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29/06/2004 | FRANCE | N°00LY01637

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3eme chambre - formation a 3, 29 juin 2004, 00LY01637


Vu, I, enregistrée au greffe de la Cour le 20 juillet 2000, sous le n° 00LY01637, la requête présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE, dont le siège est 3 avenue du Président Emile Loubet, à Saint Etienne, par Me Maryse Prevot-Sailler, avocate au barreau de Lyon ;

La CAISSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 955760 du 20 juin 2000 du Tribunal administratif de Lyon, rejetant sa demande de condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE au remboursement des débours auxquels elle a été exposée du fait du s

jour de son assurée sociale Mme Francine dans cet établissement, pour un m...

Vu, I, enregistrée au greffe de la Cour le 20 juillet 2000, sous le n° 00LY01637, la requête présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE, dont le siège est 3 avenue du Président Emile Loubet, à Saint Etienne, par Me Maryse Prevot-Sailler, avocate au barreau de Lyon ;

La CAISSE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 955760 du 20 juin 2000 du Tribunal administratif de Lyon, rejetant sa demande de condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE au remboursement des débours auxquels elle a été exposée du fait du séjour de son assurée sociale Mme Francine dans cet établissement, pour un montant de 35 721 francs ;

2°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE au paiement de la somme de 35 721 francs avec intérêts de droit à compter du dépôt de la demande ;

3°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE au paiement de la somme de 3 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

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Vu, II, enregistrée le 17 août 2000, sous le n° 00LY01925, la requête présentée pour Mme Emilienne X, Mlle Georgette , Mlle Sarah et M. Xavier , tous demeurant ... (Loire), et pour Mme Emilienne , demeurant ... (Loire), par la société civile professionnelle Chanon-Croze-Deygas-Perrachon-Bes, avocat au barreau de Lyon ;

Classement CNIJ : 60-02-01-01

Ils demandent à la Cour :

1°) la réformation du jugement n° 955760 du Tribunal administratif de Lyon du 20 juin 2000 en ce que les condamnations prononcées à l'encontre du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE pour la réparation du préjudice subi du fait du décès de Mme Francine , survenu dans cet établissement le 19 juin 1991, sont insuffisantes ;

2°) la condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE au paiement de la somme de 500 000 francs en réparation du préjudice subi par Mme Francine , 120 000 francs au titre du préjudice moral pour Mme X et Mlle , 100 000 francs pour Mme et 80 000 francs pour Mlle et M. au même titre, 57 880 francs au titre du préjudice matériel, avec intérêts légaux à compter de la demande ;

3°) de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-ETIENNE au paiement de la somme de 10 000 francs au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

..............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 2004 :

- le rapport de M. Beaujard, premier conseiller ;

- les observations de Me Prevot-Sailler pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE, de Me Olivain substituant Me Rey pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE et de Me Chanon pour Mme X, Mlle , Mme , Mlle et M. ;

- et les conclusions de M. Kolbert, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes n° 00LY01637 et 00LY01925 présentées par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE et les consorts X, , présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que Mme Francine a été opérée d'un corticosurrénalome malin en décembre 1970 ; qu'au cours des mois de mars et avril 1987, des douleurs thoraciques ont mis en évidence des lésions tumorales pleurales droites, qui ont été attribuées à une rechute de l'affection traitée en décembre 1970 ; que, bien qu'un traitement médicamenteux mal supporté par la malade ait été abandonné, la lésion n'a par la suite évoluée que très lentement ; qu'après avoir à plusieurs reprises refusé tout traitement invasif, Mme a, en définitive, accepté de subir, le 10 juin 1991, une ponction sous scanner à la partie inférieure du poumon droit en vue de conforter le diagnostic ; que cette ponction, qui s'est révélée infructueuse, a provoqué une très grave hémorragie endobronchique ; que, transportée faute de place dans le service de réanimation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE, dans le service de réanimation de la clinique mutualiste, Mme devait y décéder le 19 juin 1991 ; que Mme X, mère de la victime, Mlle Georgette et Mme Emilienne , ses deux filles, Mlle Sarah et M. Xavier , ses petits-enfants, ont recherché la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE ; que, par jugement en date du 20 juin 2000, le Tribunal administratif de Lyon a reconnu la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE et l'a condamné à verser aux héritiers de Mme Francine la somme de 100 000 francs au titre de la perte de chance de survivre plusieurs mois, voire plusieurs années, et au titre des souffrances endurées par la victime, à Mme X, à Mlle Georgette et à Mme Emilienne la somme de 20 000 francs chacune au titre du préjudice moral, la somme de 5 000 francs au même titre à chacun des petits-enfants de la victime, enfin, les sommes de 8 796,56 francs pour frais d'obsèques et de 15 652 francs au titre d'autres frais funéraires ; que les prétentions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE au remboursement de ses débours ont été rejetées au motif qu'il n'avait été présenté aucune justification ou ventilation de la somme demandée ; que les consorts X, , ont fait appel du jugement en tant qu'il aurait insuffisamment apprécié le préjudice subi ; que la CAISSE a formé appel du rejet de ses prétentions ; que, pour sa part, le centre hospitalier a conclu à sa mise hors de cause, et, subsidiairement, à ce que les sommes allouées soient minorées ;

En ce qui concerne les conclusions de la requête n° 00LY01925 :

