Vu la décision en date du 21 février 1989, enregistrée au greffe de la cour le 3 mars 1989, par laquelle le président de la 1ère sous-section de la section du contentieux du conseil d'Etat a transmis à la cour, en application de l'article 17 du décret n° 88-906 du 2 septembre 1988, la requête présentée par le ministre des affaires sociales et de l'emploi ;
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du conseil d'Etat le 30 mars 1988, et tendant à la réformation du jugement en date du 8 janvier 1988 par lequel le tribunal administratif de LYON a condamné l'Etat à verser :
- à M. et Mme Daniel Y..., la somme de 200 000 francs avec intérêts de droit à compter du 29 octobre 1984, en réparation des conséquences dommageables de l'incapacité dont leur fils, Jean-Claude, est atteint du fait de la vaccination antipoliomyélitique obligatoire qu'il a subie le 30 septembre 1983 ;
- au jeune Jean-Claude, une rente annuelle de 130 000 francs payable par trimestres échus avec jouissance du 20 octobre 1983, jusqu'au 1er juillet 2002 ;
- à la caisse primaire d'assurance maladie de ROANNE, la somme de 124 411,89 francs en remboursement de ses débours ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 77-1488 du 3O décembre 1977 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987, le décret n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 22 juin 1989 :
- le rapport de Mme du GRANRUT, conseiller ;
- les observations de Me X..., substituant la SCP RICHE, BLONDEL, THOMAS-RAQUIN, avocat de M. et Mme Daniel Y... ;
- et les conclusions de M. ROUVIERE, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant que par jugement en date du 8 janvier 1988, le tribunal administratif de LYON a déclaré l'Etat entièrement responsable des conséquences dommageables de l'incapacité permanente totale dont Jean-Claude Y... demeure atteint à la suite d'une vaccination obligatoire, et l'a condamné à lui verser une rente, ainsi qu'une indemnité à ses parents ; qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, que la paraplégie des membres inférieurs dont Jean-Claude Y... est atteint est en relation directe avec la vaccination antipoliomyélitique obligatoire qu'il a subie le 30 septembre 1983 ; qu'aux termes de l'article L 10-1 du code de la santé publique "la réparation de tout dommage imputable directement à une vaccination obligatoire ... est supportée par l'Etat" ; qu'il suit de là que l'Etat doit être déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de la vaccination obligatoire que Jean-Claude Y... a subie le 30 septembre 1983 et que c'est à bon droit que le tribunal administratif a statué sur la responsabilité ci-dessus rappelée ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'en fixant à 200 000 francs avec les intérêts au taux légal à partir du 29 octobre 1984, l'indemnité à verser à M. et Mme Y..., le tribunal administratif de LYON a fait une juste appréciation des troubles de toute nature apportés dans leurs conditions d'existence par l'infirmité de leur fils ;
Considérant qu'en accordant une rente fixée à 130 000 francs à leur fils Jean-Claude, avec jouissance du 20 octobre 1983 et ce jusqu'à sa majorité, les premiers juges n'ont pas fait une appréciation insuffisante des préjudices subis par Jean-Claude Y... qui est atteint d'une invalidité à 100 % non susceptible d'amélioration et dont l'état necéssite, au moins jusqu'à sa majorité, l'aide constante d'une tierce personne ; qu'il convient que ladite somme soit majorée par application des coefficients de revalorisation prévus par l'article L 455 du code de la sécurité sociale ; qu'il suit de tout ce qui précède que le ministre des affaires sociales et de l'emploi n'est pas fondé à demander que les sommes qu'il a été condamné à verser à M. et Mme Y... et à Jean-Claude Y..., par le jugement attaqué, soient réduites ;
Sur les conclusions de l'appel incident de M. et Mme Y... :
Considérant que les modalités d'aménagement du logement de M. et Mme Y... ne sauraient être regardées comme nécessitées par la seule difficulté de motricité du jeune Jean-Claude, que dès lors, ils ne sont pas fondés à réclamer une indemnité pour le coût de cet aménagement ;
Sur la capitalisation :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 4 novembre 1988 ; qu'à cette date il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil il y a lieu de faire droit à cette demande ;
En ce qui concerne le droit de la caisse primaire d'assurance maladie :
Considérant que, par mémoire produit le 17 mars 1989, la caisse primaire d'assurance maladie de ROANNE fait état de prestations servies à Jean-Claude Y... au 23 janvier 1988 pour un montant de 162 115,63 francs ; qu'il y a lieu de porter à cette somme la condamnation de l'Etat à l'égard de la caisse ; qu'en revanche il n'y a pas lieu de retenir le forfait pour l'aide d'une tierce personne demandée par la caisse primaire d'assurance maladie de ROANNE, M. Y... étant directement indemnisé de ce chef ;
Article 1er : La requête du ministre des affaires sociales et de l'emploi est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'appel incident de M. et Mme Y... sont rejetées.
Article 3 : Les intérêts de la somme de 200 000 francs que l'Etat est condamné à verser à M. et Mme Y... à compter du 29 octobre 1984 seront capitalisés à la date du 4 novembre 1988 pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : L'Etat est condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de ROANNE la somme de 162 115,63 francs.
Article 5 : L'article 3 du jugement de 1ère instance est modifié en ce qu'il a de contraire à la présente décision.