Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 27 février 2008, présentée pour l'EURL CAFE DE LA GARE, dont le siège est 23 avenue de la gare à Tullins (38210) et M. Pierre A demeurant ... ;
L'EURL CAFE DE LA GARE et M. A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0304579 du 13 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, et pénalités y afférentes, dont l'EURL CAFE DE LA GARE a été déclarée redevable au titre de la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998, ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
2°) de prononcer les décharges demandées ;
3°) de condamner l'Etat aux dépens et à leur verser une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
L'EURL CAFE DE LA GARE et M. A soutiennent que :
- c'est à tort que le Tribunal, comme l'administration, a considéré la comptabilité de l'entreprise comme étant irrégulière :
(concernant l'activité bar, si en l'absence de caisse enregistreuse, les recettes ont été enregistrées globalement en fin de journée, ceci ne constitue pas à lui seul un élément suffisant pour écarter la comptabilité, au regard notamment de l'instruction 3 E 217 reprise dans le Lefebvre mémento comptable § 666, alors qu'il s'agit d'un bar de quartier à caractère associatif dont le montant de la consommation est faible expliquant un coefficient de recettes TTC par rapport aux achats HT plus faible que ceux des établissements de même catégorie ;
(concernant l'activité restaurant, le chiffre d'affaires de l'entreprise est justifié par les fiches de restauration suffisamment détaillées pour les repas, qui sont constitués de menu ou plat du jour à tarif unique, encaissés le jour même, pour ceux constituant des repas en compte réglés ultérieurement, et pour les sandwichs qui sont comptabilisés avec le reste des recettes ;
- la méthode de reconstitution est entachée d'irrégularité dès lors que :
(elle n'a pas tenu compte des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise,
(le vérificateur aurait du prendre en compte les fiches journalières qui démontrent la correspondance des résultats avec ceux déclarés ;
(la reconstitution du vérificateur fait apparaître des incohérences ;
(le vérificateur a méconnu la doctrine administrative DB 4 G 3342 du 25 juin 1998 qui lui impose d'utiliser plusieurs méthodes et de se baser sur les conditions concrètes d'exploitation ;
(concernant l'activité bar, le vérificateur n'a pas retenu les différents coefficients qu'il a présentés et qui correspondaient au fonctionnement de l'entreprise ; le montant des recettes à retenir pour cette activité est de 870 948 francs pour l'exercice clos le 30 septembre 1996, 977 673 francs pour celui clos le 31 septembre 1997 et 987 946 francs pour celui clos le 31 décembre 1998 ;
(en ce qui concerne l'activité restaurant, les fiches journalières, qui ont été présentées dans leur intégralité au vérificateur, permettent d'établir le nombre de menus et plats du jour servis au cours des trois périodes litigieuses, et par suite le montant des recettes encaissées qui s'est élevé à 316 880 F au 30 septembre 1996, 338 260 F au 30 septembre 1997 et à 397 180 F au 30 septembre 1998 ; cette méthode est plus proche des conditions réelles d'exploitation ; la reconstitution effectuée par le vérificateur a entraîné une augmentation du chiffre d'affaires de 35% qui ne peut être justifié en l'absence de changement dans l'environnement économique et géographique et eu égard à la capacité de production maximale de l'établissement ; la progression des achats retenus par le vérificateur ne corrobore pas également une augmentation de chiffre d'affaires de 35 %, l'augmentation des recettes ne pouvant ainsi être supérieure à 9% par an ;
- en ce qui concerne les majorations de mauvaise foi, sa bonne foi doit être reconnue compte tenu de ce que les fiches journalières ont été mises en place pour faciliter à M. A, qui exerçait une autre activité, le contrôle et la comptabilisation des recettes et non pour faciliter la dissimulation des recettes,
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 27 octobre 2008, le mémoire en défense présenté par ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- compte tenu des redressements et rappels acceptés par les contribuables, les montants en litige sont limités, en matière de bénéfices industriels et commerciaux, à 135 147,79 francs, 162 130,44 francs et 178 001,57 francs au titre respectivement des exercices clos les 31 septembre 1996, 1997 et 1998 et, en matière de taxe sur la valeur ajoutée en droits et pénalités, à 39 492,33 francs, 55 356,94 francs et 73 675,66 francs au titre respectivement des périodes du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1996, 1er octobre 1996 au 30 septembre 1997 et du 1er octobre 1997 au 30 septembre 1998 ;
