Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2009 à la Cour, présentée pour Mme Vera A, domiciliée ... ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900019, en date du 31 mars 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Ain, du 5 décembre 2008, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour vie privée et familiale ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Elle soutient que les décisions portant refus de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision désignant la Russie comme pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, dès lors que ses enfants ont été victimes de persécutions dans ce pays en raison de leurs origines métisses ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire enregistré le 27 juillet 2009, présenté par le préfet de l'Ain , qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que, par les décisions contestées, il n'a pas porté au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et que lesdites décisions ne sont pas susceptibles d'avoir, pour elle ou ses enfants, des conséquences d'une exceptionnelle gravité ;
Vu la décision du 23 juin 2009 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à la requérante le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2009 :
- le rapport de M. Le Gars, président,
- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;
Sur la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, ressortissante russe, a épousé un ressortissant tchadien, fonctionnaire de l'Office des Nations Unies à Genève, avec lequel elle a eu deux enfants, nés en 2001 et 2002 ; qu'elle a vécu en France, sous couvert d'un titre de séjour en qualité de visiteur, de 2002 à 2005, date à laquelle elle est repartie en Russie, accompagnée de ses deux enfants, après un refus de renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré et un arrêté de reconduite à la frontière ; que son époux, duquel elle était séparée, est décédé au mois d'août 2006 ; que Mme A est revenue sur le territoire français, accompagnée de ses deux enfants, sous couvert d'un visa de court séjour, au mois d'avril 2008 ; qu'elle s'y est maintenue au-delà de la limite de validité du visa ; qu'ainsi, elle séjournait en France depuis huit mois seulement et était en situation irrégulière lorsque la décision a été prise ; que si elle fait valoir qu'elle maîtrise la langue française, qu'elle perçoit une pension pour ses enfants de la part des Nations Unies, qu'elle dispose du logement dont feu son époux était propriétaire, qu'elle présente, du fait du diplôme russe d'infirmière dont elle est titulaire et du contrat de travail à durée indéterminée qui lui a été proposé pour un poste d'auxiliaire de vie au sein d'un établissement accueillant des personnes âgées dépendantes, de bonnes capacités d'insertion professionnelles et sociales, et, enfin, que ses enfants et elle-même ont connu des difficultés d'adaptation et ont été confrontés à des actes de racisme, ces circonstances ne lui confèrent aucun droit au séjour en France ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment au caractère récent de son séjour en France depuis sa dernière entrée sur le territoire français où elle n'a pas d'attaches familiales, la décision du 5 décembre 2008 par laquelle le préfet de l'Ain a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme A n'a pas porté au droit de cette dernière au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, par suite, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux, énoncés précédemment dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, les moyens tirés de la violation, par l'obligation de quitter le territoire français, des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée cette mesure d'éloignement, doivent être écartés ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
Considérant que Mme A soutient que l'aîné de ses enfants a souffert de racisme en Russie et que cela a eu des répercussions sur la santé physique et psychologique de cet enfant ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que les crises d'asthme dont cet enfant aurait souffert en Russie soient dues à des évènements qu'il aurait vécus dans ce pays ni que son état de santé psychologique ou physique nécessite une prise en charge médicale en France ; qu'il n'est pas établi que, du fait de leur métissage, les enfants de la requérante ne pourraient pas retourner vivre normalement en Russie ; que la décision d'éloignement n'a pas pour effet de séparer les enfants de leur mère ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la violation, par la décision fixant le pays de renvoi, des stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Vera A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Ain.
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2009 à laquelle siégeaient :
M. Le Gars, président de la Cour,
M. Picard, premier conseiller,
M. Stillmunkes, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 janvier 2010.
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N° 09LY00934