Vu I), la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés respectivement au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon les 17 octobre et 15 décembre 2006, sous le numéro 06LY02100, présentés pour Mme Vahida X, domiciliée au ..., par Me Lerein, avocat au barreau de Grenoble ;
Mme X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604335 en date du 21 septembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 22 août 2006, par lequel le préfet de la Haute-Savoie a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant la Serbie comme pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
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Vu II), la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 17 octobre 2006, sous le numéro 06LY02101, présentée pour M. Rahim X, demeurant au ..., par Me Lerein, avocat au barreau de Grenoble ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604338 en date du 21 septembre 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 22 août 2006, par lequel le préfet de la Haute-Savoie a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant la Serbie comme pays de destination de la reconduite ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative, sous astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 900 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention internationale sur les droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2007 :
- le rapport de M. Vialatte, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les deux requêtes susvisées présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que M. et Mme X, de nationalité serbe, se sont maintenus sur le territoire français plus d'un mois après la notification des décisions du préfet de la Haute-Savoie du 9 août 2005 leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et les invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date des arrêtés attaqués, le 22 août 2006, ils étaient dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511 ;1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sur les arrêtés de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : « Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (…) des tribunaux, des autorités administratives (…), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale » ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant que si M. et Mme X font valoir qu'ils vivent depuis quatre ans en France, pays où leur premier enfant, mort-né, est enterré et où leur second enfant est né et pourra grandir en sécurité, qu'ils maîtrisent la langue française et sont parfaitement intégrés dans la société, il ressort des pièces des dossiers que les intéressés, tous deux en situation irrégulière, ne sont pas dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, où ils pourront repartir ensemble, accompagnés de leur enfant en bas âge et où la vie de la cellule familiale pourra se poursuivre ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, les arrêtés attaqués n'ont pas porté au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces arrêtés ont été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'ils méconnaîtraient les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ; que les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation dont seraient entachés ces décisions quant à leurs conséquences sur la situation personnelle des requérants et de leur méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent également être écartés ;
Considérant que le préambule et les stipulations des articles 9-1 et 10 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que M. et Mme X ne sauraient donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation des arrêtés ordonnant leur reconduite à la frontière ;
Considérant que les requérants ne peuvent davantage utilement se prévaloir des énonciations contenues dans la circulaire du ministre de l'Intérieur en date du 31 octobre 2005, qui est dépourvue de caractère réglementaire ;
Considérant que le moyen tiré des risques encourus en cas de retour en Serbie ne saurait utilement être invoqué à l'encontre des arrêtés de reconduite à la frontière, qui ne désignent pas le pays de destination ;
Sur les décisions distinctes fixant le pays de destination :
Considérant que, pour les motifs exposés ci-dessus, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;
Considérant que si M. et Mme X font valoir qu'ils ont fait l'objet de discriminations et de mauvais traitements en raison de leurs origines et que leur appartenance à des communautés minoritaires les expose à des risques en cas de retour en Serbie, ils n'établissent pas, par les pièces qu'ils produisent, la réalité des faits allégués et des menaces et risques encourus ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme X sont rejetées.
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N° 06LY02100 - 06LY02101