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24/10/2019 | FRANCE | N°18DA01217

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 24 octobre 2019, 18DA01217


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé, par deux requêtes distinctes au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laquelle le président du conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure a rejeté sa demande du 3 février 2016 tendant à ce que soient prises toutes mesures utiles visant à faire cesser les faits de harcèlement moral dont elle est victime, d'autre part, d'annuler la délibération du 6 octobre 2016 par

laquelle le conseil d'administration du centre de gestion de la fonction ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... E... a demandé, par deux requêtes distinctes au tribunal administratif de Rouen, d'une part, d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laquelle le président du conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure a rejeté sa demande du 3 février 2016 tendant à ce que soient prises toutes mesures utiles visant à faire cesser les faits de harcèlement moral dont elle est victime, d'autre part, d'annuler la délibération du 6 octobre 2016 par laquelle le conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure a rejeté sa demande de protection fonctionnelle et d'enjoindre au même centre de gestion, à titre principal, de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa demande de protection fonctionnelle dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement commun n° 1601938, 1603921 du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et trois mémoires, enregistrés les 12 juin, 20 septembre, 15 octobre 2018 et 19 septembre 2019, Mme E..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'enjoindre au centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure, à titre principal, de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sur le fondement de l'article L 911-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa demande de protection fonctionnelle dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public ;

- et les observations de Me A..., représentant le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure et de Me B..., représentant Mme E....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., attachée principale au sein du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure, a été recrutée à compter du 1er octobre 2012 pour occuper les fonctions de directrice du pôle " emploi-compétence ". Par lettres du 3 février et du 10 août 2016, elle a demandé au président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure, respectivement, de prendre toutes mesures utiles visant à faire cesser les faits de harcèlement moral dont elle s'estimait victime, et de lui assurer le bénéfice de la protection fonctionnelle. Mme E... relève appel du jugement du 10 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de la décision implicite par laquelle le président du conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure a rejeté sa demande du 3 février 2016 tendant à ce que soient prises toutes mesures utiles visant à faire cesser les faits de harcèlement moral dont elle est victime, d'autre part, de la délibération du 6 octobre 2016 par laquelle le conseil d'administration du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure a rejeté sa demande de protection fonctionnelle, et d'enjoindre au centre de gestion précité de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Mme E... soutient que le tribunal administratif n'a pas motivé son jugement, en ce qu'il écarte le harcèlement, sans pour autant justifier de l'illégalité de sa mutation et du refus de prise en charge psychologique. Cependant le tribunal relève que les obligations de consultation de la commission administrative paritaire et du dossier administratif ont finalement été respectées, quoiqu'avec du retard, celui-ci s'expliquant par la difficulté de saisir la commission administrative paritaire en temps utile et que face, notamment, aux souffrances exprimées par les agents, la décision de déplacer Mme E... sur un poste dépourvu de toute fonction d'encadrement répondait à l'intérêt du service. Le tribunal a aussi considéré, d'autre part, que le refus de prise en charge psychologique n'est entaché d'aucune illégalité dès lors que l'accès au programme " REPERE " ne constitue pas un droit pour les agents susceptibles d'en bénéficier et que la décision du président du centre de gestion ne constituait pas un refus définitif. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait insuffisamment doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le harcèlement moral allégué :

4. Aux termes de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. (...) ". Mme E... n'allègue ni ne justifie avoir demandé la communication des motifs de la décision implicite de rejet de sa demande faite le 3 février 2016 de faire cesser le harcèlement moral dont elle s'estimait l'objet. Par suite, le moyen tiré de l'absence de motivation la décision implicite en litige doit être écarté.

5. Aux termes du premier alinéa de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. ".

6. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

7. Mme E..., qui occupait depuis 2012 les fonctions de directrice du pôle " emploi-compétence ", a été mutée, à compter du 7 septembre 2015, sur le poste de chargée de la cellule juridique. Elle a demandé au président du centre de gestion, par un courrier du 3 février 2016, de prendre toutes mesures utiles visant à faire cesser les faits de harcèlement moral dont elle estimait être victime, mais aucune réponse expresse ne lui a été faite. Elle a alors sollicité auprès du président du centre de gestion, par un nouveau courrier du 10 août 2016, le bénéfice de la protection fonctionnelle. Par une délibération du 6 octobre 2016, le conseil d'administration du centre de gestion a décidé de refuser à Mme E... le bénéfice de la protection fonctionnelle.