- l'administration a établi le caractère non probant et irrégulier de la comptabilité dès lors que l'enregistrement global des recettes en fin de journée n'est pas étayé par des documents probants ; l'établissement n'a pas été en mesure de présenter de brouillard de caisse pour l'activité bar et celle de restaurant ; les fiches journalières de recettes présentées lors du contrôle ne peuvent tenir de brouillard de caisse dans la mesure où les indications portées ne permettent pas d'appréhender le montant des recettes ; l'établissement n'a pas été en mesure de produire la majeure partie des fiches récapitulatives qui ne peuvent, compte tenu aussi des mentions qui y sont portées, être rapprochées des fiches journalières ; la comptabilité ne présente pas de comptes clients, les factures correspondantes n'étant pas enregistrées en produits lors de leur établissement mais seulement lors de leur règlement ; il n'est délivré de notes qu'aux seuls clients réglant le repas au comptant et ne comportent pas d'indication sur la nature des repas servis ; aucun contrôle matière ou rapprochement matière n'est possible entre les achats de marchandises et les plats confectionnés et vendus ;
- les requérants ont la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition ; ils ne produisent pas d'éléments de nature à remettre en cause la reconstitution qui a été opérée à partir des conditions d'exploitation propres à l'établissement, les tarifs retenus étant ceux indiqués par le contribuable pour les deux activités, le vérificateur a retenu un pourcentage conséquent de 10% au titre des offerts et des consommations du personnel, les coefficients et les dosages proposés par le contribuable n'étant pas justifiés ; les fiches journalières n'avaient pas à être exploitées dès lors qu'elles ne constituaient pas des informations suffisantes permettant d'établir la sincérité de la comptabilité et des recettes déclarées ; les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de l'instruction 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 dès lors qu'elle constitue de simples recommandations ; l'évolution de 35% du chiffre d'affaires au cours des 3 années litigieuses n'est pas irréaliste compte tenu de ce que le chiffre d'affaires proposé par les contribuables a lui-même connu une évolution de plus de 25%, que la reconstitution des recettes de restaurant a été opérée à partir des achats comptabilisés en alimentation qui ont augmenté de 31% et de 35% pour les seuls achats utilisés pour le restaurant ; aucun élément n'établit que l'établissement n'était pas en mesure de faire face à l'augmentation d'activité compte tenu de ses moyens matériels et humains ni que l'établissement était au maximum de ses capacités lors du premier exercice ; les requérants ne proposent aucune autre méthode de reconstitution plus précise ;
- l'administration établit la mauvaise foi compte tenu du caractère habituel et des montants conséquents des minorations de recettes qui ne peuvent procéder que d'une intention délibéré de se soustraire à l'impôt, du caractère non probant de la comptabilité organisée et tenue de telle sorte qu'elle a rendu impossible un contrôle exhaustif des recettes déclarées, de ce qu'il ne pouvait ignorer la défaillance du système et de ce qu'il a accepté certains redressements ;
- les conclusions tendant à la condamnation aux dépens sont irrecevables car dépourvues d'objet ;
- l'Etat n'étant pas la partie perdante, il ne saurait être condamné sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, enregistré le 12 mai 2009 le nouveau mémoire présenté pour l' EURL CAFE DE LA GARE et M. A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;
Ils soutiennent en outre que, concernant l'activité restauration, l'ensemble du processus de comptabilisation comprenant les fiches journalières ainsi que les régularisations et refacturations effectuées mensuellement pour les repas pris en compte constitue une méthode de comptabilisation de recettes valable qui ne pouvait être rejetée ; qu'à titre subsidiaire, si la comptabilité devait être rejetée, ils ont produit une méthode de reconstitution plus précise que celle proposée par l'administration en se fondant sur les éléments qui ont été rejetés purement et simplement par le vérificateur et qui est plus compatible avec la réalité des conditions d'exploitation ; qu'il a reconnu de bonne foi les erreurs qu'il a commises et a suivi scrupuleusement les préconisations du vérificateur en installant une caisse enregistreuse qu'il ne pensait pas jusque-là nécessaire ;
Vu, enregistré reçu par télécopie le 10 juillet 2009 et régularisé le 16 juillet 2009, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance du 16 juin 2009 prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative fixant la clôture de l'instruction au 15 juillet 2009 à 16 h 30 ;
Vu la lettre en date du 10 novembre 2009 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 novembre 2009 :
- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;
