Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 7 juin 2016 par laquelle le directeur du groupe hospitalier de Loos Haubourdin lui a infligé la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, et de condamner ce groupe hospitalier à lui verser une somme de 25 000 euros en indemnisation des préjudices subis, assortie des intérêts moratoires.
Par un jugement n° 1604737 du 12 juillet 2018, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 7 juin 2016 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 septembre 2018 et le 17 janvier 2019, le groupe hospitalier de Loos Haubourdin, représenté par Me D... E..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a prononcé l'annulation de la décision du 7 juin 2016 ;
2°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 89-822 du 7 novembre 1989 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... C..., première conseillère,
- les conclusions de Mme Anne-Marie Leguin, rapporteur public,
- et les observations de Me D... E..., représentant le groupe hospitalier de Loos Haubourdin.
Considérant ce qui suit :
1. Le groupe hospitalier de Loos Haubourdin relève appel du jugement rendu le 12 juillet 2018 par le tribunal administratif de Lille qui a annulé la décision du 7 juin 2016 prononçant à l'encontre de M. A..., ouvrier professionnel qualifié titulaire, la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. L'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige, dispose : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes :/ Premier groupe : / L'avertissement, le blâme ;/ Deuxième groupe :/ La radiation du tableau d'avancement, l'abaissement d'échelon, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ;/ Troisième groupe :/ La rétrogradation, l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans ;/ Quatrième groupe :/ La mise à la retraite d'office, la révocation / (...) / L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. Celui-ci ne peut avoir pour effet, dans le cas de l'exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, de ramener la durée de cette exclusion à moins de un mois (...) ". Aux termes de l'article 9 du décret du 7 novembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires relevant de la fonction publique hospitalière : " Le conseil de discipline, compte tenu des observations écrites et des déclarations orales produites devant lui, ainsi que des résultats de l'enquête à laquelle il a pu être procédé, émet un avis motivé sur les suites qui lui paraissent devoir être réservées à la procédure disciplinaire engagée. / A cette fin, le président du conseil de discipline met aux voix la proposition de sanction la plus sévère parmi celles qui ont été exprimées lors du délibéré. Si cette proposition ne recueille pas l'accord de la majorité des membres présents, le président met aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée jusqu'à ce que l'une d'elles recueille un tel accord. / Si aucune proposition de sanction n'est adoptée, le président propose qu'aucune sanction ne soit prononcée (...) ".
3. Il ressort du procès-verbal du conseil de discipline réuni le 10 mai 2016 pour examiner la situation de M. A..., que le président de ce conseil a mis aux voix deux sanctions seulement, en premier lieu la révocation, sanction du quatrième groupe proposée par l'administration hospitalière et la plus sévère dans l'échelle des sanctions établie par l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 précité, puis, en second lieu, l'exclusion temporaire de fonctions pendant une durée d'un an assortie d'un sursis de onze mois, sanction du troisième groupe dans l'échelle des sanctions suggérée par le défenseur de M. A... au cours de la réunion du conseil de discipline. En l'absence d'une majorité sur l'une de ces sanctions, chacune d'elle ayant recueilli deux voix pour et deux voix contre, le conseil de discipline a décidé que la décision finale reviendrait à l'autorité hiérarchique détentrice du pouvoir disciplinaire. Par suite, l'avis émis par le conseil de discipline, qui a été adopté sans que le président mette aux voix les autres sanctions figurant dans l'échelle des sanctions disciplinaires en commençant par la plus sévère après la sanction proposée, est entaché d'un vice au regard de la procédure de vote prévue par les dispositions précitées de l'article 9 du décret du 7 novembre 1989.
4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. Le procès-verbal de la réunion du conseil de discipline ne retrace aucune intervention des représentants du personnel durant sa phase d'échanges. Par suite, si ces deux membres ont voté contre la révocation et pour l'exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, ramenée à son plancher effectif incompressible d'un mois par l'effet des dispositions précitées de l'article 81 de la loi du 9 janvier 1986 sur le sursis dont cette sanction peut être accompagnée, cette circonstance n'induit pas nécessairement qu'ils n'auraient pas accepté une sanction plus lourde que celle pour laquelle ils ont voté. Inversement, il ne ressort ni du procès-verbal, ni d'aucune autre pièce du dossier que les deux représentants de l'administration auraient été résolus à ne voter que pour la révocation, ainsi qu'ils l'ont fait quand cette sanction a été mise aux voix. S'ils ont ensuite voté contre l'exclusion temporaire de fonctions d'un an assortie d'un sursis de onze mois, cette circonstance n'induit pas nécessairement qu'ils n'auraient pas accepté une sanction moins lourde que la révocation mais cependant supérieure à une exclusion temporaire de fonctions effective d'un mois. Dès lors, et comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, le vice de procédure entachant l'émission de l'avis du conseil de discipline a privé M. A... d'une garantie, et entraîne l'annulation de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux ans qui lui a été infligée.
6. Il résulte de ce qui précède que le groupe hospitalier de Loos Haubourdin n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 7 juin 2016 prononçant à l'encontre de M. A... la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. A..., qui n'est, dans la présente instance, ni partie perdante, ni tenu aux dépens, verse au groupe hospitalier de Loos Haubourdin la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, sur le fondement de ces mêmes dispositions et dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du groupe hospitalier de Loos Haubourdin une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du groupe hospitalier de Loos Haubourdin est rejetée.
Article 2 : Le groupe hospitalier de Loos Haubourdin versera à M. A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au groupe hospitalier de Loos Haubourdin et à M. F... A....
N°18DA01856 2