Vu la requête, enregistrée le 2 avril 2007, présentée pour Mme Laurie A, domiciliée 42 ter bd du jardin exotique à Monaco (98000) ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0507622 du 25 janvier 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à lui verser la somme de 500 000 euros en réparation des conséquences dommageables de l'intervention qu'elle a subie le 9 mars 2001 ;
2°) de condamner les Hospices civils de Lyon à lui verser la somme de 500 000 euros, ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2005, les intérêts étant eux mêmes capitalisés au 27 décembre 2006, et de mettre à leur charge les frais d'expertise ;
3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon les frais d'expertise et une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que les Hospices civils de Lyon ne démontrent pas avoir satisfait à l'obligation d'information sur les risques auxquels elle était particulièrement exposée, ni de ce que compte tenu de sa très forte myopie, sa correction serait incomplète et non corrigeable quel que soit le moyen utilisé ; que c'est à tort que les premiers juges ont estimés que l'intervention n'avait entrainé aucune dégradation de sa vue et pouvait être corrigée alors que la sous-correction de l'oeil droit ne provient pas de l'absence d'intervention sur l'oeil gauche mais de ce qu'il n'est pas appareillable ; qu'elle est fondée à demander l'indemnisation de l'intégralité de préjudices subis étant donné que dûment informée elle y aurait renoncé s'agissant d'une intervention de simple confort qui ne revêtait pas un caractère indispensable ; que l'obligation de porter des lunettes ne corrigeant plus de manière satisfaisante entraine un préjudice physique et moral très important dans la pratique quotidienne de son métier, aggravé par la diplopie et les halos, qu'elle a subi un préjudice financier important étant contrainte à un reclassement ; que les frais d'expertise ne devaient pas être mis à sa charge, non plus que les frais irrépétibles ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu la mise en demeure adressée le 27 mars 2009 aux Hospices civils de Lyon, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2009, présenté pour les Hospices civils de Lyon qui concluent au rejet de la requête par les moyens que c'est à tort que le Tribunal a retenu à leur encontre un défaut d'information alors qu'ils ont apporté plusieurs éléments qui permettaient de retenir qu'elle avait été informée des risques, conformément aux conclusions de l'expert ; qu'en toute hypothèse, aucune information ne s'imposait en l'espèce l'intervention ne comportant aucun risque d'invalidité et n'ayant d'ailleurs entrainé aucune invalidité ; que présentant une très forte myopie particulièrement invalidante, elle était très motivée par l'intervention et n'y aurait en tout état de cause pas renoncé, l'expert ayant relevé que la perspective d'une sous- correction ne constituait pas un élément de nature à la dissuader ; que de surcroit, il n'existait pas d'autre alternative pour réduire cette myopie ; qu'elle ne justifie d'aucun préjudice présentant un lien direct et certain avec le défaut d'information, sa myopie ayant été réduite, la gêne provoquée par la différence entre les deux yeux ayant pour seule origine son refus de subir une nouvelle intervention et la perception de halos la nuit ne pouvant être qualifiée de préjudice ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 septembre 2009, présenté pour Mme A qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et par les motifs en outre que l'information ne se limite pas au simple risque d'invalidité ; que son renoncement à subir l'intervention sur l'oeil gauche établit qu'elle se serait soustraite ; que l'expert indique qu'il existe une sous correction résiduelle plus forte que prévu et que le résultat promis n'a pas été atteint ; que sa vision après correction est moins bonne que la vision antérieure à l'opération après correction ;
Vu les courriers et les accusés de réception dont il résulte que le service des prestations médicales de l'Etat monégasque a reçu communication de la procédure ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 décembre 2009 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président assesseur ;
- les observations de Me Bourbonneux, avocat de Mme A et de Me Demailly, avocat des Hospices civils de Lyon ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes.
Considérant que Mme A, résidente monégasque qui présentait depuis de nombreuses années une très forte myopie aux deux yeux corrigée par le port de lentilles, s'est adressée à l'hôpital Edouard Herriot à Lyon en vue de recourir à une technique de chirurgie au laser ; qu'insatisfaite des résultats de l'intervention sur l'oeil droit qui s'est déroulée le 9 mars 2001 et dont elle conserve une sous-correction résiduelle plus forte que prévue ainsi que la perception de halos la nuit, l'intéressée fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande indemnitaire qu'elle avait formulée à l'encontre des Hospices civils de Lyon, dont dépend cet hôpital, sur le fondement d'un manquement au devoir d'information sur les risques que comportait ladite intervention ;
Considérant que lorsque l'acte médical envisagé, même accompli conformément aux règles de l'art, comporte des risques connus de décès ou d'invalidité, le patient doit en être informé dans des conditions qui permettent de recueillir son consentement éclairé ; que, si cette information n'est pas requise en cas d'urgence, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, la seule circonstance que les risques ne se réalisent qu'exceptionnellement ne dispense pas les médecins de leur obligation ; que cette obligation s'étend à l'ensemble des effets indésirables que peuvent comporter les suites opératoires, ainsi qu'au caractère incertain des résultats attendus ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la technique de chirurgie au laser, comme toute chirurgie réfractive, présente notamment des risques de complications tenant à la perception de halos ainsi qu'à une gêne à la vision nocturne et que le résultat recherché ne peut jamais être garanti ; que, si les Hospices civils de Lyon soutiennent que Mme A a été informée de l'existence de ces risques liés à l'intervention, ils n'apportent pas la preuve qui leur incombe qu'ils lui ont donné cette information ; que la circonstance que la patiente avait, en l'espèce, la qualité de docteur en médecine ne saurait dispenser l'établissement hospitalier de son obligation d'une telle information, contrairement à ce que soutiennent les Hospices civils de Lyon ; que ce défaut d'information a constitué une faute susceptible d'engager la responsabilité du centre hospitalier à l'égard de Mme A ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte notamment du rapport d'expertise, d'une part, que Mme A, alors âgée de 50 ans, si elle supportait bien ses lentilles, présentait des yeux rouges et était très désireuse de recourir à une chirurgie de la myopie ; d'autre part, que la perception de halos la nuit, souvent décrite par les patients opérés de chirurgie réfractive, ne constitue pas vraiment, selon l'expert, une gêne dans la vie quotidienne et qu'il pourrait être remédié à la sous-correction par une reprise chirurgicale à l'oeil droit, ou à l'oeil gauche pour diminuer l'anisométropie ; que dans ces conditions, et alors qu'en sa qualité de docteur en médecine l'intéressée ne pouvait ignorer que le résultat recherché ne peut jamais être garanti, il ne résulte pas de l'instruction que la requérante, dans le cas inverse, aurait renoncé à cette intervention ; que, par suite, la faute commise n'a pas entrainé dans les circonstances de l'espèce de perte de chance pour Mme A de se soustraire au risque qui s'est réalisé et n'est pas susceptible de lui ouvrir droit à indemnisation à ce titre ;
Considérant que, dans les circonstances particulières de l'affaire, il y a lieu, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, de mettre les frais et honoraires de l'expertise à la charge définitive des Hospices civils de Lyon ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation des Hospices civils de Lyon mais qu'elle est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont laissé à sa charge les frais d'expertise ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par Mme A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les frais d'expertise sont mis à la charge des Hospices civils de Lyon.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 25 janvier 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête Mme A est rejeté.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié à Mme Laurie A, aux Hospices civils de Lyon, au service des prestations médicales de l'Etat monégasque et au ministre de la santé et des sports. Copie en sera adressée au professeur M. Ridings, expert.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2009 à laquelle siégeaient :
Mme Serre, présidente de chambre,
Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 janvier 2010.
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N° 07LY00721