Considérant que l'EURL CAFE DE LA GARE, dont l'unique associé est M. Pierre A, exploitait un bar-restaurant à Tullins (Isère) ; qu'elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à raison de ces deux activités portant sur la période du 1er octobre 1995 au 31 mai 1999 ; que le vérificateur a écarté la comptabilité de l'entreprise comme étant non probante et a reconstitué son chiffre d'affaires ; qu'à la suite de cette vérification, l'EURL CAFE DE LA GARE a été ainsi déclarée redevable de droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er octobre 1995 au 30 septembre 1998 ; que M. et Mme A ont, par ailleurs, été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1996, 1997 et 1998 à raison notamment de la réintégration dans les bénéfices industriels et commerciaux de cette entreprise des recettes omises ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de l'EURL CAFE DE LA GARE et de M. A tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités y afférentes ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que compte tenu de la nature de l'impôt sur le revenu et de celle de la taxe sur la valeur ajoutée, et quels que fussent en l'espèce les liens de fait et de droit entre ces deux impositions, le tribunal administratif devait statuer par deux décisions séparées à l'égard de deux contribuables distincts, le foyer fiscal composé de M. et Mme A d'une part, et l'EURL CAFE DE LA GARE, en tant que seul redevable de la taxe sur la valeur ajoutée, d'autre part ; que le Tribunal administratif de Grenoble ayant statué en méconnaissance de cette règle d'ordre public, son jugement doit être annulé, dans la limite des conclusions dont la Cour est saisie, en tant qu'il rejette les conclusions de M. A tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1996, 1997 et 1998 ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande de M. A tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, les conclusions de la requête afférentes à la taxe sur la valeur ajoutée mise à la charge de l'EURL CAFE DE LA GARE restant enregistrées sous le n° 08LY00476 ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne la régularité de la comptabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les recettes de l'entreprise résultant de ses deux activités de bar et de restaurant ont été enregistrées globalement en fin de journée ;
Considérant que, concernant l'activité bar, ces recettes ne sont appuyées d'aucune pièce justificative, telles des bandes de caisses enregistreuses, un brouillard de caisse ou des notes individuelles délivrées aux clients ;
Considérant que, concernant l'activité de restaurant, M. A a produit au vérificateur, comme pièces justificatives du détail de ses recettes, l'ensemble des fiches journalières de recettes, lesquelles ne comportent que le nombre de repas ou de plats du jour servis et la ventilation de la recette journalière totale selon la nature de l'encaissement ; qu'en ce qui concerne les repas servis aux clients en compte qui étaient payés ultérieurement, les fiches journalières de recettes ne portaient que le nombre de repas pris sans indication du montant des recettes correspondantes à ces repas en attente de paiement ; que le requérant, qui n'a produit devant la Cour comme devant le Tribunal aucune de ces fiches, soutient que ces repas faisaient l'objet d'une facture récapitulative mensuelle payée le mois suivant et qu'était ainsi porté en régularisation , sur la fiche du jour de l'encaissement, le montant réglé par la clientèle relatif aux repas qui avaient été pris précédemment ; que toutefois, l'administration fait valoir que la comptabilité ne présentait pas de comptes clients, qu'il n'était délivré de notes qu'aux seuls clients réglant les repas au comptant sans indication des repas servis, que les fiches journalières ne mentionnaient ni les sandwichs vendus par l'établissement, contrairement à ce qu'allègue le requérant, ni le nom des clients en attente de paiement, et que l'établissement n'a pas été en mesure de produire la majeure partie des fiches récapitulatives ; que le rapprochement de ces factures récapitulatives avec les fiches journalières ainsi que les mentions portées sur ces dernières fiches ne permettent pas, contrairement à ce qu'allègue le requérant, d'appréhender le montant des recettes de cette activité de restauration ou d'effectuer un contrôle entre les plats confectionnés et vendus et les achats et les stocks comptabilisés ; qu'ainsi, et même s'il existait un tarif unique pour le menu et un autre pour le plat unique servi, ces fiches journalières ne permettaient pas de justifier du détail de ses recettes quotidiennes relatives à l'activité restauration ;
Considérant que si M. A, qui ne peut utilement soutenir que le système qu'il avait mis en place, du fait qu'il exerçait une autre activité, lui permettait de se prémunir de tout détournement de recettes de la part de ses salariés, se prévaut des obligations comptables s'appliquant aux commerçants détaillant encaissant des recettes inférieures à la somme de 500 francs visée par le 3° de l'article 286 du code général des impôts, ce texte ne le dispensait pas de conserver des pièces justificatives du détail des recettes relatives à ces deux activités de bar et de restaurant ;
