Vu le recours sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la cour les 28 mars et 28 avril 1989, présentés par le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace ;
Le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 décembre 1988 du tribunal administratif de Marseille en ce qu'il a partiellement fait droit à la demande de la société GENERAL EXPORT tendant à obtenir, à concurrence de 27 220,88 francs, la décharge des redevances téléphoniques réclamées pour la période du 22 février 1984 au 28 janvier 1985 ;
2°) de remettre la totalité desdites redevances à la charge de la société GENERAL EXPORT ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des postes et télécommunications ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 5 mars 1991 :
- le rapport de Mme DEVILLERS, conseiller ;
- et les conclusions de M. CHAVRIER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace conteste le jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a déchargé la société GENERAL EXPORT des redevances téléphoniques d'un montant de 24 208,38 francs qui lui ont été réclamées pour la période du 22 février 1984 au 28 janvier 1985 ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'aux termes de l'article R.159 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable : "Lorsque l'affaire est en état, le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Les lettres recommandées avec demande d'avis de réception portant notification de cette ordonnance sont envoyées à toutes les parties en cause quinze jours au moins avant la date de la clôture fixée par ordonnance. ... Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas visés dans le jugement, les conclusions et moyens qu'ils contiennent ne sont pas examinés par le tribunal administratif." ;
Considérant qu'à la supposer établie, la circonstance que l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction au 15 novembre 1988 ne serait pas parvenue au ministre des postes, des télécommunications et de l'espace en temps utile pour lui permettre de présenter sa défense avant cette date, avait pour seul effet de lui rendre ladite ordonnance inopposable et de lui permettre de déposer utilement un mémoire postérieurement à la date ainsi fixée ; qu'il est constant qu'en dépit de la mise en demeure qu'il a reçue plus de neuf mois avant l'audience, le ministre n'a produit aucun mémoire ; qu'il s'ensuit qu'il n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière ;
Sur le bien-fondé des facturations :
- En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'instruction du 7 avril 1983 :
Considérant que la société GENERAL EXPORT ne précise pas en quoi l'administration aurait méconnu cette instruction ; que ce moyen ne peut donc qu'être rejeté ;
- En ce qui concerne les relevés D3 et D4 :
Considérant que lorsqu'un abonné du téléphone conteste le fonctionnement des appareils chargés d'enregistrer les consommations demandées à partir de son poste, il appartient au juge de former sa conviction à partir des éléments du dossier et notamment de ceux produits par l'abonné qui doit apporter des indices concordants de nature à faire regarder ces facturations comme ne correspondant pas à l'utilisation effective de l'installation ;
Considérant que la société GENERAL EXPORT se borne à faire état du caractère anormalement élevé des factures d'un montant total de 19 644,22 francs établies au titre des relevés D3 et D4 sans produire le moindre indice conduisant à mettre en doute le bon fonctionnement de l'installation ; que, par suite, ladite société n'est pas fondée à contester les redevances qui lui ont été réclamées pour la période couverte par ces deux relevés ;
- En ce qui concerne les relevés C6 et C1 :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le service de la facturation détaillée dont la société avait demandé le bénéfice et qui aurait dû être assuré pour toute la période correspondant aux relevés C6 et C1, ne l'a été que pour la période du 16 au 28 janvier 1985 correspondant à une partie du relevé C1 ; qu'ainsi, dès lors que la période précédemment évoquée correspondait au début de l'activité de la société GENERAL EXPORT qui se trouvait ainsi hors d'état de se référer au volume de ses communications habituelles, l'administration qui, de son propre fait, a privé le société de la possibilité d'apporter la preuve de l'exagération des deux factures litigieuses doit, dans les circonstances de l'espèce, établir que la somme réclamée correspond à l'utilisation effective de l'installation ;
Considérant, en premier lieu, que le ministre a produit en appel, s'agissant du relevé C6, les résultats de la mise en observation des trois lignes de la société pendant la période du 1er août au 29 octobre 1984 ; que pour cette période, l'administration a ainsi justifié, à concurrence de la somme de 7 163,75 francs des sommes réclamées au titre de ce relevé pour les communications ;
Considérant, en revanche, que ni la circonstance que la mise en observation a révélé une forte consommation pour la période du 1er août au 29 octobre 1984, ni les résultats des vérifications et enquêtes qui, effectuées en août et octobre de la même année, n'ont révélé aucune erreur ni anomalie, n'établissent à elles seules le caractère normal des redevances réclamées à la société pour la période du 29 octobre au 26 novembre 1984 ; que, par suite, les sommes dont le ministre a établi le bien-fondé au titre du relevé C6, doivent être arrêtées à 7 693,75 francs ;
Considérant, en deuxième lieu, que s'agissant du relevé C1, l'administration a produit devant la cour une facturation détaillée partielle portant sur la période du 16 au 28 janvier 1985 ; qu'il résulte de l'examen de ce document que le montant des communications s'élève pour cette période à la somme de 2 422,50 francs ; que l'administration a ainsi établi dans cette limite le bien-fondé de la facturation en question ;
Considérant, en revanche, que ni les enquêtes ni les vérifications auxquelles l'administration a procédées antérieurement, n'établissent à elles seules que la consommation facturée, au titre de ce relevé, pour la période antérieure au 16 janvier, correspond à l'utilisation effective de l'installation ; qu'il s'ensuit que s'agissant du relevé C1, compte tenu du coût de l'abonnement, les redevances dont l'administration justifie le bien-fondé s'élèvent à 3 012,50 francs ;
Considérant qu'il résule de ce qui précède que la société GENERAL EXPORT est redevable au titre de l'ensemble des relevés litigieux de la somme de 30 350,47 francs ; qu'après déduction de la somme de 11 512,50 francs qu'elle a spontanément réglée, la somme dont elle demeure redevable s'élève à 18 837,97 francs ; qu'il s'ensuit que le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace est fondé, dans cette limite, à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Marseille ;
Article 1er : Les redevances restant dues par la société GENERAL EXPORT sont arrêtées à la somme de 18 837,97 francs.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 15 décembre 1988 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.