enregistrée au greffe de la cour le 24 mars 2000 sous le n 00LY00706, la requête présentée par le DEPARTEMENT DE L'YONNE, représenté par le président du conseil général ;
Le DEPARTEMENT DE L'YONNE demande à la cour :
a) d'annuler le jugement n 985518 en date du 1er février 2000 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé une décision du 16 février 1998 portant rejet de la demande d'agrément en vue d'une adoption présentée par M. Daniel X..., condamné le DEPARTEMENT DE L'YONNE à verser la somme de 5 000 francs à M. X... et enjoint audit département de délivrer l'agrément demandé dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;
b) de prononcer un sursis à l'exécution dudit jugement ;
Vu 2 ), l'ordonnance du 25 août 2000 par laquelle le président de la cour a, en application de l'article R.222-3 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, ouvert une procédure juriditionnelle concernant la demande présentée par M. X... sur le fondement de l'article L.8-4 du même code et tendant à ce que la cour assure l'exécution par le DEPARTEMENT DE L'YONNE du jugement susvisé du tribunal administratif de Dijon en date du 1er février 2000 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le décret n 85-938 du 23 août 1985 relatif à l'agrément des personnes qui souhaitent adopter un pupille de l'Etat ;
Vu le décret n 98-771 relatif à l'agrément des personnes qui souhaitent adopter un pupille de l'Etat ou un enfant étranger ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2000 :
- le rapport de M. BOUCHER, premier conseiller ;
- les observations de Me JOURDA, avocat de M. X... ;
- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées du DEPARTEMENT DE L'YONNE et de M. X... tendent respectivement à l'annulation et à l'exécution du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre afin de statuer par un seul et même arrêt ;
Sur la requête du DEPARTEMENT DE L'YONNE :
En ce qui concerne la légalité de la décision de refus d'agrément du 16 février 1998 :
Considérant qu'aux termes de l'article 63 du code de la famille et de l'aide sociale, dans sa rédaction issue de la loi n 96-604 du 5 juillet 1996 : " Les pupilles de l'Etat peuvent être adoptés ( ...) par des personnes agréées à cet effet ( ...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 4 du décret du 23 août 1985 relatif à l'agrément des personnes qui souhaitent adopter un pupille de l'Etat, en vigueur à la date de la décision attaquée : " Pour l'instruction de la demande, le responsable du service d'aide sociale à l'enfance fait procéder à toutes les investigations permettant d'apprécier les conditions d'accueil que le demandeur est susceptible d'offrir à des enfants sur les plans familial, éducatif et psychologique " et que, selon l'article 9 du même décret : " Tout refus d'agrément doit être motivé dans les conditions fixées à l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 susvisée. Il ne peut être motivé par la seule constatation de l'âge ou de la situation matrimoniale du demandeur ou de la présence d'enfants à son foyer " ; qu'en vertu de l'article 100-3 du code de la famille et de l'aide sociale, les dispositions précitées sont applicables aux personnes qui souhaitent accueillir, en vue de son adoption, un enfant étranger ;
Considérant que par une décision du 16 février 1998, le président du conseil général de l'Yonne a rejeté la demande d'agrément présentée par M. X... au motif que les conditions d'environnement affectif offertes par l'intéressé et sa conception de la cellule familiale ne seraient pas de nature à garantir le support indispensable à l'épanouissement d'un enfant sur les plans familial, psychologique et éducatif, en raison du fait qu'il était conscient dès l'âge de dix-sept ans de ce qu'il vivrait seul et de son choix de ne pas constituer une famille composée d'un couple parental ;
Considérant qu'il ressort de l'ensemble des pièces du dossier qu'en dépit de l'avis réservé émis par l'auteur du rapport d'instruction psychologique et fondé sur le caractère " discutable " de la démarche d'adoption de " ce célibataire " " malgré l'absence de troubles psychopathologiques ", M. X..., eu égard à sa motivation ainsi qu'à ses qualités humaines et à ses capacités éducatives, telles qu'elles ressortent tant du rapport d'instruction sociale qui est assorti d'un avis favorable sans réserve que des antécédents professionnels de l'intéressé en qualité d'éducateur, présente des garanties suffisantes en ce qui concerne les conditions d'accueil qu'il est susceptible d'offrir à un enfant sur les plans familial, psychologique et éducatif ; que, dès lors, en rejetant la demande d'agrément de M. X..., le président du conseil général de l'Yonne a fait une inexacte application des dispositions législatives et réglementaires précitées ; que, par suite, le DEPARTEMENT DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision susmentionnée du 16 février 1998 ;
En ce qui concerne l'injonction prononcée par le tribunal administratif :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : " Lorsqu'un jugement ou un arrêt implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, saisi de conclusions en ce sens, prescrit cette mesure, assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution, par le même jugement ou le même arrêt. " ;
Considérant que, se fondant sur ces dispositions, le tribunal administratif a prescrit au DEPARTEMENT DE L'YONNE de délivrer à M. X... l'agrément demandé dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;
Considérant que, compte tenu du motif pour lequel elle a été prononcée, l'annulation de la décision de refus d'agrément du 16 février 1998 implique, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un autre motif ou qu'un quelconque changement dans la situation de droit ou de fait y fasse obstacle, que l'agrément sollicité par M. X... lui soit délivré ; que, par suite, le DEPARTEMENT DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont prescrit cette délivrance ;
Sur la demande d'exécution présentée par M. X... :
Considérant que la confirmation par le présent arrêt du jugement attaqué, en tant qu'il prescrit au DEPARTEMENT DE L'YONNE de délivrer à M. X... l'agrément demandé dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit jugement, prive d'objet les conclusions de M. X... tendant à ce que la cour prescrive au DEPARTEMENT DE L'YONNE de lui délivrer ledit agrément dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir l'injonction prononcée par le tribunal administratif d'une astreinte ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, de condamner le DEPARTEMENT DE L'YONNE à verser à M. X... une somme de 5 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du DEPARTEMENT DE L'YONNE est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X... tendant à ce que la cour prescrive au DEPARTEMENT DE L'YONNE de lui délivrer un agrément en vue de l'adoption d'un enfant.
Article 3 : Le DEPARTEMENT DE L'YONNE versera à M. X... une somme de cinq mille francs (5 000 F.) en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. X... est rejeté.