Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 ainsi que les pénalités y afférentes.
Par un jugement n° 1404232 du 17 novembre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête introductive d'instance et des mémoires enregistrés le 16 janvier 2017, le 10 juillet 2017, le 3 août 2017, le 29 août 2018 et un mémoire récapitulatif enregistré le 4 mars 2019, M. et MmeB..., représentés par Me Martin, avocat demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 17 novembre 2016 ;
2°) de leur accorder la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mise à leur charge au titre de l'année 2010 ainsi que les pénalités et intérêts y afférents ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,
- le code de justice administrative.
Vu la décision du Conseil d'Etat n° 398405 du 26 avril 2017.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Féral, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Riou, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et MmeB..., associés dans des sociétés en participation (SEP) SUNRA FLUIDE 1109, 1110 et 1111 à hauteur de 4.08 % du capital dans chacune de ces SEP, ont bénéficié pour l'année 2010 de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts à raison d'un investissement réalisé à la Réunion par l'intermédiaire de ces sociétés, consistant en l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à d'autres sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie. L'administration fiscale a remis en cause cette réduction d'impôt. Par un jugement du 17 novembre 2016, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté la demande de M. et Mme B...tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2010 en raison de cette remise en cause, des pénalités et intérêts y afférents.
Sur le bien fondé du jugement :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".
3. Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Cette obligation s'impose à l'administration pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications.
4. D'une part, il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 11 avril 2013, que l'administration, pour estimer que les investissements en litige ne pouvaient être regardés comme réalisés au titre de l'année 2010, a exercé son droit de communication auprès d'EDF, afin d'obtenir des informations sur les dates de dépôt de demandes de raccordement complètes, de réception du certificat du comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité (Consuel) et de mise en production effective des centrales photovoltaïques acquises par les sociétés dont M. et Mme B... étaient les associés. Ces éléments d'information, mentionnés dans la proposition de rectification, qui comportaient l'identité du tiers ayant communiqué à l'administration les renseignements considérés et étaient d'une précision suffisante, ont été portés à la connaissance des contribuables. Les attestations d'EDF étaient d'ailleurs jointes à la proposition de rectification du 11 avril 2013. Par suite, l'administration s'est acquittée de ses obligations d'information et de communication au sens des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, tant en ce qui concerne la teneur que l'origine des renseignements utilisés.
5. D'autre part, M. et Mme B... ont bénéficié d'une procédure de rectification contradictoire au cours de laquelle ils ont été mis en mesure de contester les rectifications proposées par l'administration en apportant tous les éléments justificatifs qui leur paraissaient utiles et n'ont ainsi été privé d'aucune garantie. Dans ces conditions, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que les droits de la défense ont été méconnus.
6. Enfin, dans la mesure où les investisseurs, comme M. et MmeB..., sont des personnes physiques qui n'exercent pas une activité économique, les avantages fiscaux dont ils bénéficient dans le cadre des mesures fiscales pour les investissements productifs outre-mer ne constituent pas une aide d'État au sens de l'article 107, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne. En conséquence, le litige portant sur un avantage fiscal, M. et Mme B...ne peuvent utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ces stipulations ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale. Par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant.
Sur le bien fondé de l'imposition :
7. En premier lieu, aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. / (...) La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé (...) / La réduction d'impôt est de 50 % du montant, hors taxes et hors frais de toute nature (...) des investissements productifs (...) Les projets d'investissement comportant l'acquisition, l'installation ou l'exploitation d'équipements de production d'énergie renouvelable sont pris en compte dans la limite d'un montant par watt installé fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l'outre-mer et de l'énergie pour chaque type d'équipement. (...) Ces taux sont majorés de dix points pour les investissements réalisés dans le secteur de la production d'énergie renouvelable " et aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au même code, dans sa rédaction applicable : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée (...) au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition (...) ".
8. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur de la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B est la date de la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé ou de sa livraison effective dans le département d'outre-mer. Dans ce dernier cas, la date à retenir est celle à laquelle l'entreprise, disposant matériellement de l'investissement productif, peut commencer son exploitation effective et, dès lors, en retirer des revenus. S'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'énergie électrique, la date à retenir est celle du raccordement des installations au réseau public d'électricité, dès lors que les centrales photovoltaïques, dont la production d'électricité a vocation à être vendue par les sociétés exploitantes, ne peuvent être effectivement exploitées et, par suite, productives de revenus qu'à compter de cette date. Il appartient en outre au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction, qu'un contribuable remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de cet avantage fiscal. Cette interprétation des dispositions de l'article 199 undecies B du CGI telle qu'elle a été formulée par le Conseil d'Etat dans sa décision du 26 avril 2017 n° 398405 s'agissant de l'acquisition de centrales photovoltaïques données en location à des sociétés en vue de leur exploitation pour la production et la vente d'électricité, qui ne constitue pas un revirement de jurisprudence et ne présente aucun caractère rétroactif, ne méconnaît pas le principe de sécurité juridique ni, en tout état de cause, le principe de confiance légitime.
9. Il résulte de l'instruction, et notamment des renseignements obtenus auprès d'Electricité de France, qu'aucune des centrales photovoltaïques au titre de laquelle a été pratiquée la réduction d'impôt litigieuse n'avait fait l'objet au 31 décembre 2010 d'une demande de raccordement au réseau électrique, condition pourtant nécessaire à l'exploitation des installations selon l'usage prévu par les investisseurs en vue de bénéficier de l'avantage fiscal correspondant. Aucun certificat de conformité n'avait par ailleurs été délivré à la même date par l'organisme agréé que constitue le Comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité. M. et Mme B...n'apportent aucun élément de nature à infirmer le constat sur lequel s'est fondée l'administration. Dans ces conditions, les installations photovoltaïques à raison desquelles l'avantage fiscal est demandé ne pouvant ni être effectivement exploitées ni être productives de revenus au 31 décembre de l'année 2010 l'administration fiscale, qui n'a pas ajouté aux conditions fixées par la loi fiscale mais s'est bornée à mettre en oeuvre les conditions légales auxquelles les investissements sont soumis pour pouvoir être regardés comme étant réalisés au sens des dispositions du I de l'article 199 undecies B du code général des impôts, a pu à bon droit remettre en cause la réduction d'impôt pratiquée par M. et MmeB....
10. En second lieu, aux termes de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précitées ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement de impôts ou d'autres contributions ou amendes ". Les requérants ne peuvent prétendre au bénéfice de ces stipulations que s'ils peuvent faire état de la propriété d'un bien qu'elles ont pour objet de protéger et à laquelle il aurait été porté atteinte. A défaut de créance certaine, l'espérance légitime d'obtenir une somme d'argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations.
11. M. et Mme B...n'établissent pas qu'au 31 décembre 2010 l'investissement pour lequel ils ont sollicité le bénéfice d'une réduction d'impôt remplissait les conditions prévues par les dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts. Ils ne peuvent ainsi se prévaloir d'aucune espérance légitime, qui doit être regardé comme un bien au sens de l'article premier du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, ce moyen doit être écarté comme inopérant.
12. En dernier lieu, M. et Mme B...ne peuvent utilement se prévaloir des règles relatives à la récupération des aides d'Etat dans la mesure où, comme il été dit au point 6, ils sont des personnes physiques qui n'agissent pas en tant qu'opérateur économique ni n'exercent une activité, consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné, qualifiée d'économique. Par suite, le moyen tiré de ce que le droit de l'Union européenne relatif aux aides d'Etat interdisait à l'administration de demander la restitution de l'avantage fiscal dont ils ont bénéficié doit être écarté comme inopérant. En tout état de cause, il est constant que les centrales photovoltaïques dans lesquelles avaient investi les SEP dont M. et Mme B...étaient associés n'étaient pas raccordées au réseau public d'électricité au 31 décembre 2010, de sorte que les investissements en cause ne pouvaient être regardés comme réalisés au titre de l'année 2010. Ainsi, les requérants ne remplissant pas les conditions pour bénéficier de l'avantage fiscal prévu par les dispositions de l'article 199 undecies B du CGI, ces dispositions permettaient à l'administration de remettre en cause, pour ce seul motif, cet avantage et en conséquence de remettre à la charge des requérants l'imposition correspondante ainsi que cela a été indiqué dans la proposition de rectification.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscale Nord.
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N°17DA00097