars 2014 émanant d'une employée de l'UTC que le mobilier fixe de bar a été détruit à l'occasion des travaux réalisés à l'été 2013. Il ressort cependant, d'une part, de l'état des lieux réalisé le 19 avril 1993 que ce mobilier était déjà présent en 1993 et, d'autre part, du courriel du 19 mars 2014 non contesté que ce meuble en bois était particulièrement sale et vétuste. A l'appui de sa demande indemnitaire, M. A...se borne à produire un devis du 29 avril 2016 d'un montant de 37 728 euros pour la réalisation d'un bar entièrement neuf. M. A...ne justifie pas, d'une part, que ce meuble de bar usagé n'était pas entièrement amorti au regard des bilans et comptes de résultats simplifiés qu'il produit, concernant les exercices clos au titre 30 juin 2012 et 30 juin 2013 et, d'autre part, qu'il aurait pu le revendre notamment à un futur successeur ou qu'il aurait souhaité le reprendre. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que sa destruction lui aurait causé un préjudice.

S'agissant de la hotte aspirante :

20. Il est constant que M. A...n'a pas récupéré la hotte aspirante dont il était propriétaire. Les pièces du dossier n'ont pas permis de déterminer le devenir de cet élément. Pour autant, il résulte de l'instruction que cette hotte figurait déjà dans l'état des lieux de 1993 et avait au moins vingt ans d'ancienneté. A l'appui de sa demande indemnitaire, M. A...se borne à produire un devis du 3 mai 2016 pour l'achat et la pose d'une hotte aspirante neuve pour un montant de 2 578, 80 euros. M. A...ne justifie pas, d'une part, que cet élément usagé n'était pas entièrement amorti au regard des bilans et comptes de résultats simplifiés qu'il produit, concernant les exercices clos au titre 30 juin 2012 et 30 juin 2013 et, d'autre part, qu'il aurait pu le revendre notamment à un futur successeur ou qu'il aurait souhaité le reprendre. Dans ces conditions, il n'apparaît pas que, la disparition alléguée de la hotte aspirante aurait causé un préjudice à M.A....

S'agissant de la perte de chance de revendre certains matériels au successeur :

21. Au mois de mai 2014, M. A...a récupéré l'essentiel des éléments mobiliers, notamment les distributeurs de boissons qui lui appartenaient et qui figurent dans une liste des matériels jointe au courrier du 14 avril 2014 adressée par l'université à M.A.... Il ne peut donc, concernant ces matériels, solliciter une quelconque indemnisation pour défaut de perte de chance de revendre ces matériels à son successeur.

En ce qui concerne le préjudice financier :

S'agissant du paiement des charges sociales :

22. M. A...fait valoir qu'en tant que travailleur indépendant, il a dû continuer à payer les charges sociales de l'année précédente en dépit de la fermeture de son activité et que, en 2015, ne pouvant régler la somme réclamée, le régime sociale des indépendants (RSI) a procédé à une relance amiable avec majorations et lui a demandé de régler la somme de 9 273 euros sous huit jours. De telles obligations sont toutefois sans lien avec la mesure de résiliation qui a été prononcée.

S'agissant de l'application de la clause pénale de 10 % pour résiliation anticipée du contrat de location du terminal bancaire :

23. M. A...a conclu un contrat de location longue durée pour un terminal de cartes bancaires, " établi pour une durée irrévocable de 48 mois ", dont la première échéance était le 30 juin 2012 et la dernière échéance prévue était fixée au 30 mars 2016. Ce contrat, conclu avec un partenaire de la société Locam, d'une part, ne prévoyait pas de clause de résiliation automatique, notamment en cas de cessation d'activité mais prévoyait, au contraire, qu'en cas de résiliation du contrat par le locataire, toutes les échéances trimestrielles seraient dues et que s'ajouterait une " clause pénale " au titre de la résiliation anticipée, d'un montant de 10 % du montant total dû. Ainsi, en 2012, et alors qu'il avait par ailleurs déjà prévu de prendre sa retraite, M. A...a choisi de souscrire un contrat de location longue durée de 4 ans, sans possibilité de sortie anticipée, même en cas de cessation d'activité, alors qu'il ne disposait, en vertu de l'article 11 de la convention du 1er avril 1993, que d'un contrat d'occupation temporaire d'un an, renouvelable. Dans ces conditions, le paiement de cette somme, par application du contrat qu'il a lui-même signé, résulte non pas de la décision de l'université mais de l'imprudence ou d'un choix de gestion de M.A.... Il ne saurait donc être indemnisé à ce titre de l'application de la clause pénale de 10 % pour une résiliation anticipée du contrat, soit une somme de 515,10 euros.

