Vu, enregistrée au greffe de la cour le 7 avril 1995, la requête présentée pour la SCP LESEUIL ET RAMBERT, commissaires priseurs, dont le siège est à Hôtel des ventes des Tuiliers, ..., ayant pour avocat Me BONNARD ;
La SCP LESEUIL et RAMBERT demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 25 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté le 29 juin 1992 son opposition au commandement émis à son encontre par le directeur de la caisse de crédit municipal de Lyon pour avoir paiement de la somme de 143 506,20 francs correspondant à des pertes sur vente de gages ;
2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer ;
3°) à titre subsidiaire, de réduire le montant du débet mis à sa charge par cet état exécutoire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les règlements d'administration publique du 30 décembre 1936, notamment celui déterminant l'organisation des caisses de crédits municipal, ensemble le règlement y annexé ;
Vu le décret n° 89-79 du 8 février 1989 relatif aux caisses de crédit municipal ;
Vu le règlement particulier de la caisse de crédit municipal de Lyon approuvé par arrêté du ministre des finances du 5 mars 1946 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 1996 :
- le rapport de Mlle PAYET, conseiller ;
- les observations de Me GAUCHER substituant Me BONNARD, avocat de la SCP LESEUIL ET RAMBERT et de Me GRANJON, avocat du crédit municipal de Lyon ; - et les conclusions de M. JOUGUELET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la société civile professionnelle LESEUIL et RAMBERT demande l'annulation du jugement en date du 25 janvier 1995 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté son opposition au commandement émis à son encontre le 29 juin 1992 par le directeur de la Caisse de crédit municipal de Lyon (CCML) pour un montant de 143 506,50 francs en raison de pertes sur les ventes d'oeuvres d'art remises en nantissement et dont ladite société avait apprécié la valeur en vue de l'octroi de prêts par l'établissement public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 alinéa 5 de la loi du 24 juin 1851 , en sa rédaction issue d'un décret-loi du 30 octobre 1935 : "L'organisation des monts-de-piété et caisses de crédit municipal est déterminée par un réglement-type dont les dispositions seront fixées par réglement d'administration publique pris sur la proposition du ministre des finances." ; qu'en application de ces dispositions, le décret du 30 décembre 1936 a en son article 1er, défini le contenu du réglement-type, par référence à une annexe ; que le décret n° 55-622 du 20 mai 1955, qui a valeur législative, a abrogé en son article 5 la loi du 24 juin 1851 ainsi que toutes dispositions législatives et réglementaires contraires et a renvoyé par son article 3 à des réglements d'administration publique le soin de déterminer l'organisation et le fonctionnement des caisses de crédit municipal, et notamment leur régime financier ; que, par suite, le réglement annexé au décret du 30 décembre 1936 ne constitue plus un réglement-type mais un réglement d'application directe ; que le décret n° 89-79 du 8 février 1989 en son article 6 a abrogé le réglement annexé précité à l'exception des articles 26 à 30 inclus et 33 à 47 inclus ; qu'il suit de là que les dispositions du réglement particulier de la caisse de crédit municipal de Lyon, qui a été approuvé par un arrêté du ministre des finances en date du 5 mars 1946, ne demeurent applicables que dans la mesure où elles ne sont pas contraires au décret du 30 décembre 1936 modifié par le décret du 8 février 1989 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 27 du réglement annexé au décret du 30 décembre 1936, dans sa rédaction alors applicable : "L'appréciation des objets remis en nantissement est faite par des commissaires-priseurs qui sont désignés pour une durée de trois ans renouvelable, par le directeur de chaque caisse de crédit municipal." ; que, dès lors, l'article 30 du réglement particulier de la caisse, en vertu duquel la désignation des appréciateurs est effectuée par le préfet, est contraire aux dispositions susmentionnées et, par voie de conséquence, ne pouvait être légalement applicable ; que, dans ces conditions, la SCP requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 12 juillet 1991 du directeur de la caisse, qui la désigne en qualité d'appréciateur, a été pris