Considérant, enfin, que le requérant a entendu se prévaloir par ailleurs, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la documentation administrative de base 3 E 216 qui indique que L'administration admet que le seul fait pour des commerçants détaillants d'enregistrer globalement, en fin de journée, leurs recettes journalières , quel qu'en soit le montant unitaire, ne suffit pas à faire écarter la comptabilité présentée dès lors que celle-ci est, par ailleurs, tenue correctement et que ses résultats sont en rapport avec l'importance et l'activité de l'entreprise reprise ensuite, à compter du 2 novembre 1996, à la doctrine administrative 3 E 2116 ; que toutefois cette instruction précise que la faculté ainsi offerte aux assujettis d'inscrire globalement, en fin de journée, leurs opérations au comptant d'un montant inférieur à une certaine somme, ne les dispense pas de tenir correctement leur comptabilité et de produire tous documents propres à justifier de ce montant en fin de journée comme par la présentation de bandes enregistreuse, de fiches de caisse, de livres de brouillard ; que M. A n'a pas présenté les pièces justificatives du détail des recettes quotidiennes de l'entreprise ; qu'il ne remplit donc pas les conditions posées par les doctrines invoquées et n'entre ainsi pas dans leurs prévisions ; qu'enfin, et alors même qu'il reproduit une instruction administrative, le contenu d'un ouvrage privé, intitulé le mémento comptable, ne peut être, en tout état de cause, utilement invoqué par M. A sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant que, par suite, ces irrégularités, qui ne permettent pas la vérification exacte du montant des recettes de l'entreprise concernant chacune des deux activités bar et restaurant sont de nature à retirer sa valeur probante à la comptabilité de celle-ci ;
En ce qui concerne la reconstitution des recettes :
S'agissant de la charge de la preuve :
Considérant que la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition incombe au contribuable conformément à l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dès lors que les impositions, établies selon la procédure contradictoire, ont été mises en recouvrement conformément à l'avis émis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et que, comme il a été dit ci-dessus, la comptabilité présente de graves irrégularités ;
S'agissant de la méthode de reconstitution :
Considérant, en premier lieu, que pour reconstituer les recettes de l'activité bar, l'administration a déterminé les quantités de liquide utilisées à partir d'un dépouillement exhaustif de l'ensemble des factures d'achat, pondérées des stocks en début et en fin de chaque exercice ; que, pour déterminer les quantités vendues, elle a pris en compte les modalités de commercialisation des liquides en distinguant les ventes en bouteilles et les produits servis au verre , les dosages en centilitres (cl) utilisés variant selon la nature des liquides servis ; qu'elle a notamment retenu, compte tenu des conditions particulières d'exploitation, un taux de perte de tirage sur la bière de 25% sur le demi de 25 cl et de 23% sur le galopin de 14 cl ainsi qu'une dose unitaire de 1,3 cl pour les apéritifs anisés et le whisky, au lieu d'une dose normale de 1 cl compte tenu des habitudes de la clientèle ; qu'elle a appliqué aux doses vendues les tarifs fournis par l'entreprise, qui sont inférieurs à ceux habituellement pratiqués, et a pris en compte les modifications tarifaires opérées à compter du 1er janvier 1998 ; qu'elle a déduit du montant des recettes de bar ainsi reconstitué les consommations du personnel et les offerts qu'elle a estimés à 10% de ces recettes ;
Considérant que, pour critiquer cette reconstitution, le requérant se borne à se prévaloir de la situation excentrée de l'établissement et de la circonstance que celui-ci avait été le siège du club de rugby, et à proposer des dosages et des pourcentages d'offerts et de consommations du personnel supérieurs à ceux retenus par le vérificateur sans les justifier ; que ses arguments ne sont pas de nature à remettre en cause les éléments retenus par l'administration à partir d'éléments propres de l'entreprise dont il avait connaissance, dont les factures d'achats et les tarifs communiqués par le contribuable ;