S'agissant des frais de paiement du comptable :

24. M. A...disposait d'un comptable pour établir et clôturer ses comptes. Le paiement de ce comptable trouve son origine dans l'exercice de son activité et non dans la décision de l'université de mettre fin à leurs relations contractuelles. Il n'existe donc pas de lien de causalité entre le fait générateur, à savoir la décision de résiliation anticipée pour motif d'intérêt général et le paiement du comptable pour l'établissement et la clôture des comptes. M. A...n'est donc pas fondé à demander le paiement de la somme de 5 472,82 euros correspondant aux frais de paiement pour clôture du bilan.

S'agissant du paiement des cotisations sociales et patronales de MmeA... :

25. Le 12 mars 2008, M. A...a embauché son épouse en contrat à durée indéterminée en qualité de serveuse. Mme A...a été placée en situation de chômage partiel pour la période du 1er septembre 2013 au 28 février 2014. M. A...a licencié son épouse, avec un préavis de deux mois, pour motif économique par une lettre du 6 mars 2014. A cette occasion, Mme A...a adhéré à un contrat de sécurisation professionnelle à compter du 19 mars 2014 et Pôle Emploi a alors signifié à M. A...qu'à compter du 25 mai 2014, il était redevable de la somme de 6 206 euros au titre de ce contrat de sécurisation professionnelle. M. A...n'ayant pas réglé cette somme, une signification de contrainte, en date du 6 mai 2015, lui a été notifiée par huissier, pour paiement de cette somme, aggravée des majorations de retard et montants dus au titre de cette contrainte. Par une lettre du 7 mai 2015, M.A..., faisant état notamment du décès de sa femme survenue le 7 janvier 2015 a demandé la remise des frais et pénalités appliqués sur ce retard ainsi que la possibilité de s'acquitter de la somme en plusieurs mensualités. Il sollicite ainsi la prise en charge, par l'université, d'une somme de 6 724,90 euros correspondant aux sommes dues à raison de la conclusion, par son épouse, à l'occasion de son licenciement, d'un contrat de sécurisation professionnelle, les sommes dues ne résultent toutefois pas du caractère anticipé de la cessation des relations contractuelles avec l'université mais de la cessation d'activité elle-même. Ainsi, ces sommes ne présentent pas de lien de causalité direct avec la décision de résiliation. M. A...n'est donc pas fondé à en demander la réparation à l'UTC.

S'agissant du préjudice moral :

26. Il ne résulte pas de l'instruction que M. A...aurait subi un préjudice moral du fait de la décision de rupture unilatérale des relations contractuelles. Par suite, cette demande indemnitaire doit être écartée.

27. Il résulte de tout ce qui précède et notamment de ce qui a été dit au point 14 que M. A... est seulement fondé à demander la condamnation de l'UTC à lui verser la somme de 8 000 euros.

Sur les intérêts moratoires :

28. Lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande, préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine.

29. La demande indemnitaire adressée par M. A...à l'UTC a été reçue par cette dernière le 10 mars 2014. Alors même que l'intéressé n'a précisé qu'en appel le préjudice relatif au manque à gagner au titre de l'activité, il se rattache au même fait générateur. Par suite, M. A... a droit aux intérêts légaux sur la somme de 8 000 euros à compter du 10 mars 2014.

30. Il résulte de tout ce qui précède que, s'agissant des questions examinées au titre de l'effet dévolutif, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. S'agissant des chefs de préjudice relatifs à la destruction de certains de ses biens, examinés au titre de l'évocation, en revanche, il résulte de ce qui a été dit aux point 17 à 20 qu'il n'est pas fondé à en demander réparation.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

31. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'UTC la somme de 1 500 euros à verser à M. A...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le même fondement à l'encontre de M. A...qui n'est pas dans la présente instance, la partie principalement perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : L'Université de Technologie de Compiègne versera à M. A...la somme de 8 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 2014.

Article 2 : Le jugement du 22 mars 2016 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 3 : L'Université de Technologie de Compiègne versera à M. A...la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de l'Université de Technologie de Compiègne présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et à l'Université de Technologie de Compiègne.

Délibéré après l'audience publique du 22 mars 2018 à laquelle siégeaient :

- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,

- M. Michel Richard, président-assesseur,

- M. Xavier Fabre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 5 avril 2018.

Le rapporteur

Signé : X. FABRELe premier vice-président de la cour,

président de chambre,

signé : O. YEZNIKIANLe greffier,

Signé : C. SIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des compte publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier en chef,

Par délégation,

Le greffier,

Christine Sire

2

N°16DA00899


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA00899
Date de la décision : 05/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

24-01-02-04 Domaine. Domaine public. Régime. Contentieux de la responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : M. Yeznikian
Rapporteur ?: M. Xavier Fabre
Rapporteur public ?: Mme Fort-Besnard
Avocat(s) : SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-04-05;16da00899 ?
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