Vu, enregistrés au greffe de la Cour les 8 février et 21 mai 2002 sous le n° 02LY00240, la requête et le mémoire complémentaire présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND, dont le siège est ..., par Me Y... Le Prado, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 010049 du 20 novembre 2001 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, le déclarant entièrement responsable des conséquences dommageables dans lesquelles s'est déroulée la naissance de la jeune Inès , prescrivant une mesure d'expertise en vue de déterminer le montant du préjudice, et une mesure d'instruction en vue de la production de pièces justificatives par M. et Mme , et leur accordant une provision de 150 000 francs ;
2°) de rejeter la demande de M. et Mme et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Classement CNIJ : 60-02-01-01-01-01-06
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2003 :
- le rapport de M. Beaujard, premier conseiller ;
- les observations de Me X... pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE de CLERMONT-FERRAND ;
- les observations de Me Z... pour M. et Mme ;
- et les conclusions de M. Kolbert, commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme a donné naissance, le 26 août 1998, dans les services du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND, à un enfant prénommé Inès, qui a présenté une infirmité motrice cérébrale se traduisant par des troubles du tonus musculaire et par un retard sévère de son développement ; que, estimant que l'état de santé de l'enfant résultait des conditions dans lesquels l'accouchement avait été pris en charge par le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE, les époux ont recherché la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE CLERMONT-FERRAND devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ; que celui-ci, par un jugement du 20 novembre 2001, a retenu l'entière responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND, a prescrit une mesure d'expertise en vue de déterminer le montant du préjudice subi tant par la jeune Inès que par ses parents, ainsi qu'une mesure d'instruction en vue d'obtenir des pièces justificatives des ressources des époux et des frais qu'ils ont supporté du fait de l'état de leur enfant, et accorder une provision de 150 000 francs à valoir sur la réparation du préjudice subi par l'enfant ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que si le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND a, dans sa requête sommaire, soutenu que le jugement attaqué était insuffisamment motivé au regard des conclusions dont le Tribunal était saisi, il n'a assorti son moyen d'aucune précision de nature à permettre à la Cour d'en apprécier la pertinence ;
Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné en référé, que, en dépit d'un premier accouchement subi l'année précédente avec une césarienne et d'un bassin transversalement rétréci, les praticiens du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND ont décidé de provoquer un accouchement par les voies naturelles en recourant, pour son déclenchement, à un gel vaginal ; que si l'utilisation de ce gel vaginal est théoriquement déconseillée en cas d'utérus cicatriciel, comme en l'espèce, l'expert retient que son utilisation est devenue une pratique obstétricale courante ; que cette utilisation impliquait toutefois une surveillance renforcée de la parturiente, en vue de dépister tout syndrome de prérupture ou de rupture utérine ; que l'expert retient que ces syndromes de prérupture ou de rupture utérine, lenteur de la progression du travail, anomalie du rythme foetal et douleurs ressentie par la mère en dépit de l'anesthésie péridurale, étaient apparents dès 21 heures ; que la décision de procéder à l'accouchement par césarienne aurait dû être prise dès cet instant ; que ce n'est cependant qu'à 22 heures 30 que cette décision a été prise ; que si cette opération a été réalisée dans d'excellentes conditions, elle n'a pu prévenir le dommage, l'hypoxie qui a causé celui-ci ayant débuté dès 22 heures ; qu'ainsi, l'insuffisance de surveillance dont a été l'objet Mme a constitué une faute présentant un lien direct avec le dommage subi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND, à supposer ces conclusions recevables, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a reconnu entièrement responsable du préjudice subi par la jeune Inès et par ses parents ;
Sur la demande de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME de rectification d'erreur matérielle :
Considérant que si, dans les motifs de son jugement, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME la somme de 404 947,29 francs, il n'a pas repris cette condamnation dans le dispositif de son jugement ; qu'il y a lieu de rectifier l'erreur matérielle résultant de cette omission ;
Sur les conclusions des époux tendant au bénéfice d'une provision :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le montant de la provision allouée par les premiers juges était insuffisant ; que les époux ne sont par suite pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a fixé ainsi qu'il l'a fait le montant de cette provision ;
Sur le surplus des conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME et des époux :
Considérant que les époux et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME ne contestent pas les articles 2, 3, 4 et 10 du jugement prescrivant une mesure d'expertise et réservant jusqu'en fin d'instance les droits et moyens des parties sur lesquels il n'a pas expressément statué ; que, dès lors, leurs conclusions tendant à l'organisation d'une expertise, à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND au versement de la somme de 1 369 592,14 euros en réparation du préjudice subi par la jeune Inès , de la somme de 155 000 euros chacun en réparation du préjudice propre des époux , et de la somme de 638 303,34 euros correspondant à des frais futurs de la caisse, alors que le Tribunal administratif n'a pas encore statué sur les conclusions relatives au montant du préjudice, dont il reste saisi, ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND à payer à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME la somme de 762,25 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur les conclusions des époux tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND à payer aux époux une somme de 1000 euros qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1 : La requête du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND est rejetée.
Article 2 : Le dispositif du jugement n° 010049 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 20 novembre 2001 est rectifié comme suit :
Il est introduit un article 5 bis ainsi rédigé : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME une somme de 404 947,29 francs en remboursement de ses débours .
Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME la somme de 762,25 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND est condamné à verser à M. et Mme la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions incidentes des époux et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY-DE-DOME sont rejetées.
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N° 02LY00240