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par les premiers juges, que, si l'administration des soins a été conforme aux règles de l'art, l'utilité de la ponction, dont la mise en oeuvre n'était pas dépourvue de danger, et qui a été mise en oeuvre sans consultation pluridisciplinaire suffisante, était discutable, au regard de l'évolution lente de l'affection de la patiente, de son âge, de l'absence de traitement médical approprié, compte tenu des intolérances présentées antérieurement, et de ce qu'un diagnostic cohérent de rechute sur la plèvre droite, puis sous le diaphragme, du corticosurrénalome malin avait déjà été posé par deux précédentes ponctions ; qu'en acceptant de prendre un tel risque, le centre hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; qu'en outre, il résulte de l'instruction qu'il s'est écoulé un délai anormalement long entre l'accident de ponction et le transport dans une structure médicale apte à fournir à la patiente les soins appropriés que requérait son état ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE n'est pas fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a retenu sa responsabilité ;

Sur le préjudice :

Considérant que le droit à la réparation d'un dommage, quelle que soit sa nature, s'ouvre à la date à laquelle se produit le fait qui en est directement la cause ; que si la victime du dommage décède avant d'avoir elle-même introduit une action en réparation, son droit, entré dans son patrimoine avant son décès, est transmis à ses héritiers ; que, toutefois, si le droit à la réparation des souffrances physiques ressenties par Mme Francine était entrée dans son patrimoine et pouvait être transmise à ses héritiers, en revanche, il n'en était pas de même de la perte de chance de survivre plusieurs mois, voire plusieurs années à l'opération qu'elle a subie ; qu'il sera fait une juste appréciation des souffrances endurées en les fixant au montant de 4 000 euros ; que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE est par suite seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif l'a condamné à verser aux consorts X, es-qualité d'héritiers de Mme Francine une somme supérieure à 4 000 euros ;

Considérant que le préjudice moral subi par Mme X, mère de la victime, et par les deux filles de celle-ci peut être évalué à la somme de 8 000 euros pour chacune d'elle, et le préjudice moral subi par les petits-enfants de Mme à la somme de 3 500 euros chacun ; qu'il y a lieu de réformer en ce sens le jugement du Tribunal administratif ;

Considérant enfin que le Tribunal administratif a estimé les frais d'obsèques de Mme à la somme de 8 796,56 francs et les autres frais funéraires à 15 652 francs, montants non contestés en appel ; que les frais médicaux d'assistance à l'expertise et les frais d'avocats ont été pris en compte dans les frais exposés et non compris dans les dépens ; que le surplus des préjudices matériels invoqués ne fait l'objet d'aucune justification ;

En ce qui concerne les conclusions de la requête n° 00LY01637 :

Considérant que le Tribunal administratif a écarté les prétentions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE non parce que celle-ci n'avait pas produit de mémoire postérieurement au dépôt du rapport d'expertise, mais parce que le mémoire qu'elle avait antérieurement produit se bornait à demander le remboursement de ses débours, fixés à la somme de 35 721 francs et correspondant aux frais du séjour de Mme au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE, sans distinguer parmi ces débours ceux afférents à l'intervention initialement prévue, qui doivent demeurer à la charge de la caisse, et ceux occasionnés par la complication survenue, qui seuls peuvent être mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE ; qu'en cause d'appel, la caisse n'apporte aucune justification nouvelle de la répartition de ces débours ; qu'elle n'est par suite pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur les intérêts :

Considérant que les requérants ont droit aux intérêts des sommes allouées à compter du jour où le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE reconnaît avoir reçu la réclamation préalable des intéressés, soit le 2 janvier 1996 ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE à payer aux requérants la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE, qui n'est pas, dans l'instance 00LY01637, la partie perdante, soit condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE quelque somme que ce soit au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE est condamné à verser à Mme Emilienne X, à Mlle Georgette et à Mme Emilienne pris en qualité d'héritiers de Mme Francine la somme de 4 000 euros au titre des souffrances physiques endurées.

Article 2 : L'article 1er du jugement n° 955760 du Tribunal administratif de Lyon du 20 juin 2000 est réformé en ce qu'il condamne le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE à verser une somme supérieure à 24 448,56 francs correspondant aux frais d'obsèques.

Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE est condamné à verser à Mme Emilienne X, à Mlle Georgette et à Mme Emilienne la somme de 8 000 euros chacune, à Mlle Sarah et à M. Xavier la somme de 3 500 euros chacun.

Article 4 : L'article 2 du jugement n° 955760 du Tribunal administratif de Lyon du 20 juin 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 3 ci-dessus.

Article 5 : Les sommes mentionnées aux articles 1er et 3 ci-dessus porteront intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 1996.

Article 6 : Le surplus des conclusions des consorts X, , , la requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAINT-ETIENNE, et l'appel incident du CENTRE HOSPITALIER ET UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE sont rejetés.

Article 7 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE SAINT-ETIENNE est condamné à verser aux consorts X, , , la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 00LY01637 - N° 00LY01925


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00LY01637
Date de la décision : 29/06/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme JOLLY
Rapporteur ?: M. P BEAUJARD
Rapporteur public ?: M. KOLBERT
Avocat(s) : PREVOT SAILLER ; SCP CHANON CROZE DEYGAS ; PREVOT SAILLER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2004-06-29;00ly01637 ?
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