par une autorité incompétente ; que, par suite et en tout état de cause, elle ne saurait exciper de l'illégalité de cet arrêté pour contester sa responsabilité envers l'établissement public ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 du même réglement annexé au décret du 30 décembre 1936 : "Les appréciateurs sont responsables envers l'établissement des suites de leurs évaluations ; en conséquence, lorsqu'à défaut de dégagement ou de renouvellement il sera procédé à la vente d'un nantissement, si le produit de cette vente ne suffit pas pour remplir l'établissement des sommes prêtées d'après ces évaluations, ainsi que de ce qui se trouvera lui être dû tant pour les intérêts afférents à la durée du prêt, augmentée d'un mois si cette durée est de six mois et de deux mois si elle est d'un an, que pour les droits accessoires dus pour la durée du prêt, ils seront tenus de lui rembourser la différence. Toutefois, si cette différence est reconnue provenir en tout ou partie de circonstances particulières et indépendantes de la capacité des appréciateurs, le conseil d'administration pourra accorder la remise totale ou partielle du débet par délibération soumise à l'avis du préfet et à l'approbation du ministre des finances. En aucun cas cette responsabilité ne peut être supprimée ni atténuée par avance directement ou indirectement par une décision de l'administration de l'établissement, sauf en ce qui concerne les droits spéciaux de garage et de magasinage pour lesquels elle est limitée à 10% du montant du prêt consenti. Cette responsabilité est solidaire entre les appréciateurs lorsque ces fonctions sont exercées par plusieurs commissaires-priseurs. En garantie de cette responsabilité, les appréciateurs doivent verser dans la caisse de l'établissement des cautionnements dont le montant est fixé par le conseil d'administration." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCP a procédé à l'appréciation de plusieurs oeuvres d'art qui ont été utilisées comme gages pour 3 prêts effectués les 2 et 6 août et 9 octobre 1991 ; qu'ultérieurement la caisse a dû procéder à leur réalisation, ce qui a entraîné une perte, qui a été mise à la charge de la société requérante ;
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que ladite société ait résigné ses fonctions d'appréciateur postérieurement aux prêts dont s'agit, n'est pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité qui est encourue du seul fait de l'opération d'appréciation à laquelle elle s'est livrée les 1er et 6 août et 7 octobre 1991 dans des conditions d'ailleurs régulières ; qu'au surplus il est constant que sa démission n'avait pas été acceptée par le directeur de la caisse ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société requérante ne peut utilement invoquer, pour obtenir la réduction du montant de la somme qui lui est réclamée, la circonstance, à la supposer établie, que la caisse n'aurait pas créé un fonds destiné à recueillir les cautionnements en vue de garantir la responsabilité solidaire des appréciateurs, dès lors que sa responsabilité est recherchée à titre personnelle et non à titre solidaire ;
Considérant que, en troisième lieu, elle ne peut non plus utilement invoquer la circonstance que la publicité effectuée par la caisse préalablement à la vente des gages n'a pas été faite dans un délai suffisant comme il est prévu à l'article 42 du réglement annexé au décret du 30 décembre 1936, et qu'elle serait à l'origine de la faiblesse des résultats de la vente, dès lors qu'elle a refusé d'organiser elle-même cette vente alors que sa démission n'avait pas été acceptée ; que, par ailleurs, et en tout état de cause, il n'est pas établi que les conditions de la vente aient eu les effets qu'elle dénonce ;
Considérant, enfin, que la SCP n'est pas recevable à demander directement au juge d'accorder une remise gracieuse de sa dette ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCP LESEUIL et RAMBERT n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, il y a lieu de condamner la SCP LESEUIL et RAMBERT à payer à la CAISSE DE CREDIT MUNICIPAL DE LYON la somme de 5 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er : La requête de la SCP LESEUIL ET RAMBERT est rejetée.
Article 2 : La SCP LESEUIL ET RAMBERT paiera à la CAISSE DE CREDIT MUNICIPAL DE LYON la somme de 5 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.