Considérant, en deuxième lieu, que pour reconstituer les recettes de l'activité restaurant, l'administration a déterminé, contradictoirement avec le requérant et la cuisinière, le prix de revient des plats couramment servis à partir du prix d'achat des composants ; qu'elle a ainsi calculé le prix de revient total du menu proposé à 21 francs en additionnant le prix de revient moyen des entrées, celui des fromages et desserts et le prix moyen pondéré du plat principal qui a été fixé à partir de celui des plats de viande et de poisson et de celui des accompagnements compte tenu de ce que 25% des plats servis sont constitués de steak frites toujours au menu ; que le vérificateur a été en mesure de déterminer un coefficient de bénéfice s'élevant à 2,85 correspondant au rapport entre, d'une part, le prix du menu proposé pendant la période vérifiée toutes taxes comprises, soit 60 francs, d'autre part, le prix de revient hors taxe du menu ainsi proposé ; qu'il a appliqué ce coefficient aux achats d'alimentation comptabilisés et utilisés pour le restaurant, corrigé de la variation de stocks, et a appliqué un abattement de 5% au titre des pertes sur achats et des produits périmés ; que l'administration n'a tenu compte que des achats de café et de sucre se rapportant à l'activité restaurant afin d'éviter un double emploi avec l'activité bar, ainsi que des boissons servies au restaurant ; qu'elle a déduit du montant des recettes de restaurant ainsi reconstitué, d'une part, les consommations du personnel estimées à 2% de ces recettes et, d'autre part, les excédents de plats cuisinés mais non consommés finalement évalués à 15% de ces recettes au lieu de 5% initialement ; qu'elle a enfin retenu 5% du chiffre d'affaires reconstitué comme correspondant à des ventes à emporter ayant supporté un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5%, le reste ayant fait l'objet d'un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 20,6% ;
Considérant que, pour critiquer cette méthode de reconstitution, le requérant ne saurait se prévaloir de ce que l'administration n'a pas pris en compte les fiches journalières alors que, comme il a été dit ci-dessus, celles-ci ne revêtaient pas un caractère exhaustif ; que la reconstitution de recettes proposée par M . A fondée sur ces fiches journalières ne saurait ainsi constituer une méthode plus précise que celle proposée par l'administration à partir des éléments propres de l'entreprise qui étaient en sa possession et qui lui ont été communiqués par l'exploitant et la cuisinière ; qu'enfin, si le requérant fait valoir que le chiffre d'affaires ainsi reconstitué a augmenté de 35% au cours de ces trois exercices alors que les conditions d'exploitation de l'entreprise n'avaient pas changé, cette circonstance ne saurait démontrer le caractère exagéré du montant des recettes ainsi reconstitué alors que les achats comptabilisés en alimentation ont eux-mêmes connu une progression de 31% au cours de cette période et de 35% pour les seuls achats pour le restaurant, que les recettes déclarées faisaient état d'une augmentation également importante du chiffre d'affaires de 25% et que le requérant ne démontre pas que les conditions d'exploitation de son établissement ne lui permettaient pas d'assurer une telle progression ;
Considérant, en dernier lieu, que si la documentation administrative 4 G 3342 n° 4 du 25 juin 1998 indique que les reconstitutions de recettes doivent être opérées selon plusieurs méthodes et être effectuées à partir des conditions concrètes de fonctionnement de l'entreprise, elle ne peut être, en tout état de cause, utilement invoquée par M. A s'agissant de simples recommandations qui ne peuvent être opposées à l'administration sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant qu'il s'ensuit que M. A, qui ne propose pas ainsi d'autre méthode susceptible d'aboutir à une meilleure reconstitution de ses recettes en ce qui concerne tant l'activité bar que celle de restauration, n'établit pas l'exagération du montant des recettes reconstituées en ce qui concerne les impositions en litige ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'en se prévalant au titre de ces trois années de la nature des irrégularités comptables ainsi relevées faisant obstacle un contrôle exhaustif des recettes déclarées, qui ne sauraient être justifiées par la circonstance que M. A exerçait une autre activité, de l'importance des minorations de recettes constatées par le vérificateur et de leur caractère grave et répété, le ministre établit la volonté délibérée, de la part de M. A, gérant et seul associé de l'entreprise, d'éluder l'impôt ; que, l'administration doit, dès lors, être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'absence de bonne foi du requérant et est donc fondée à mettre à sa charge des pénalités de 40 % pour mauvaise foi sur le fondement des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts alors applicable ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1996, 1997 et 1998 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0304579 du 13 novembre 2007 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1996, 1997 et 1998.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. A tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et pénalités y afférentes, auxquelles M. et Mme A ont été assujettis au titre des années 1996, 1997 et 1998 et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2009, où siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
MM. Monnier et Segado, premiers conseillers,
Lu en audience publique, le 15 décembre 2009.
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N° 08LY02930