Vu la requête et le mémoire ampliatif, enregistrés au greffe les 19 mai et 9 novembre 2009, présentés pour Mme Nurcan A, dont le domicile ... ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902543 en date 6 mai 2009, par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du 28 avril 2009, par lequel le préfet du Rhône a ordonné sa reconduite à la frontière et, d'autre part, de la décision du même jour fixant le pays dont elle a la nationalité comme destination de la reconduite ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Elle soutient que les décisions attaquées ont méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet elle a en France ses attaches familiales les plus proches, à savoir ses parents et ses grands-parents, ainsi que ses oncles, tantes, cousins et cousines ; que si ses deux soeurs habitent en Turquie, elles sont mariées et ne résidaient plus avec elle ; qu'elle vit en France avec M. B, son compatriote, titulaire d'une carte de résident ; qu'elle était enceinte lors de son interpellation ; qu'ils sont mariés religieusement et se sont mariés civilement au consulat de Turquie à Lyon le 19 mai 2009 ; qu'elle est en France depuis quatre ans à la date de la décision en litige et justifie d'une réelle volonté d'intégration ; qu'ainsi le centre de sa vie privée et familiale est désormais en France
Vu le jugement attaqué ;
Vu, enregistré le 27 janvier 2010, le mémoire en défense présenté par le préfet du Rhône, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête est irrecevable pour tardiveté ; que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont pas été méconnues et qu'il n'a pas entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation, alors notamment que les éléments mis en avant par la requérante pour justifier de sa vie familiale en France ne sont assortis d'aucune justification ; que si elle indique s'être mariée avec M. B, le document qu'elle présente n'est pas traduit ; qu'au demeurant M. B était déjà marié ;
Vu, enregistré le 27 février 2010, le nouveau mémoire présenté pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens et en outre par les moyens que, compte tenu de sa demande d'aide juridictionnelle, sa requête n'est pas tardive ; que M. B, avec qui elle s'était mariée religieusement, était divorcé de sa précédente épouse ; qu'elle s'est mariée civilement avec lui le 19 mai 2009 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 mars 2010 :
- le rapport de M. du Besset, président ;
- les observations de Me Delbes, avocat de Mme A,
- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;
La parole ayant de nouveau été donnée à Me Delbes,
Considérant qu'aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante s'est maintenue sur le territoire national au-delà de la durée de validité de son visa sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; qu'ainsi, elle se trouvait dans le cas prévu par les dispositions précitées du 2° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;
Considérant que la requérante fait valoir qu'elle réside en France depuis le 13 mars 2005, que ses parents, ses grands-parents et de nombreux parents collatéraux, à l'exception de ses frères et soeurs, résident sur le territoire français ou sont de nationalité française, qu'elle est mariée depuis le 19 mai 2009 avec un compatriote titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 18 juin 2013, et qu'elle est animée d'une réelle volonté d'intégration en France ; que toutefois, son mariage avec un compatriote titulaire d'une carte de résident est postérieur à la date de la décision en litige et elle n'établit pas qu'elle avait de longue date une vie commune avec celui-ci; qu'elle n'établit pas non plus ne plus avoir d'attaches familiales en Turquie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 26 ans et où vivent ses deux soeurs ; que, dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, le préfet du Rhône n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en ordonnant sa reconduite à la frontière ; que, pour les mêmes motifs, il n'a commis aucune erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête par le préfet du Rhône, que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nurcan A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Lu en audience publique, le 17 mars 2010.
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N° 09LY01087