Vu la requête, enregistrée le 27 juillet 2007, présentée pour Mlle Saïda X, domiciliée ..., par Me Borges de Deus Correia, avocat au barreau de Grenoble ;
Mlle X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0602045 du 12 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 mars 2005 par lequel le recteur de l'académie de Grenoble a confirmé son exclusion définitive du lycée Jean Moulin d'Albertville, prononcée le 13 janvier 2005 par le conseil de discipline de cet établissement ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté susmentionné ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'éducation, notamment son article L. 141-5-1 ajouté par la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu le décret n° 85-924 du 30 août 1985 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2008 :
- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Aebischer, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation, issu de la loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 : « Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. / Le règlement intérieur rappelle que la mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec l'élève » ;
Considérant que Mlle X, inscrite en seconde année de section de techniciens supérieurs assistants de direction au lycée Jean Moulin d'Albertville, s'est présentée, le 6 septembre 2004, en portant un voile lui couvrant la tête et les épaules ; qu'elle a ensuite porté un foulard lui couvrant toujours la totalité de la chevelure ; que par une note en date du 9 septembre 2004 adressée aux enseignants, le proviseur du lycée Jean Moulin a informé ces enseignants de ce que Mlle X ne serait pas admise en cours tant qu'elle n'aurait pas accepté de respecter le règlement intérieur en ses dispositions relatives au port d'un voile ou d'un couvre-chef ; qu'à l'issue de la période durant laquelle elle n'a ainsi pu avoir accès aux salles de cours, le conseil de discipline de l'établissement a prononcé, le 13 janvier 2005, l'exclusion définitive de Mlle X du lycée, au motif du non-respect des dispositions précitées de l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation ; que par un arrêté du 29 mars 2005 le recteur de l'académie de Grenoble a confirmé cette mesure d'exclusion définitive de l'établissement ; que Mlle X fait appel du jugement du 12 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté rectoral ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 10 du décret du 28 novembre 1983 susvisé, alors applicable : « Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux organismes collégiaux dont l'avis est requis préalablement aux décisions prises, à l'égard des usagers et des tiers, par les autorités administratives de l'Etat (…) » ; qu'aux termes de l'article 11 du même décret : « A défaut de dispositions réglementaires contraires, et, sauf urgence, les membres des organismes consultatifs reçoivent, cinq jours au moins avant la date de leur réunion, une convocation écrite comportant l'ordre du jour et, éventuellement, les documents nécessaires à l'examen des affaires qui y sont inscrites : » ; qu'aux termes de l'article 14 du même décret : « (…) Le procès-verbal est transmis à l'autorité compétente pour prendre la décision. Lorsque la décision doit être motivée en application de la loi susvisée du 11 juillet 1979, la notification doit être accompagnée des mentions du procès-verbal se rapportant à la question sur laquelle il est statué par cette décision. » ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 6 du décret du 18 décembre 1985 susvisé : « (…) Les membres du conseil de discipline, l'élève invité à comparaître, son représentant légal et la personne éventuellement chargée de l'assister pour présenter sa défense peuvent prendre connaissance du dossier auprès du chef d'établissement. (…) » ; qu'aux termes de l'article 8 du même décret : « Lorsque la décision du conseil de discipline (…) est déférée au recteur d'académie en application de l'article 31, alinéa 4, du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux, elle est néanmoins immédiatement exécutoire (…) / Le recteur d'académie décide après avis d'une commission académique réunie sous sa présidence ou celle de son représentant. (…) / Les modalités prévues pour le conseil de discipline en matière d'exercice des droits de la défense sont applicables à la commission ainsi que les dispositions de l'article 7 (dernier alinéa) du présent décret (…) » ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des convocations, en date du 24 février 2005, adressées par le recteur de l'académie de Grenoble à un membre de la commission académique ainsi qu'à Mlle X et à la personne chargée de l'assister devant ladite commission, et des avis de réception ou de présentation des plis, que les membres de la commission ont reçu leur convocation plus de cinq jours avant la date de la réunion de cette instance ; que, dès lors, contrairement à ce que soutient Mlle X, les dispositions de l'article 11 du décret du 28 novembre 1983 relatives au délai de convocation n'ont pas été méconnues ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 6 du décret du 18 décembre 1985, relatives aux modalités de communication du dossier de l'élève, qui doivent être regardées comme des modalités d'exercice des droits de la défense, au sens des dispositions de l'article 8 du même décret, et qui, en tant qu'elles sont contraires aux dispositions de l'article 11 du décret du 28 novembre 1983, étaient applicables en l'espèce, l'administration, qui a invité Mlle X et la personne chargée de l'assister devant la commission académique à consulter le dossier de l'intéressée, n'était pas tenue, en tout état de cause, de communiquer ledit dossier aux membres de ladite commission ;
Considérant, en troisième lieu, que si, en vertu des dispositions précitées de l'article 8 du décret du 18 décembre 1985, le recteur ne peut se prononcer, lorsque la décision du conseil de discipline lui est déférée en application de l'article 31 du même décret, qu'au vu de l'avis émis par la commission académique, en revanche les conditions dans lesquelles il est procédé à la notification de la décision sont sans influence sur sa légalité ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 141 ;5-1 du code de l'éducation que, si les élèves des écoles, collèges et lycées publics peuvent porter des signes religieux discrets, sont en revanche interdits, d'une part, les signes ou tenues, tels notamment un voile ou un foulard islamique, une kippa ou une grande croix, dont le port, par lui ;même, manifeste ostensiblement une appartenance religieuse, d'autre part, ceux dont le port ne manifeste ostensiblement une appartenance religieuse qu'en raison du comportement de l'élève ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des attestations rédigées par des personnels du lycée Jean Moulin d'Albertville, produites en première instance par l'administration, que le carré de tissu de type bandana couvrant la chevelure de Mlle X était porté par celle-ci en permanence et qu'elle-même et sa famille, malgré les invitations qui leur avaient été adressées par de nombreux membres de la communauté éducative de l'établissement, avaient persisté avec intransigeance dans leur refus d'y renoncer, contrairement à ce que soutient la requérante, durant toute la période comprise entre la rentrée scolaire 2004 et la décision d'exclusion définitive prononcée par le conseil de discipline de l'établissement ; que, dès lors, par le port de ce couvre-chef, qui ne saurait être qualifié de discret, Mlle X a entendu manifester ostensiblement une appartenance religieuse, en méconnaissance de l'interdiction posée par la loi ;
Considérant, en dernier lieu, que la sanction de l'exclusion définitive de l'établissement scolaire prononcée à l'encontre de Mlle X résulte de son refus de respecter l'interdiction édictée à l'article L. 141-5-1 du code de l'éducation ; que cette interdiction ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatives au droit au respect d'une vie familiale, ni celles de l'article 9 de ladite convention, relatives à la liberté de pensée, de conscience et de religion, dès lors qu'elle ne porte pas à ce droit et à cette liberté une atteinte excessive au regard de l'objectif d'intérêt général poursuivi visant à assurer le respect du principe de laïcité dans les établissements scolaires publics ; qu'ainsi, cette sanction ne saurait par elle-même méconnaître ces stipulations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de la requête tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mlle X est rejetée.
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N° 07LY01642