Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 6 novembre 2006, présentée pour M. Boubekeur X, domicilié chez Madame Kheira X, ..., par Me Vibourel, avocat au barreau de Lyon ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0604633 en date du 31 juillet 2006, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 27 juillet 2006, par lequel le préfet du Puy-de-Dôme a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision distincte du même jour fixant le pays dont il a la nationalité comme destination de la reconduite ;
2°) d'annuler l'arrêté et la décision susmentionnés pour excès de pouvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens, à charge pour son conseil de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 octobre 2007 :
- le rapport de M. Vialatte, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;
Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : / (…) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ; (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 15 mars 2005, de la décision du préfet de la Haute-Garonne du 25 février 2005 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 27 juillet 2006, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien sus-visé : « (…) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l 'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d' un traitement approprié dans son pays. (…) » ;
Considérant, en premier lieu, que s'il est établi que M. X souffre d'une affection psychopathologique qui nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette prise en charge ne pourrait pas s'effectuer en Algérie où l'intéressé, qui était déjà suivi médicalement en France pour cette pathologie, a séjourné du mois de novembre 2002 au 28 octobre 2004 ; qu'il ne ressort en particulier pas des certificats médicaux produits par le requérant que ce séjour en Algérie de près de deux ans, nonobstant le fait qu'il ait été prolongé contre son gré, ait conduit à une aggravation de ses troubles psychopathologiques ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que M. X, qui est âgé de trente-sept ans, célibataire et sans enfant, est entré pour la dernière fois sur le territoire français, où demeurent notamment sa mère et l'un de ses frères, le 28 octobre 2004, soit moins de deux ans avant la mesure d'éloignement et alors qu'il avait vécu et travaillé en Algérie, où vivent trois de ses frères et ses trois soeurs, jusqu'en 2001, puis avait à nouveau séjourné dans ce pays du mois de novembre 2002 à celui d'octobre 2004 ; que compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, et notamment de la durée et des conditions de séjour du requérant en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur la décision distincte fixant le pays de destination :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « (…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » et que ce dernier texte énonce que « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants » ;
Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que M. X soutient qu'il encourrait des risques pour sa vie et sa liberté en cas de retour en Algérie, où son frère aurait été assassiné par la police, en 1995, au motif de son appartenance supposée au Front Islamique du Salut et qu'il aurait personnellement fait l'objet de menaces de la part de fondamentalistes islamiques en raison de son activité de copiste de statues romaines sur le site de Cherchell en 2000 ; qu'il n'établit toutefois pas la réalité des risques que comporterait pour lui un retour dans son pays d'origine où il n'allègue pas avoir été menacé ni avoir été victime de mauvais traitements durant son séjour de près de deux ans intervenu entre 2002 et 2004 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision désignant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite, des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Puy-de-Dôme du 27 juillet 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination de la reconduite ; que ses conclusions de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. X est rejetée.
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N° 06LY02203