8. Mme E... soutient qu'à l'issue de l'entretien du 11 février 2015, lors duquel le président du centre de gestion et la directrice générale des services lui ont appris que ses fonctions de directrice de pôle allaient lui être retirées elle a été placée en congé de maladie pour dépression. Cette circonstance, alors ses fonctions lui ont été retirées pour des motifs tirés de l'intérêt du service, et qu'aucun élément du dossier ne démontre qu'il se soit déroulé dans des conditions anormales, les propos tenus durant l'entretien n'ayant pas excédé les limites normales du pouvoir hiérarchique au regard des difficultés rencontrées au sein du service, dont elle avait connaissance, ou qu'il constituerait un évènement inhabituel dans la carrière d'un agent public, ne permet pas de le regarder comme constituant une mesure de harcèlement moral.

9. Il ressort des pièces du dossier, notamment, qu'au début du mois de décembre 2014, la directrice générale des services du centre de gestion a été alertée par l'assistante de prévention du centre de gestion et deux autres agents de prévention d'une demande de rencontre de la part d'agents du pôle " emploi-compétence " que dirigeait Mme E..., pour souffrance au travail. En outre, au cours d'entretiens entre la directrice générale des services et l'ensemble de ces agents, il est apparu que certains ont exprimé un sentiment de souffrance au travail dont ils rendaient essentiellement responsable Mme E.... Ainsi contrairement à ce que soutient l'appelante, loin de constituer une mesure d'éviction de ses fonctions de directrice du pôle " emploi-compétence " du centre de gestion, ce changement d'affectation intervenu dans l'intérêt du service ne constituait pas une mesure brutale et vexatoire sans lien avec ses responsabilités, alors qu'elle n'établit nullement que la dégradation des conditions de travail n'était pas de son fait mais plutôt la conséquence d'une organisation inadaptée par l'existence de pôles au sein du centre de gestion. La circonstance que ces pôles ont effectivement été supprimés, ne révèle pas, pour autant, une mauvaise organisation des services permettant d'expliquer les difficultés signalées par les agents du pôle " emploi-compétence "

10. Si Mme E... fait aussi valoir qu'aucune mission de prévention n'a été mise en place et que le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail n'a pas été réuni, en dépit du constat de souffrance au travail des agents placés sous sa responsabilité, cette circonstance, à la supposer établie, ne permet toutefois pas, à elle seule, de remettre en cause ce constat.

11. Mme E..., qui est titulaire d'une maîtrise de droit public et d'un diplôme d'études supérieures spécialisées en gestion du personnel, s'est vue chargée, dans le cadre de ses nouvelles fonctions, d'assurer, notamment, une veille juridique et de proposer des documents d'analyse et de vulgarisation relatifs aux réformes législatives et réglementaires susceptibles d'affecter les collectivités territoriales, en particulier dans la gestion de leurs personnels. Elle s'est vue confier, de surcroît, le soin d'assurer un rôle de conseil et d'assistance juridique au centre de gestion s'agissant de ses problèmes d'ordre juridique. Elle ne précise pas quelles sont les formations indispensables à l'exercice de ces missions qui lui auraient été refusées, et ne fait pas non plus valoir qu'elle aurait demandé une formation pour les exercer. Les missions qui ont été ainsi été dévolues à Mme E..., si elles ne comportaient plus la responsabilité des quatorze collaborateurs qu'elle avait auparavant sous ses ordres, correspondaient bien à ses compétences juridiques ainsi qu'aux missions et besoins du centre de gestion, ne caractérisant nullement l'existence d'un quelconque harcèlement moral à l'endroit de l'appelante.

12. La circonstance que la directrice générale des services ait également demandé à Mme E... de mettre systématiquement la directrice du pôle " emploi-ressources " en copie des courriers électroniques qu'elle lui adresse, ne démontre pas une volonté de mettre en place un mode de fonctionnement qui révèlerait l'existence d'un harcèlement moral à son encontre. Mme E..., qui soutient aussi qu'il lui a été fait interdiction de s'adresser directement aux autres agents, ne l'établit pas non plus au regard des pièces du dossier.

