Vu, enregistrée le 30 juin 1999, sous le n°99LY01890, la requête présentée pour Mme Maria X, demeurant ... par la SCP Detruy-Lafond-Meilhac, avocats ;
Mme X demande à la Cour :
1') d'annuler le jugement n° 9771 en date du 12 mai 1999 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision de son licenciement par le président du Conseil Général du CANTAL et d'autre part, à la condamnation du département à l'indemniser de ses pertes de salaire et du préjudice moral subi et à ce que sa réintégration soit prononcée ;
2') d'annuler la mesure de licenciement qui lui a été notifiée le 6 août 1996 ;
3°) d'ordonner sa réintégration ;
4°) de condamner le département du CANTAL à lui verser jusqu'à la date de cette réintégration les salaires dont elle a été privée sur la base d'une rémunération mensuelle de 3 411,90 F ;
Classement CNIJ : 36-10-06
5°) de condamner le département du CANTAL à lui verser la somme de 30 000 F en réparation du préjudice moral qu'elle a subi ;
6°) de condamner le département du CANTAL à lui verser la somme de 6 000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Elle soutient que la décision de la licencier n'est pas motivée et n'a pas été précédée d'une procédure contradictoire lui permettant, s'agissant d'une décision prise en considération de sa personne, d'accéder à son dossier ; que les soupçons manifestés à son égard ne reposent sur aucun élément précis ou avéré ; que dans ces conditions, une supposée perte de confiance ne pouvait, en tout état de cause, être alléguée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 6 octobre 1999, le mémoire présenté pour le département du CANTAL, représenté par le Président du Conseil Général , qui conclut au rejet de la requête ;
Le département fait valoir que le rapport d'un éducateur spécialisé a pu lui faire perdre la confiance nécessaire à la poursuite de sa collaboration avec la requérante qui a eu connaissance de ce rapport et a été entendue préalablement à deux reprises ; que la fin de sa collaboration est intervenue en application des dispositions de l'article L. 773-7 du code du travail qui n'imposent aucune procédure et n'est pas un licenciement pour faute ;
Vu, enregistré le 17 mars 2000, le mémoire présenté pour Mme X par la SCP Detruy-Lafond-Meilhac qui conclut aux mêmes fins que sa requête ;
Elle soutient avoir fait l'objet d'un licenciement, que l'article L 773-7 du code du travail n'a jamais été invoqué au cours de la procédure administrative et a été irrégulièrement soulevé d'office par le Tribunal administratif ;
Vu, enregistrés le 21 avril 2000 et le 23 juin 2000, les mémoires présentés pour le département du CANTAL par Me Deves, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de Mme X à lui verser la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu, enregistré le 24 mai 2000, le mémoire présenté pour Mme X qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;
Vu le décret n° 94-909 du 14 octobre 1994 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2003 :
- le rapport de M. d'HERVE, premier conseiller ;
- les observations de Me CHARAMEL substituant Me Deves pour le département du CANTAL ;
- et les conclusions de M. CLOT, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article 123-5 du code de la famille et de l'aide sociale alors en vigueur : Les articles ...L.773-7,...L.773-12, du code du travail s'appliquent aux assistantes maternelles employées par des personnes morales de droit public. ; que l'article L.773-7 du code du travail dispose : L'employeur qui décide de ne plus confier d'enfant à une personne relevant du présent chapitre qu'il employait depuis trois mois au moins doit notifier à l'intéressée sa décision par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par la décision en litige du 2 août 1996, le président du Conseil Général du CANTAL ne s'est pas borné à informer Mme X de sa décision de ne plus lui confier d'enfants mais a prononcé son licenciement ; qu'en indiquant seulement que cette décision était la conséquence de la situation créée lors du dernier accueil d'enfant à son domicile , sans préciser d'autres considérations de fait ou de droit, le président du conseil général n'a pas motivé sa décision qui est illégale de ce fait ;
Considérant que Mme X est en conséquence fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision de son licenciement ;
Sur les conclusions à fin d'indemnisation et de réintégration :
Considérant, en premier lieu, qu'en l'absence de service fait, la demande de Mme X qui tend à obtenir le paiement par le département des salaires dont elle aurait été privée ne peut qu'être rejetée ;
Considérant, en second lieu, que le préjudice moral que Mme X soutient avoir subi du fait de son licenciement fautif doit être déterminé en tenant compte de l'importance respective de l'ensemble des irrégularités entachant la décision annulée et de son comportement professionnel ; qu'il ressort de l'instruction que le rapport rédigé le 3 juin 1996 par un éducateur spécialisé et le chef du service éducatif sur les conditions d'accueil d'un enfant à son domicile faisait preuve d'une grande prudence sur les conditions dans lesquelles cet enfant en avait témoigné ; qu'en prononçant immédiatement le licenciement de Mme X en lui imputant un comportement immoral sans s'assurer de la réalité des faits qui lui étaient imputés, le département lui a causé un préjudice qui sera justement réparé par la somme de 3 050 euros ;
Sur les conclusions à fin de réintégration :
Considérant que l'annulation par le présent arrêt de la décision de licencier Mme X doit entraîner sa réintégration effective au sein des effectifs du département du CANTAL ; qu'il y a lieu d'enjoindre au président du Conseil Général de procéder à cette réintégration dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer au département du CANTAL une quelconque somme au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés ; qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de condamner le département du CANTAL à payer une somme de 914 EUROS à Mme X sur le fondement des mêmes dispositions ;
DÉCIDE :
ARTICLE 1er : Le jugement n° 9771 en date du 12 mai 1999 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est annulé.
ARTICLE 2 : La décision du 2 août 1996 du président du Conseil général du CANTAL est annulée.
ARTICLE 3 : Le département du CANTAL est condamné à payer à Mme X la somme de 3050 euros en réparation de son préjudice moral et la somme de 914 euros au titres des frais exposés non compris dans les dépens ;
ARTICLE 4 : Il est enjoint au président du Conseil Général du CANTAL de réintégrer Mme X au sein des effectifs du département dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
ARTICLE 5 : Le surplus des conclusions de Mme X est rejeté.
N° 99LY01890 - 2 -
N° 99LY01890 - 5 -