Vu la requête, enregistrée le 12 mai 2004, présentée pour M. et Mme Karim X, domiciliés ..., par la SCP Michel Ledoux et associés ;
M. et Mme X demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0204345 du 10 mars 2004 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à leur verser une somme en réparation des conséquences dommageables des soins reçus par leur fille Marie à la suite de sa naissance le 25 août 1998 ;
2°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale ;
3°) de condamner les Hospices civils de Lyon à leur verser la somme de 609 796 euros en réparation des préjudices subis ;
4°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2007 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, premier conseiller ;
- les observations de Me Adler, avocat de M. et Mme X ;
- et les conclusions de M. d'Hervé, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement (…) en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. (…)
Considérant que, après avoir écarté la demande de nouvelle expertise formulée par M. et Mme X, les premiers juges se sont fondés, pour rejeter la demande indemnitaire formulée par les intéressés à l'encontre des Hospices civils de Lyon, sur la circonstance que leur demande de première instance non chiffrée était en tout état de cause irrecevable ; qu'il résulte cependant de l'instruction que le courrier, en date du 26 février 2004, par lequel le président de la formation de jugement a averti les parties, en application des dispositions précitées, que le Tribunal était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité de la demande, a été envoyé exclusivement par voie postale et reçu par le conseil des demandeurs au plus tôt le 2 mars 2004 ; que l'audience étant convoquée le 3 mars 2004, le délai laissé aux parties pour présenter leurs observations sur ce moyen était insuffisant ; que M. et Mme X sont dès lors fondés à soutenir que ledit jugement a été rendu au terme d'une procédure irrégulière et à demander son annulation pour ce motif ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que la jeune Marie X, née le 25 août 1998 à l'hôpital Edouard Herriot, était porteuse d'une malformation du tube digestif, consistant en une atrésie duodénale associée à un volvulus intestinal, qui a nécessité une intervention chirurgicale correctrice réalisée le 26 août 1998 dans le même centre hospitalier ; que l'enfant a présenté, dans la nuit du 5 septembre suivant, une septicémie à colibacille avec méningite, dont l'évolution a été marquée par la survenue d'une hydrocéphalie évolutive ayant nécessité la pose d'une dérivation ventriculo ;péritionéale ; que les parents de l'enfant recherchent la responsabilité des Hospices civils de Lyon dont dépend cet établissement ;
Sur la demande de nouvelle expertise :
Considérant que pour contester les conclusions de l'expertise, ordonnée en référé, en ce que l'expert a écarté l'hypothèse d'une infection post-natale en rapport avec une surinfection du cathéter veineux central, M. et Mme X font valoir que faute de mise en culture de ce cathéter après son ablation, il n'était pas possible d'écarter cette cause dans l'infection ; que compte tenu de l'impossibilité matérielle de procéder désormais à cet examen, la demande de nouvelle expertise sur ce point est dépourvue d'utilité ;
Considérant que si les requérants font également valoir que les complications dont leur enfant a été victime, depuis le dépôt du rapport d'expertise, au niveau de la dérivation ventriculaire, démontreraient que l'expert aurait sous-estimé l'aggravation prévisible de l'état de l'enfant, il résulte des conclusions du rapport que l'expert, qui a évoqué les complications mécaniques et infectieuses pouvant survenir, n'a pas regardé comme consolidé l'état de l'enfant ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'expert aurait commis une erreur de nature à vicier radicalement les conclusions de l'expertise et à nécessiter l'organisation d'une nouvelle expertise ;
Sur la responsabilité :
Considérant, en premier lieu, que l'introduction accidentelle d'un germe microbien dans l'organisme d'un patient lors d'une intervention chirurgicale révèle une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service hospitalier et engage la responsabilité de celui-ci envers la victime des conséquences dommageables de l'infection ; qu'il en va toutefois autrement lorsque l'infection, si elle est déclarée à la suite d'une intervention chirurgicale, résulte de germes présents dans l'organisme du patient avant l'hospitalisation ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des conclusions précitées de l'expert que doit être exclue l'hypothèse d'une contamination par surinfection du cathéter veineux central, dans la mesure où le germe identifié n'est pas celui habituellement rencontré dans une infection sur corps étranger ; qu'à cet égard est sans influence la circonstance que n'ait pas été réalisé d'examen bactériologique de ce cathéter après son ablation dans la nuit du 5 septembre, dont il n'est pas contesté que, pour regrettable qu'elle puisse être, elle n'est pas à l'origine de l'état infectieux de l'enfant et n'a pas aggravé celui-ci ;
Considérant qu'il résulte également de l'instruction, que l'infection dont a été victime la jeune Marie a été provoquée par un germe Escherichia Coli K1, hôte habituel de la flore bactérienne digestive normale, laquelle se constitue naturellement dès les premiers jours de vie aérienne et que la translocation de ce germe dans la circulation sanguine a pu être favorisée par un état digestif fragilisé du fait du geste opératoire et du volvulus intestinal, ainsi que par la prématurité de l'enfant ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas du rapport d'expertise qu'en l'espèce le caractère endogène de ce germe aurait été contredit par les résultats des coprocultures réalisées ; que, dans ces conditions, alors même que l'infection du nouveau-né s'est déclarée à l'hôpital où sa mère a accouché, son apparition ne révèle pas par elle-même une faute dans l'organisation ou le fonctionnement du service ;
Considérant, en deuxième lieu, que si les Hospices civils de Lyon n'apportent pas la preuve, qui leur incombe, que les parents de l'enfant ont été informés de l'ensemble des risques encourus par celle-ci, il résulte toutefois de l'instruction que l'état de la jeune Marie nécessitait de manière vitale l'intervention litigieuse et qu'il n'y avait pas d'alternative thérapeutique moins risquée que l'opération réalisée ; que, par suite, le défaut d'information qui peut être imputé aux Hospices civils de Lyon n'a pas entraîné, dans les circonstances de l'espèce, de perte de chance pour M. et Mme X de soustraire leur enfant au risque qui s'est réalisé ; qu'aucune indemnisation n'est, par conséquent, due à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à demander la condamnation des Hospices civils de Lyon ; qu'il y a lieu également de rejeter, sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, les conclusions aux fins de remboursement de ses débours présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de Paris ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y lieu de mettre les frais de l'expertise ordonnée en référé, liquidés et taxés à la somme de 840 euros par ordonnance du président du Tribunal administratif de Lyon, à la charge de M. et Mme X ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge des Hospices civils de Lyon, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que, respectivement, M. et Mme X et la caisse primaire d'assurance maladie de Paris demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 10 mars 2004 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Lyon, le surplus des conclusions de leur requête et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Paris sont rejetés.
Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge de M. et Mme X.
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N° 04LY00661