13. Si Mme E... soutient que ses dossiers informatiques ont été supprimés, elle ne produit aucun élément probant établissant la réalité de ses affirmations. Elle ne justifie pas non plus, par les pièces qu'elle produit, de la disparition d'affaires personnelles. De même, si elle fait valoir ne pas disposer d'une ligne téléphonique et ne recevoir aucun appel, le centre de gestion produit, en défense, un exemplaire de son annuaire téléphonique, où le nom et les coordonnées de Mme E... apparaissent. Elle avance aussi que les appels téléphoniques qui lui sont destinés ne lui sont pas transmis. Cependant, elle ne produit aucun élément de nature à l'établir. Par suite, elle ne démontre pas qu'elle ne disposait plus d'une ligne téléphonique directe. S'il apparaît aussi qu'effectivement, le bureau de Mme E... a été déménagé, ainsi que ses affaires personnelles, ces circonstances ne constituent que la conséquence de son absence prolongée, suite à son placement en congé de maladie, et de son changement d'affectation.

14. Mme E... fait de surcroît valoir que sa boîte de messagerie électronique a été supprimée, sans que lui aient été restitués ses historiques de messages, ses contacts et agendas. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'elle n'allègue pas non plus avoir demandé la restitution d'éléments qui auraient été supprimés dans la messagerie électronique et que, si elle ne dispose plus d'une adresse électronique professionnelle nominative, elle dispose d'une adresse et d'une boîte de messagerie électronique au nom de la cellule juridique, dont elle est la seule à avoir l'usage. Dans ces conditions, les faits allégués par Mme E... ne sauraient faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard.

15. Si elle soutient également que ses propositions d'actions professionnelles sont laissées sans réponse, il ressort au contraire des pièces du dossier que la directrice générale des services lui a donné des directives et a fait des commentaires précis sur son travail durant les trois mois d'exercice effectif de ses nouvelles fonctions, la seule circonstance qu'elle n'ait alors pas répondu systématiquement à ses propositions ne pouvant suffire à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard. Si Mme E... soutient encore qu'elle n'a pas été invitée à des réunions pourtant en lien avec les thématiques figurant sur sa fiche de poste, et qu'elle fait l'objet quotidiennement d'humiliations et de brimades, ou a été maintenue dans un isolement complet, elle ne produit aucun élément au soutien de ses allégations de nature à l'établir.

16. Mme E... n'est pas plus fondée à soutenir que la décision de mutation à la cellule juridique dont elle a fait l'objet et la décision de réduction de son régime indemnitaire auraient constitué des sanctions disciplinaires déguisées, au motif qu'elles auraient dû être précédées de la consultation de la commission administrative paritaire et de la possibilité de lui permettre de consulter son dossier. Tout d'abord, il ressort des pièces du dossier que, face notamment aux souffrances exprimées par les agents du pôle dirigé par l'intéressée, confirmées lors d'entretiens individuels avec chacun d'eux, révélant des difficultés importantes que ceux-ci rencontraient avec Mme E... et allant, pour certains, à un sentiment de souffrance au travail, la décision de la déplacer sur un poste dépourvu de toute fonction d'encadrement répondait à l'intérêt du service. Il ressort aussi des pièces du dossier, certes, que la commission administrative paritaire n'a rendu son avis sur cette mutation que le 8 octobre 2015, et que Mme E... n'a été invitée à consulter son dossier que le 9 octobre 2015, alors qu'elle avait pris ses nouvelles fonctions le 7 septembre 2015. Si la décision de mutation vers le poste de la cellule juridique est ainsi illégale, faute pour le centre de gestion de l'avoir mise à même de consulter son dossier et d'avoir préalablement consulté la commission administrative paritaire, comme l'a relevé à juste titre le premier juge, la cour n'est pas saisie de la légalité de cette décision, contre laquelle Mme E... n'a pas formé un recours contentieux. En outre, si ces éléments sont de nature à entacher la décision de mutation d'illégalité, il ressort des pièces du dossier que ces obligations ont finalement été respectées, quoiqu'avec du retard, et que ce retard est susceptible d'être expliqué par la difficulté de saisir la commission administrative paritaire en temps utile alors que Mme E... a repris ses fonctions après six mois d'arrêt de travail pour maladie, de sorte que son ancien poste avait été supprimé en raison d'une réorganisation des services et qu'il était alors impossible de la réintégrer dans ses anciennes fonctions dans l'attente de la réunion de la commission administrative paritaire. Il ressort aussi de ces pièces que l'établissement public a jugé nécessaire d'attendre l'avis de la commission administrative paritaire avant d'inviter Mme E... à consulter son dossier. Ensuite, si le régime indemnitaire de Mme E... a fait l'objet d'une diminution conséquente, il ressort des pièces du dossier que celle-ci résulte exclusivement, d'une part, de son changement de fonctions, alors même qu'il n'est pas intervenu à l'issue d'une procédure régulière, l'intéressée n'assumant effectivement plus de fonctions de direction et d'encadrement, et d'autre part, de la baisse de ses indemnités liées à sa manière de servir, compte tenu notamment des entretiens menés auprès de ses agents et d'appréciations négatives portées par des usagers du centre de gestion sur les services du pôle " emploi-compétence ", lorsqu'elle en assumait la direction. Dans ces conditions, les faits allégués par Mme E... ne sauraient faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son égard.

