Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour les 18 novembre et 23 décembre 1991, présentés pour M. Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 19 septembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'ordre de reversement émis à son encontre le 30 septembre 1986 par le Recteur de l'Académie de Lyon correspondant à un trop versé en matière de supplément familial de traitement ;
2°) d'annuler ledit ordre de reversement et d'ordonner le versement du supplément familial de traitement sur la base de trois enfants jusqu'au 27 juillet 1991 ;
. Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale, et notamment son article L. 525 ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu le décret n° 74-652 du 19 juillet 1974 modifié relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 1994 :
- le rapport de M. JOUGUELET, président-rapporteur ;
- et les conclusions de M. RICHER, commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. et Mme Y..., fonctionnaires de l'Education nationale, ont assumé l'un et l'autre la charge de leurs deux enfants jusqu'en 1976 date à laquelle la garde desdits enfants a été confiée à leur mère ; que M. Y... qui s'est remarié en 1980 a eu ensuite deux enfants, Stéphane né le 8 juillet 1981 et Emilie née le 7 avril 1984 ; qu'il a perçu un supplément familial de traitement calculé sur la base de trois enfants à partir du mois de juillet 1981 puis de quatre enfants à partir du mois d'avril 1984 ; que l'administration qui a estimé que la première épouse de M. Y... devait percevoir elle-même ledit supplément à raison des deux enfants à sa charge, a émis le 30 septembre 1986 un ordre de reversement à l'encontre de M. Y... pour obtenir le remboursement du supplément qui lui a été versé entre ces deux dates puis de la différence entre le montant du supplément dû pour ses deux derniers enfants et le montant qui lui avait été versé après avril 1984 sur la base de quatre enfants ; que M. Y... demande l'annulation de cet ordre de reversement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : "Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire, s'y ajoutant les prestations familiales obligatoires" ; qu'en vertu de l'article 12 du décret susvisé du 19 juillet 1974, la notion d'enfant à charge à retenir pour déterminer l'ouverture du droit au supplément familial de traitement "est celle fixée en matière de prestations familiales par le titre II du livre V du code de la sécurité sociale" ; qu'aux termes de l'article L. 525, alors en vigueur, du code de la sécurité sociale : "Les allocations sont versées à la personne qui assume, dans quelques conditions que ce soit, la charge effective et permanente de l'enfant." ;
Considérant, en premier lieu, que si les deux enfants issus du premier mariage de M. Y... ont été confiés à la garde de leur mère, cette circonstance ne saurait faire obstacle à ce que ces enfants soient regardés comme ouvrant droit, de même que les deux autres enfants nés de la seconde union de M. Y..., au supplément familial de traitement du chef de ce dernier, nonobstant la circonstance que Mme Y... est elle-même fonctionnaire ; que le supplément familial de traitement ainsi calculé d'abord sur une base de trois enfants à compter du mois de juillet 1981 puis sur la base de quatre enfants après le 7 avril 1984 devait ensuite être partagé entre M. Y... et son ex-épouse ; qu'en application des textes précités, ce partage devait être effectué au prorata des enfants respectivement à leur charge ;
Considérant, en second lieu, que selon l'article 97 de l'acte dit loi du 14 septembre 1941, modifié par l'article 1er de la loi du 25 septembre 1942, resté en vigueur jusqu'à l'intervention de la loi du 26 juillet 1991 : "dans un ménage de fonctionnaires, les avantages prévus au présent article ne se cumulent pas" ; que la même règle s'applique à des parents fonctionnaires après un divorce ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que sa première femme et lui-même avaient droit chacun à un supplément familial de traitement prenant en compte les deux enfants nés de leur mariage et à réclamer le versement entre ses mains de la totalité du supplément calculé comme indiqué ci-dessus ;
Considérant, en troisième lieu, que la prescription édictée par la loi susvisée du 31 décembre 1968 n'est pas opposable à l'Etat ; que M. Y... ne peut donc utilement invoquer ses dispositions pour contester le fait que l'administration a opéré un rappel de droits portant sur cinq années ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y..., qui ne peut opposer à l'administration une convention passée avec son ex-épouse selon laquelle il lui aurait rétrocédé une partie dudit supplément, est seulement fondé à demander l'annulation de l'ordre de reversement en tant qu'il a mis à sa charge le remboursement de la différence entre le montant du supplément tel qu'il lui avait été versé initialement et celui résultant du partage de ce supplément entre lui-même et son ex-épouse selon la règle exposée ci-dessus ;
Considérant enfin que les conclusions de M. Y... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser le montant du supplément familial de traitement correctement calculé depuis 1986 et jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 26 juillet 1991 constituent une demande nouvelle en appel et sont, de ce fait, irrecevables ;
Article 1er : Le supplément familial de traitement qui doit être versé à M. Y... pour la période du mois de juillet 1981 au mois d'avril 1984 est fixé au tiers du supplément familial de traitement calculé sur le traitement qu'il percevait à l'époque et pour trois enfants à charge ; le supplément pour la période suivante, jusqu'à la date d'effet de l'ordre de reversement contesté, est fixé à la moitié du supplément calculé pour quatre enfants à charge.
Article 2 : L'ordre de reversement en date du 30 septembre 1986 émis par le recteur de l'Académie de Lyon est annulé en tant qu'il a mis à la charge de M. Y... le remboursement de sommes excédant celles résultant de l'article premier ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du 19 septembre 1991 du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. Y... est rejeté.