17. Mme E... précise, enfin, que lui a été refusé le bénéfice d'un programme de soutien psychologique à la reprise d'emploi intitulé " Réinsertion professionnelle et nouvel équilibre en reprise d'emploi (REPERE) ". S'il s'agit comme elle le soutient d'une décision malheureuse, dès lors que ce programme aurait pu avoir un effet bénéfique dans le cadre d'une reprise de fonctions sur son nouveau poste, l'accès à ce programme ne constitue pas un droit, et elle aurait pu tenter de convaincre plus qu'elle ne l'a fait son employeur de lui permettre d'en bénéficier. Ainsi, cette décision du centre de gestion ne saurait, à elle seule, permettre de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

18. Compte tenu de l'ensemble de ce qui précède, il ne ressort pas des pièces du dossier que les faits que Mme E... dénonce soient constitutifs d'agissements répétés de harcèlement moral dont elle aurait été victime à l'occasion de ses fonctions, au sens des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

En ce qui concerne la demande de protection fonctionnelle :

19. Aux termes de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 visée ci-dessus, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision en litige : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionnaire. (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / (...) ".

20. Le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 en refusant d'accorder à Mme E... le bénéfice de la protection fonctionnelle, auquel il était nullement tenu, dès lors que, comme il a été dit aux points 4 à 17, l'intéressée, qui n'a pas justifié avoir été victime de faits répétés de harcèlement moral, ou de sanctions disciplinaires déguisées, ne remplissait pas les conditions pour en bénéficier. Par suite, Mme E... n'est pas fondée à ce qu'il soit enjoint à cette autorité de lui accorder le bénéfice de la protection en question ou de procéder à un nouvel examen de sa demande de protection fonctionnelle.

Sur les conclusions du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure tendant à ce que certaines pièces soient écartées des débats :

21. L'article R. 611-1 du code de justice administrative prévoit que : " la requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes ". Le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure demande à la cour, d'écarter des débats les pièces n° 37, 53, 56 et 59 des mémoires de Mme E... au motif qu'il s'agit de pièces qui, soit comportent des données personnelles sans autorisation de la personne concernée, soit emportent une violation du secret professionnel. Il n'y a pas lieu de faire droit à cette demande alors que le juge administratif a le devoir de joindre au dossier, sur production spontanée d'une partie, des éléments d'information, et de statuer, le cas échéant, au vu de ces pièces après en avoir ordonné la communication pour en permettre la discussion contradictoire. En tout état de cause, il n'est pas établi que les pièces concernées auraient été utiles à la solution du litige. Les conclusions précitées doivent, dès lors, être rejetées.

22. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure, que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 10 avril 2018, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Les conclusions qu'elle présente au titre, d'une part, des de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que ses conclusions tendant au prononcé d'injonctions, doivent, par voie de conséquence, être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme E... la somme demandée par le centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure tendant à ce que soient écartées des débats certaines pièces et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... E... et au président du centre de gestion de la fonction publique territoriale de l'Eure.

Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Eure.

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N°18DA01217


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18DA01217
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10-005 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Garanties et avantages divers. Protection contre les attaques.


Composition du Tribunal
Président : M. Albertini
Rapporteur ?: M. Marc Lavail Dellaporta
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : MOISSON

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2019-10-24;18da01217 ?
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